Le mal de crâne paraît n’être rien face à côté du mal intérieur qui commence à te ronger. L’impuissance de pouvoir regarder par toi-même les annonces, les questions qui hurlent et trottent dans ta tête, cette incapacité à pouvoir faire comme bon te semble, de ne pas pouvoir être supérieur à cette faiblesse incroyable. Tu détestes Dan de te mettre dans un tel état ; tu n’es qu’humaine, Birdie, et Dan aura été une part importante de ton histoire, que tu le veuilles ou non. Que tu le détestes ou que tu l’aimes, tu as ressenti des choses fortes pour lui et le choc est à la hauteur de votre historique ; puissant et dévastateur. Apprendre une telle nouvelle de cette façon ne peut être qu’affreuse. Il n’y a pas de meilleure ou de pire façon de l’apprendre ; mais tu dois avouer qu’entendre Jordan te lire l’article à ta place, être tes yeux et ton roc à ce moment précis, ça te fout un coup amer. Tu préfères quand ce sont des phrases de petit con ou quand il te répète que t’es importante que tu aimes entendre de ses lèvres ; pas le déroulement de l’accident de ton ex.

Un accident ou un suicide ?
Dan se serait suicidé?
“C’est absurde.” que tu murmures à voix basse. Dan ne serait jamais arrivé jusqu’à là. N’est-ce pas ? La voix de Jordan te rappelle Penny, et l’accident de voiture d’il y a deux ans. Ta tête tourne. Tu tires sur ta clope, à moitié hagarde, à moitié en colère. L’injustice ne peut pas t’ôter l’ironie de la situation. Des accidents de voiture. Venant de Dan, cela n’est pas surprenant. Mais son suicide l’est plus à tes yeux. “What a fucking coward.” que tu grinces entre tes dents. Tu es sur la retenue sans savoir pourquoi. Oh, ce n’est que de l’apparence. Parce qu’à l’intérieur, la tristesse fait place à la rage, aux flammes caressantes d’une envie irrépressible de crier, de taper, de le tuer toi-même de nouveau. He’s already dead. Tu ne comprends pas, les raisons t’échappent et tu ne peux que penser qu’il aura été lâche et égoïste jusqu’au bout. “What a- He chose death over life. How-” Tu passes ta main libre sur tes yeux, la mâchoire cripsée, la main de Jordan sur toi ne suffisant visiblement pas à te calmer. Rien ne le pourra parce que c’est l’incompréhension. “Qui choisit la mort ? Il aurait dû se battre, putain, il aurait dû faire quelque chose pour aller mieux, pour-” Même si tu n’étais plus en contact avec lui, tu ne peux pas t’empêcher de lui en vouloir. Tu commences à t’agiter, tu tires un peu plus fort sur ta clope qui est vite finie ; alors tu en prends une deuxième tout en débattant pour l’allumer, tes gestes restant tremblants. Tu jettes le briquet sur la table basse, tu te relèves du canapé tout en passant une main dans tes cheveux et tu commences à faire les cent pas. “Il a choisi la facilité, il a pris la fuite, il a préféré… Putain, Penny doit avoir honte de lui. J’ai honte de lui.” Les mots sont forts, ils sont incohérents, ils sont terriblement spontanés aussi. Tu ne comprends pas ceux qui choississent cette trajectoire ; tu oublies que tu l’as déjà caressé quelques fois, toi aussi. Mais tu as choisi de vivre. Pas d’affronter, certes, mais tu as pris le trajet de la vie. C’est là toute la différence. “Quel putain d’égoïste. Quel lâche. Il a pensé à personne d’autre qu’à sa petite personne. Comme d’habitude. Même jusque dans la mort.” T’as un bref rire sans chaleur qui s’échappe de toi alors que tu prends une nouvelle taf avec force. “Il fallait qu’il parte en grandes pompes. Attirer l’attention une dernière fois.” Tu t’arrêtes pour regarder le ciel avant d’hurler “Go burn in hell, Dan!” avec un doigt d’honneur savamment dirigé. Ta lèvre inférieure se remet à trembler, tes yeux s’embuent de nouveau et tu serres les dents pour ne pas pleurer de nouveau. Tu es injuste envers lui mais tu juges qu’il le mérite. D’autant que tu réalises soudainement ; “Asher.” Oh boy, Asher. “Qu’est-ce que je suis censée faire ? Lui envoyer un message, l’appeler, aller le voir, jouer le silence ? Qu’est-ce que je dois faire ? Je sais même pas s’il est au courant, si ses parents sont au courant. J’ai- Faut que je sois là pour lui.” tu commences à t’agiter de nouveau, fébrile dans tes pas et dans tes pensées alors que tes larmes perlent malgré tout sur ton joli visage. “Mais je- Je peux pas aller à l’enterrement. Je pourrai pas, c’est trop pour moi, Dan ne le mérite pas, je suis… Je suis en en colère, je comprends pas, il ne mérite pas de cérémonie, seulement de croupir tout seul jusqu’à la fin des temps!”

“C’est absurde.”
“What a fucking coward.”
“What a- He chose death over life. How-”

Birdie commente au fur et à mesure de ta lecture. Ton bras autour d’elle, ta main qui la caresse sans interruption. “Qui choisit la mort ? Il aurait dû se battre, putain, il aurait dû faire quelque chose pour aller mieux, pour-” Tu la regardes alors que tu as terminé l’article qui n’y est pas allé de main morte. Elle a eu droit à bien des détails, toi aussi. Tu connais pas toute l’histoire mais t’as une bonne image de la situation à présent. “Il a choisi la facilité, il a pris la fuite, il a préféré… Putain, Penny doit avoir honte de lui. J’ai honte de lui.” Birdie qui s’est mise debout, qui tourne sur ta terrasse comme un lion en cage. Tu restes planté là, sans rien dire, sans rien faire qu’être là.  “Quel putain d’égoïste. Quel lâche. Il a pensé à personne d’autre qu’à sa petite personne. Comme d’habitude. Même jusque dans la mort.” Elle ne pleure plus ce qui pourrait être bon signe mais tu n’aimes pas la voir en colère à la place. “Il fallait qu’il parte en grandes pompes. Attirer l’attention une dernière fois.” Y’a pas grand chose que tu aimes quand ton oiseau est blessé et que tu ne puisses rien faire. “Go burn in hell, Dan!” Tu ne peux pas t’empêcher de fermer les yeux un bref instant de l’entendre hurler si fort. Tu te masses le front avant de rouvrir les yeux pour voir Birdie les yeux plein de larmes de nouveau. Baby… Mais tu ne dis toujours rien, tu ne bouges toujours pas. Tu essaies de lui envoyer tes meilleures ondes sauf que c’est pas évident non plus pour toi, même si tu sais que l’état de Birdie l’est un milliard de fois moins évident. Elle est touché directement. Il n’empêche que la voir comme ça te serre le coeur toujours plus.

“Asher.” Ah. T’avais cru comprendre qu’il devait y avoir un lien. Asher n’est nommé nul part dans l’article. Tu as aussi vu une photo du dit Dan Buckley et effectivement, y’a un lien de parenté évident vu leurs visages si similaire. “Qu’est-ce que je suis censée faire ? Lui envoyer un message, l’appeler, aller le voir, jouer le silence ? Qu’est-ce que je dois faire ? Je sais même pas s’il est au courant, si ses parents sont au courant. J’ai- Faut que je sois là pour lui.” Baby… Elle est en train de mettre son cerveau en surchauffe. “Mais je- Je peux pas aller à l’enterrement. Je pourrai pas, c’est trop pour moi, Dan ne le mérite pas, je suis… Je suis en en colère, je comprends pas, il ne mérite pas de cérémonie, seulement de croupir tout seul jusqu’à la fin des temps!” Tu te lèves enfin pour aller la prendre contre toi. La voir pleurer et si démunie devant la situation te bouleverse tellement… Tu caresses doucement son dos en la berçant un peu. Tes lèvres et ton nez sur le haut de sa tête où tu restes logé là à tout jamais si nécessaire. Même si tu sens bien qu’elle n’a pas pris de douche hier soir, t’en as rien à secouer. Tu fredonnes très légèrement un air sans même t’en rendre compte alors que tu ne t’arrêtes pas de la bercer le plus tendrement possible. Ton esprit qui vogue sur ce qu’il s’est passé hier soir. Qu’elle ait évoqué son ex juste hier, pour la première fois, qu’elle l’ait peut être vu… Mais vu l’article, il était mort, ou pas loin d’être mort, et bien loin de Brisbane à ce moment là. Plus de deux heures de route. Tu te dis que ce n’est pas une coïncidence. Il devait vraiment être là cela dit. Il est venu lui dire au revoir à ton avis. « Do you want another glass of water? » Que tu murmures contre ses cheveux alors que tu t’es arrêté de fredonner le doux air. Tu n’es pas sans avoir oublié que la miss est en pleine gueule de bois et que son corps doit avoir besoin d’encore plus d’eau. Elle ne va certainement pas avoir la tête à quoi que ce soit que de ressasser Dan, l’article, la mort. Elle a besoin de s'exprimer, de laisser sortir tout ça. Alors tu fais ce que tu peux, tu vas faire en sorte qu’elle reste en vie la Cadburry. Le plus longtemps possible. Au moins 60 ans de plus. Rien que ça Jordan. Ouais.

Tu rumines, tu as même la fumée qui sort de ton nez et de ta bouche sous les effluves de la nicotine dont tu pourris les poumons. Est-ce que c’est un suicide à longue durée, ça ? Peut-être bien, au final. Tu finiras par choper un cancer que tu cacheras au monde entier, tu repousseras tout le monde et tu croupiras toute seule jusqu’à la dernière minute, dans le mal et la douleur. Non, tu es en pleine santé pour l’instant. Tu fumes à outrance à ce moment précis parce que t’en as besoin. La nicotine, comme toutes les drogues, les addictions, ça fait croire que ça apaise les maux. Que ça aide à guérir alors qu’au contraire, ça fait pire ; ça bouffe l’intérieur et ça crée des illusions qui sont encore plus compliquées à s’extraire. Toute la furiosité ressentie s’extrait par tes mots poignants, tranchants, piquants ainsi que tes gestes brutaux. Les doigts tapent sur la rembarde de la terrasse, les autres tirent avec vigueur sur la tige de nicotinue sans pour autant pouvoir se contrôler. Tu es ébouriffée dans ton intérieur, la tristesse de la perte laissant la place à une étape importante du décès ; la colère. Tu t’en serais bien passée. Tu aurais préféré montrer que Dan a perdu tout impact sur ta personne depuis longtemps. Ce n’est qu’une illusion, ça aussi. Même à distance. Tu aimes si fort et pour toujours, Birdie. Alors ton cœur se brise d’un autre morceau. Tout comme quand Victoria t’a quittée, fauchée en plein cœur de l’âge et du bonheur. Tu n’as jamais pardonné Caleb, alors pourquoi tu pardonnerai Dan ? Pourquoi tu cèderas aux caprices du pilote qui a voulu partir en beauté jusqu’au bout ? Une attention qu’il n’avait plus vite retrouvée ; l’annonce de sa mort défile sûrement un peu partout et il doit être fier, le bougre, de là où il est. Son doigt d’honneur en guise de réponse au tien, tu l’imagines au-dessus de sa tête. Tu es en plein conflit interne sans savoir par quel bout prendre le problème. Non, ce n’est pas un problème ; c’est un caprice. Le dernier caprice de Buck. Il ne mériterait pas autant de considération. Mais voilà que c’est le cas. Si tu avais ton téléphone en main, si tu allais sur les réseaux sociaux, tu les verrais, ces inconnus qui pleurent le pilote. Toi, tu pleures l’homme. Et tu le disputes, aussi. Avec force. Avec hargne. Comme à chaque fois que vous étiez dans la même pièce.

Les larmes sont toujours aussi présentes. Jordan aussi. Son corps s’est levé et il est contre toi. Il te berce doucement, il chantonne un air quelconque - tu n’as pas les capacités à reconnaître si c’est une chanson réelle ou non. Tu t’en fous. Il peut même de chantonner un chant de Noël ou l’hymne nationale d’Irlande que tu t’en foutrais. Ton bras libéré de nicotine s’enroule autour de lui. Tu plonges ta tête contre son torse, ton nez reprenant cette odeur parfaitement Fisher. Les effluves qui t’apaisent et te rassurent, te démontrent que tu n’es pas seule, tu ne l’es plus. T’as un pilier, t’as un roc, t’as des jambes pour te porter, t’as des bras pour te soutenir. Des lèvres trouvant le trajet de ton crâne, espérant peut-être pouvoir assouvir, apaiser, gober un peu de ta peine. De ce fardeau sur les épaules qui te brise jusque dans les côtes. Tu te raccroches à lui, tes doigts contre son tee shirt, priant pour que ça aille mieux le plus tôt possible. « Do you want another glass of water? » “What ?” tu fronces des sourcils en relevant les yeux ; pourquoi il te parle de verre d’eau ? Le marteau piqueur se rappelle à toi et tu déglutis légèrement en reniflant, éloignant ton visage de Jordan pour passer ta main dessus, ainsi que pour reprendre une nouvelle taf. “Yeah, I guess yes. Can’t hurt me, right ?” Au moins ça, ça ne pourra pas. Tu passes ta langue sur tes lèvres sèches, baissant la tête avant d’attraper la main de Jordan au moment où il s’apprêtait à tourner les talons. “Thanks, Jordan. For being here. I’m sorry it- it’s happening right now. I know I’m not a current gift, and I’m being awful all over again and you have nothing to do with all that shit but… you’re here and it means a lot.” Même si en tout état de cause, tu es chez lui donc ce n’est pas comme si Jordan avait un autre endroit où aller se réfugier en attendant que la tempête passe. Si, son studio, par exemple. Tu déglutis légèrement en finissant ton mégot que tu écrases dans le cendrier avant de passer les mains dans tes cheveux. “If you have other plans, I can- I can leave you to them, I’m not sure I’ll be good company today…” T’es en pleine gueule de bois, tu as beaucoup pleuré, tu es remplie de rage qui s’éclipse au profit de l’épuisement et tu comprendrai que Jordan ne veuille pas t’avoir dans les environs ; tu ne te supportes pas toi-même à ce moment précis. T’es en train de pleurer ton ex alors que t’es avec ton actuel partenaire ; ce n’est pas juste pour Jordan. Mais l’idée de partir de chez lui te brise un peu plus un coeur déjà en mal, ton visage se déformant une nouvelle fois sous une mélancolie que tu retiens en serrant les lippes et pressant tes poings. “I should go.” You should sleep, Birdie.

“What ?”
« Water ? »

Que tu répètes. T’es conscient qu’elle a la tête totalement ailleurs et qu’il faille y aller avec un peu plus d’insistance. Au moins vu son air perplexe, elle a oublié le temps de quelques secondes que son ex vient de mourir. Elle renifle, elle fume, elle répond aussi. “Yeah, I guess yes. Can’t hurt me, right ?” Tu hoches la tête, content de cette réponse. Tu embrasses le haut de sa tête de nouveau avant de te détacher doucement pour la cuisine. Mais elle te retient et tu stoppes ton ascension vers l’intérieur. Tes yeux qui se tournent vers elle qui est marqué physiquement par la tragique nouvelle. “Thanks, Jordan. For being here. I’m sorry it- it’s happening right now. I know I’m not a current gift, and I’m being awful all over again and you have nothing to do with all that shit but… you’re here and it means a lot.” « Baby… » Elle va écraser le mégot dans le cendrier et tu la prends dans tes bras de nouveau à ce moment là. “If you have other plans, I can- I can leave you to them, I’m not sure I’ll be good company today…” Tu fais non de la tête mais elle ne te voit pas, son visage n’est pas relevé vers le tiens.  

“I should go.”
« Shhh… »

Tes deux bras qui la serrent à présent étroitement. « Not gonna leave my person… my partner when they need me the most. » Tu trouves ça totalement absurde les phrases qu’elle vient de dire, mais tu ne lui en tiens pas rigueur car elle est en état de choc. Tu te détaches juste assez pour pouvoir voir le visage de Birdie, celui ci même que tu vas délicatement relever vers toi via son menton. « I’ll be there for you in any way you want me to. » Ce qui sous entend aussi que si elle ne veut pas être avec toi, elle a tout les droits. Tu sais ce que c’est d’aimer des gens que tu ne vois jamais. Tu ne sais pas comment Birdie va gérer tout ça. Tu veux juste qu’elle fasse comme elle le sent. « You’re not awful and whatever bullshit you just said. » Si elle essaie de te repousser en mettant des mots dans ta bouche, ça ne va pas marcher du tout. Tu vas t’accrocher comme une moule à son rocher. Contre vents et marées. T’as pas peur. Tu préfères être avec elle dans ces moments là que d’ignorer où elle est, ce qu’elle fait, comment elle va. « My only plan is to be by your side, ok? » Tu vas doucement caresser sa joue, glisser un doigt sur sa pommette humide, son visage rougit de sa colère, de ses larmes, tout autant d’émotions qui font d’elle un être humain. Celui là même que tu aimes toujours plus au fil des journées.  Please want me by your side. Don’t push me away. Birdie est de ces personnes qui ne te surprendrait pas à vouloir se couper du monde dans les moments les plus sombres de leur vies. Et toi tu fais parti de ceux qui ne lâchent rien, qui ne partira jamais, même si ce n’est pas son souhait, car tu penses fortement que c’est pour son bien. « Come with me inside, it's cold out there. » Tu te détaches doucement pour ne prendre plus que sa main afin d'aller à l'intérieur.

« Baby… » tu déglutis parce que t’as l’impression de dire des conneries et des incohérences quand Jordan fait part de ce genre de commentaires. Il n’a pas tort, tu es idiote si tu penses qu’il va te laisser partir. Si tu penses être un fardeau, qu’il va te laisser le choix de te repousser. Tu ne tromperai aussi personne à partir ; tu reviendrai aussitôt parce qu’au final, tu te rendras compte que la présence de Jordan t’es essentielle maintenant plus que jamais. Tes doigts libérés de nicotine s’en vont à deux mains s’accrocher à lui ; voilà la preuve si tu en doutais encore. « Shhh… » T’ignores ce que t’as fait pour mériter tout ça. Aussi bien le suicide de Dan, l’accident de Victoria que les bras, l’amour, la tendresse de Jordan. Il te chérit mieux que personne sur cette terre et ça t’apaise en même temps que ton coeur se serre toujours plus fort. Ton compagnon ne te mérite pas dans cet état et pourtant, il ne bouge pas ; au contraire, il s’applique à refermer un peu plus son étreinte, à t’engloutir contre lui avec force - lui en aura pour deux. « Not gonna leave my person… my partner when they need me the most. » Tes émotions flanchent en même temps que ton organe vital vrille, coupée, soufflée par la douceur de ses mots qui apparaissent comme la meilleure des pommades pour tes douleurs physiques, émotionnelles et mentales. Un doigt redresse ton menton et vos regards se connectent réellement pour la première fois depuis l’annonce. « I’ll be there for you in any way you want me to. » t’es accrochée à ses paroles ; au milieu de tes sentiments partagés face au choc, au désarroi, à la peine, il y a Jordan que tu ne quittes plus de tes prunelles. Ton premier réflexe serait de t’enfouir dans ton lit, chez Mason, sous ta couette et y rester prostrée jusqu’à ce que le vent tourne en ta faveur de nouveau. Mais tu n’avais pas Jordan, avant. Tu n’avais pas le musicien aussi persistant que téméraire dans toute sa volonté à vouloir te laisser le choix de sa place dans ton existence, à ce moment précis, mais en réussissant à te faire comprendre qu’il sera là. « You’re not awful and whatever bullshit you just said. » Tu déglutis de nouveau, le regard vrillant légèrement sur le côté, comme honteuse d’avoir émis cette idée alors que visiblement, c’est bien des foutaises. « My only plan is to be by your side, ok? » Tu restes quelques secondes sans rien dire ni faire avant d’hocher la tête doucement. “Okay.” Si tu pleures pour la disparition de Dan, tu es aussi tendrement affectée par la présence inébranlable de Jordan. Son soutien est inestimable, tu pensais sincèrement les mots que tu as dit quelques minutes avant. Jordan est précieux, ce qu’il amène avec lui l’est tout autant. Il te fait découvrir tellement de choses, ce qu’est une véritable relation, il balaie tes incertitudes, tes peurs, tes interrogations, tes craintes d’un renvers de la manche ; mais tu sais que ce n’est pas évident pour lui. Il sait ce que c’est de perdre quelqu’un. Tu dois lui ramener de sales souvenirs et ça te mine le moral d’en avoir conscience. « Come with me inside, it's cold out there. » Ce n’est pas comme si tu avais le choix alors que ton partenaire te tire à l’intérieur.

Tes yeux dérivant sur vos mains liées, tu attends d’être dans le salon pour l’attirer de nouveau contre toi. “Jordan.” be by your side. in any way you want me to. Les doigts montent sur son visage, en parcourant la forme, une découverte avec un regard neuf, comme si c’est la première fois - à chaque fois, t’es impressionnée de voir à quel point il est beau. Il l’est encore plus après les paroles qu’il a prononcées, comme des caresses sur ton coeur ; tu veux continuer sur cette lignée. be by your side. in any way you want me to. Ta deuxième main lâche la sienne pour aller sous son haut, avoir le contact avec la peau de son flanc. Ton cœur tambourine, tes sens sont sans dessus dessous ; tu n’as qu’une certitude. “I need you. I’ll always need you.” que tu murmures en grimpant sur la pointe de tes pieds, en t’appliquant à le courber vers toi, pour mieux pouvoir attraper ses lèvres. be by your side. in any way you want me to. Ton baiser doux devient un peu plus insistant, ta main sur son flanc vole sur le bas de son dos pour le rapprocher un peu plus de toi. Si tu ne fuis pas physiquement, alors tu fuieras mentalement. Jordan est là, Jordan peut t’aider, Jordan n’est pas la solution mais il peut être une béquille à cet instant précis. T’as besoin d’oublier, de ressentir autre chose que la peine et la douleur, la colère et l’incompréhension. Tout cela n’a aucun sens ; seul Jordan en a. A cet instant précis, il n’y a que tes sentiments pour lui qui sont clairs, limpides. “Please, make me feel something good.” Et tu sais, tu sais que Jordan te fera sentir bien. Même si tu ne peux t’empêcher de te voir comme un être misérable à l’utiliser en distraction. A ne pas pouvoir assumer ton deuil soudain avec plus de clairvoyance, de sagesse. Ta deuxième main vole sous son tee-shirt aussi, parcourant avec avidité et empressement son tronc en même temps que tes lèvres sont désespérées au possible contre les siennes. Quelques larmes continuent à perler. Mais l’amour de Jordan est plus fort que tout ce que Dan a pu t’emporter. Seulement ton partenaire peut adoucir tes maux. S’il y arrive avec des mots, alors il y arrivera tout autant avec ses mains. Please show me how you love me.

“Okay.” Tu vois qu’elle est toute retournée par bien des choses. La situation, tes mots, ses émotions sont sans dessus dessous et elle a l’air capable de s’endormir dans les dix prochaines minutes si elle s’allongeait vu la fatigue de son visage. T’as l’impression d’avoir réussi à la calmer quelques peu avec tes mots, mais tu sais très bien que ça va venir par vagues toutes ces émotions. Tu es plutôt calé du côté du deuil et Birdie a déjà perdu quelqu’un d’important pour elle. Ce n’est pas totalement nouveau, même si chaque décès sont uniques car les liens sont différents, les moments dans nos vies aussi. Tu te dis certainement stupidement que cette fois ci sera moins lourd pour elle parce que tu es à ses côtés. Elle te suit à l’intérieur, plutôt docile, ça te conforte dans ton hypothèse qu’elle va juste s’étaler comme une masse en une poignée de minute si elle est installée confortablement.

Tu vas pour lâcher sa main afin de lui servir le verre d’eau que tu lui as proposé mais elle t’attire contre elle de nouveau. “Jordan.” Tu la regardes, attendant de voir ce qu’elle va dire, ou faire. Elle a toute ton attention. Sa main libre sur ton visage, l’autre qui se défait de la tienne pour se glisser sous ton haut. “I need you. I’ll always need you.” Elle s’allonge de toute sa taille et s’applique de façon à arriver contre tes lèvres. Tu réponds à son baiser, celui là même qui gagne en intensité mais que tu ne suis pas forcément car tu es physiquement et mentalement fatigué. Une main sur son bras, l’autre dans son dos, tu la gardes contre toi. “Please, make me feel something good.” Bien sûr que tu comprends ce qu’elle veut dire par là. Y’a ses gestes avec ses mots. C’est clair et limpide ce qu’elle te demande là.

Tu défais doucement tes lèvres des siennes quand ses caresses sur ton corps commencent à se faire avec plus d’empressement. « Follow me… » Que tu lui dis alors que tu prends ses deux mains pour l’entraîner avec toi jusqu’à la chambre. Jusqu’au lit où il se fera bien plus confortable de s’installer. Car tu as froid, tu as aussi sommeil. Tu fais sauter tes claquettes alors que tu t’allonges de nouveau dans la couette en attirant Birdie contre toi. Ton lit, celui là même qui est le plus confortable de toute la planète entière. Tellement confortable, tellement t’es fatigué, tes yeux sont déjà en train de vriller brièvement mais tu veux pas laisser Birdie seule. Tu vas tenir réveillé. C’est sûr, car t’es beaucoup trop inquiet pour elle pour pouvoir t’endormir comme si tout allait bien. Car y’a rien qui va là. Autant le décès de Dan que l’envie de Birdie de tirer un coup pour penser à autre chose que sa peine. Tu comprends tout à fait ce mécanisme, tu l’as déjà utilisé par le passé mais avec de parfaits inconnus qui ne connaissaient rien des tenants et aboutissants des tréfonds de ton esprit. Pas comme là. Elle a encore des larmes dans les yeux et quand bien même tu ne serais pas fatigué, tu n’as pas du tout l’état d’esprit pour se faire. Pas maintenant quand toi aussi t’es tout retourné. Elle va sûrement t’en vouloir, mais ce sera juste une façon de faire sortir sa colère et la diriger autrement que vers le véritable fond du problème. Ce problème qui ne changera jamais car Dan est mort et il n’y a pas de retour possible. Il faudra qu’elle se laisse le temps de l’accepter plutôt que de chercher à l’ignorer.

« Follow me… » docile et disciplinée, tu le suis. Jordan peut t'emmener là où il veut, tu le suivras quoiqu'il arrive. Sauf que tu ne peux pas empêcher le froncement des rides de ton front quand tu le vois se diriger vers la chambre. Et plus spécifiquement dans le lit. Ironiquement, tu le veux lui, tu le suivrais partout, mais pas ici. Le lit, ça veut dire s'allonger. Ce qui révulse d'avance ton estomac et tout le système intérieur. Le lit, ça veut dire aussi prendre le risque de s'endormir. Tu es fatiguée, ton corps est épuisé, ton esprit encore plus mais tu refuses. T'es toute raide quand Jordan t'attire contre lui. Il ne donne aucun baiser. Aucune caresse. Aucun signe de tendresse à ton égard à part te tenir contre sa forme. Tes paupières restent ouvertes, réalisant qu'il va falloir que tu prennes les devants. Tu n'as peut-être pas été claire. Alors tu te tournes contre lui, regardant tes doigts qui s'emmêlent machinalement avant de lever ton visage vers le sien. "You said you'll be by my side in any way I want." Tu déglutis ; tu te dégoûtes toi-même. Persuadée que Jordan a très bien compris ce que tu attendais, mais il te le dénie. Il te refuse ça. C'est pour ton propre bien, pour le sien aussi, et pour l'entièreté précieuse qu'est votre relation pour ce genre de choses. Mais toi,  tu le vis comme une humiliation dont je ne pensais pas être victime de sa part un jour. Il n'y a pas de public, pas d'yeux curieux mais il a toi, et il y a lui, et c'est déjà beaucoup trop. 

Tu baisses de nouveau les yeux avant de te retourner pour ne plus le voir. Tu vas sur ton côté, sur ton bord, délaissant complètement la silhouette de Jordan. Tu creuses la distance entre vous. Tu te replis, tes genoux remontent contre ton buste et tu repars en sanglots discrets. Tout ce que tu voulais est que Jordan te fasse ressentir autre chose. Qu'il te réconforte aussi qu'il est là, qu'il te prouve qu'il t'aime, qu'il te le montre. Au lieu de ça, c'est un gouffre béant dans ta poitrine. Tu n'as même pas la force de tempêter. Tu n'as pas le coffre nécessaire pour répliquer face à cette inertie de sa part. "I thought you would try to make me feel better. That's usually what we're supposed to do for people we say we love." que tu réussis seulement à murmurer, des paroles gonflées de sanglots, de légers reniflements. Ta gorge est sèche et le lit te paraît être le camp ennemi pour l'instant ; alors tu te lèves et tu sors de la chambre. T'as besoin de ce verre d'eau. Au moins, ça, on peut te le donner. Tu bois un verre entier puis un deuxième et un troisième. Tu ignorés si c'est juste une façon d'attendre que Jordan s'endorme. Tu ne comptes pas retourner au lit. A la place, tu vas sur le canapé. Il y a ton téléphone qui te fait de l'œil sur le comptoir de la cuisine. Tu devrais contacter Asher. Cependant, tu ne bouges pas. Tu attrapes un hoodie que quelqu'un a laissé traîner sur le rebord du canapé pour le poser sur toi. Les yeux devant, plongés dans le vide. Les pensées sont nombreuses mais tu n'en entends aucune. Finalement, le marteau piqueur a du bon. Tu devrais ressortir ce soir. Trouver de quoi te faire sentir bien dehors. Cela ne t'empêche pas de plonger ton nez dans le coussin du canapé. De ne toujours pas bouger. De pleurer encore. Un peu moins. Mais tes jolies prunelles rougissent sévèrement et elles finiront bien par ne plus avoir une goutte d'eau à évacuer. Le plus tôt serait le mieux. 

Elle se braque. Elle aime pas ton plan. Y’a rien qui va et quoi que tu fasses, rien n’ira car c’est la merde et rien ne peut le changer. "You said you'll be by my side in any way I want. » Elle joue sur les mots Birdie. Ça te fait quelque chose quand même, qu’elle soit capable d’insister sur ta phrase en l’utilisant contre toi comme si c’était juste. Comme si tu n’étais qu’un objet sans sentiments qu’elle pouvait utiliser quand elle voulait. Tu prends fort sur toi pour ne pas être blessé car tu sais qu’elle est vraiment mal et que c’est le bordel dans sa tête. Y’a trop de choses qui s’ajoutent à sa gueule de bois. Tu veux lui laisser un free pass pour aujourd’hui, mais tu ne te plieras pas à la laisser utiliser ton corps pour oublier sa peine. « Yeah I said that… » Tu as réellement pas envie de la blâmer car tu comprends en même temps. Tu n’as pas envie de lui dire que t’es pas un objet parce qu’elle est assez mal comme ça. Elle n’a pas besoin de plus. Tu essaies de la prendre dans tes bras car tu veux la cajoler comme tu peux malgré tout, histoire qu’elle se sente mieux mais elle te tourne le dos. Tu fermes les yeux un bref moment. Triste de la voir si mal… Triste que tu ne puisses rien faire véritablement… Tu la vois se recroqueviller, tu sens qu’elle pleure, tu vas caresser son dos en lui laissant son espace mais voulant quand même avoir un contact avec elle un minimum. "I thought you would try to make me feel better. That's usually what we're supposed to do for people we say we love. » Tes yeux qui se ferment de nouveau. She’s angry. She’s sad. She’s hurt. Don’t. Say. Anything. You. Will. Regret. Car t’en as à foison des phrases qui te viennent en tête là pour lui mettre en plein visage le pourquoi tu ne lui donnes pas ce qu’elle veut. Ca va faire très mal et tu ne veux pas. Ca sert à rien, mais c’est aussi dur de garder ton sang froid quand elle te comme un objet sans sentiments et états d’âmes. She’s hurt. Oui oui, vas y répète toi le encore Jordan. Ne dis rien. Rien ne sera bon de toute façon. Rien du tout. Et quand tu rouvres les yeux elle n’est plus là, tu tends l’oreille et tu n’entends pas la porte d’entrée. De toute façon tu ne la penses pas capable de déverrouiller le tout en un temps record là. Puis tu crois entendre des bruits d’eau. Elle est toujours là. Dans la cuisine ou la salle de bain. Tu te détends un peu. Tu te mets sur le dos. Tu soupires longuement essayant de te remettre tes idées en place. Essayant vraiment fort de pas aller lui dire que t’es quand même plus qu’un sex toy. She’s hurt. Don’t. Say. Anything. Le temps. Y’a que ça qui va aider. C’est trop frais.

Tu passes tes mains sur ton visage et il est certain maintenant que tu ne vas pas réussir à t’endormir car ton sang est encore en train de vriller dans tes veines. I won’t say anything. Nah. Tu te maîtrises mais tu prends le temps de te calmer, tu prends le temps de parler à Rosa dans ta tête. Apprendre la mort de quelqu’un qu’on aime via une notification, tu n’as jamais vécu ça… Tu sais pas combien de temps tu restes dans ton lit à regarder le plafond mais quand tu te lèves, elle est sur le canapé totalement recroquevillée. Tu fais un léger détour avant de la rejoindre. Tu vas prendre un très grand plaid dans le placard du couloir pour le mettre sur tes épaules. Quand tu vas t’asseoir à côté de Birdie, tu passes ton bras autour de ses épaules. Celui la même qui tient aussi un bout du plaid afin que celui ci vous enveloppe tous les deux. Tu poses ta tête contre la sienne. Tes yeux ouverts, t’es dans tes pensées et tu espères qu’elle va finir par s’endormir, histoire d’éteindre son cerveau pour quelques heures. Tu sais pas combien de temps ça va prendre, tu l’entends pleurer et t’es juste là… Tu peux rien faire. Même pas lui donner la seule chose qu’elle voulait. Moi je suis fier de toi Jordan, t’as quand même un peu d’amour propre. Si cette tragédie aura permis une chose, c’est de t’en rendre compte. Tu viens de loin toi aussi. Toi qui te penses complètement fucked up. Tu guéris mine de rien. Thank god. Ouais parce que tu bosses pour. T’as tes travers mais tu as tes limites quand même. Aujourd’hui tu t’en rends compte pour la première fois même si ça fait mal de lui dire non…

Tu prends la télécommande qui est posé juste à côté et t’allumes Netflix, baissant le son très bas histoire de pas déranger quoi que ce soit si elle s’endort ou si elle veut du silence. Tu mets A Star Is Born, que tu as déjà vu 100 fois mais dont tu ne te lasses pas. D’ailleurs ça ne commence même pas au début parce que tu avais déjà commencé un autre jour, du coup tu continues là où ça en est. Pas dérangé. Tu connais le film par coeur de toute façon. Tu veux juste rester avec Birdie le temps qu’elle s’endorme.

« Yeah I said that… » alors pourquoi tu ne le fais pas, Jordan? Pourquoi tu restes juste planter là alors que les intentions sont claires et limpides? Pourquoi tu ne peux pas m'embrasser à m'en faire perdre la tête, à chambouler mon intérieur par tes mains sur moi? Si mes paroles n'étaient pas des foutaises, prouve- le moi, Jordan. Que je ne suis pas affreuse. Que je mérite de recevoir de l'affection. Que je ne traîne pas la mort derrière moi. Prouve moi que t'es vivant, que t'es là, que tu ne vas pas m'abandonner aussi. Que je pourrai toujours te retrouver dans la foule, que j'aurai à jamais le creux de ton être en réconfort contre le mien. Que je te donne envie, que tu m'aimes, que tu vibre pour moi comme je le fais pour toi. Je demande simplement que tu m'emporte ailleurs, Jordan, je-

Tu as été dure. Tu as été cruelle. Tu as retourné les mots contre leur propriétaire. Mais engloutie par ton mal être, tu ne t'en rends pas compte. Pire encore, tu penses que tu es en droit. Que c'est légitime. Tu ne vas pas bien et tu aurais pensé bêtement que ça aurait été le rôle de Jordan de te réconforter. In any way. Son refus, son rejet piétine un peu plus ton être déjà en mal. Tu te sens terrible. Incapable d'être aimée dans ces moments là. Que si ton partenaire, celui qui fait vibrer ton cœur, celui qui te fait découvrir toute la joie que c'est d'être avec quelqu'un, si cette personne n'est pas capable de venir assouvir ta peine, qui le peut? Tu lui en veux mais t'en veux encore plus à Dan et surtout à toi-même d'être comme tu es. De te laisser bercer par toutes ces émotions négatives. Tu ne vois pas le temps qui s'écoule sur ce canapé. Tu as à peine conscience que des pas se font entendre. L'ombre de Jordan passe devant tes yeux qui ne voient rien. Tu restes recroquevillée sur toi. Égoïste au possible  justifiée à ton sens que tu n'as plus. 

Quand tu sens une présence à tes côtés, tu réagis à peine. Au moins, t'es rassurée de voir que tu ne le rebute pas. Cela n'est pas juste pour lui mais est ce que ça l'est pour toi aussi? Toute cette situation ne l'est pas mais tu ne devrais pas en vouloir à Jordan. Il n'est pas responsable de ton malheur. Au contraire, le voilà qui passe un bras autour de toi. Il te replonge dans votre bulle ; il est téméraire, persistant et déterminé, ton partenaire. Sa tête est sur la tienne et tu sens son souffle en plus de son pouls contre toi. Tu fermes les yeux et tu te rends compte à quel point il t'est précieux. Qu'au final, même après ce que tu lui as dit, Jordan est toujours là. Tu finis alors par plonger contre lui. Tu te prélasses sur son torse, tu vas respirer son parfum, tu glisses tes lippes sur la peau de son cou. Tu ne le dis pas mais t'espère qu'il entend, comprend et accepte tes pardons. Tu ne fais pas attention au film. Ce n'est qu'un bruit de fond. Tu te concentres uniquement sur Jordan. Ton nez se coince contre lui et ta tête se pose doucement sur son épaule. T'es fatiguée. Tu ne vas pas continuer à lutter. Les pensées seront évacuées tant que Jordan est là. Même s'il ne dépose pas ses mains sur toi, sa présence reste précieuse et inestimable. Tu l'aimes tellement, tu ne veux pas le perdre et c'est sous cette impulsion que tu passes un bras autour de lui. Tes jambes s'abaissent contre ses cuisses et tu soupires légèrement. Tu finis par t'endormir doucement, comptant mentalement les pulsions du cœur de Jordan, tes doigts allant se mêler aux siens en même temps que tu t'assoupie. Tu iras mieux, Birdie. Laisse-toi le temps. Tu finiras par aller mieux. Jordan est là. 

Tu sais pas si elle est calmée, ou si elle commence à être exténué pour réagir autrement, mais elle se cale un peu plus contre toi. Tu viens tout juste de glisser ton bras autour d’elle et ton meilleur plaid sur vous. Tu caresses doucement son épaule alors qu’elle dépose des baisers dans le cou. Ta main sur son bras qui émet une pression sur elle. I understand. Ta tête toujours posée contre la sienne. Elle se colle encore plus à toi, sa main dans la tienne en plus de tout. T’as toujours l’impression que ce simple geste est aussi celui qui lie directement vos coeurs ensembles. Tu regardes le film alors que tu sens qu’elle s’endort. Il restait moins de la moitié et quand il est terminé tu n’as pas le coeur à la déplacer, ni la force de la porter de toute façon. Alors tu te contentes de rester comme ça après avoir allongé tes jambes sur la table basse. Tu pars pour une ou deux heures de sommeil supplémentaire. Le jour est déjà levé mais le silence est quand même bien là dans la pièce et vous pouvez vous reposer correctement.

Tu te réveilles avant elle et tu te tournes un peu plus contre elle, ton deuxième bras allant se poser sur une de ses cuisses. Tu somnoles encore un peu jusqu’à ce qu’elle émerge à son tour. Son visage est marqué par la tristesse. Tu vas déposer un baiser sur son front. Tu laisses tes lèvres posées là pendant quelques secondes. Tu laisses le silence de la pièce vous bercer tous les deux pendant de longues minutes. Tu ne sais pas de quoi elle a envie, sûrement de rien. Tu ne bouges pas du canapé, ou juste pour lui faire glisser ses jambes sur les tiennes afin qu’elle soit encore plus proche de toi. Tes lèvres toujours sur son front. Fier que ton canapé soit très confortable car tu n’as pas mal aux fesses, ni au dos.

C'est Morphée qui t'embarque mais c'est Jordan qui te porte. Pleinement, solidement, doucement. Avec délicatesse, avec cette tendresse dont il est capable. Tu ne serai pas en train de dormir que tu le verrais. Les gestes doux. Les regards bienveillants. Ton ange gardien qui veille sur toi alors que tu lui as fait bouillir le sang quelques minutes auparavant. They put you first. Et c'est pour ça qu'il t'a freiné. Qu'il t'a stoppé. Pour ne pas que tu regrettes. Oh tu le regretteras sûrement. Plus tard. Quand les souvenirs reviendront en même temps que la conscience. Quand le marteau piqueur ne sera plus présent pour envahir ton cerveau. Quand ta gueule de bois finira par disparaître. Mais pas la douleur. Ni la colère. Il faudra apprendre à la diriger vers la bonne personne. Non pas vers Jordan. Si tu pouvais lire son esprit, tu verrais ce qu'il s'y trame. Que tu as failli le foutre en l'air pour ton simple malheur égoïste. Pour un ex dont tu n'avais plus de contact depuis des années. Mais qui s'est suicidé malgré tout. N'y penses pas. Par bonheur, ton sommeil est alourdi par la charge émotionnelle. Il est enseveli sous le poids des émotions et de l'éthanol qui persiste. Ce qui est une bonne chose car la lourdeur de tes songes te permet de ne pas être agitée. Aucun cauchemar, pas de rêve, que le néant. Les bras de Jordan suffisent à te protéger contre tout ça. Il est ton attrape rêve personnifié. 

Quand tu reprends conscience de ta forme physique, tes yeux sont toujours fermés et tu humes légèrement en te positionnant un peu mieux. Tu te dis que le matelas est bizarre, tu ne comprends pas pourquoi tu es à moitié assise et pourquoi le plaid est sur tes épaules et non sur tes cuisses. Là où une petite brise vient te chatouiller, en même temps que des lèvres sur ton front. Mmh, le matelas est bizarre mais c'est normal alors que tu réalises, tu te rappelles que tu t'es endormie contre Jordan. Celui-là même qui te berce tranquillement dans le monde des conscients. Tu restes de longues minutes avant d'ouvrir les paupières. Ton partenaire a le temps de placer tes jambes par-dessus les siennes et tu soupires d'aise. Enfin tes yeux se connectent sur lui, baillant légèrement en redressant la tête vers la sienne. Tu te mords la joue, ne sachant pas quoi dire, avant de te décider à embrasser le coin de ses lèvres et de te lover de nouveau contre sa silhouette. Les bras autour de son tronc se font intense en pression et tu racles ta gorge, de nouveau sèche, alors que tes yeux rougis ont l'air d'avoir doublé de volume sous les larmes versées. Tu aurais besoin d'une compresse, ou mieux, d'une douche. Mais tu n'as pas la volonté de bouger pour l'instant. Tu réfléchis à tes paroles tout en caressant d'un air absent du bout des phalanges la cuisse nue sous le plaid de Jordan. "Tu t'es rendormi? Dans cette position?" que tu demandes, en observant les pieds sur la table basse. Tu n'aurais pas pensé qu'il serait venu. Resté. Il aurait pu vous bouger. Ou se bouger lui. Mais non. Jordan est là et même si ton dos est un peu douloureux sous ta position voûtée, c'est un mal pour un bien. Un mal nécessaire pour te punir, certainement.

Elle t’embrasse le visage et tu prends ça comme un good morning. Tu la serres un peu plus. Good morning to you too. Elle se cale davantage sur toi. Tu pourrais l’avoir littéralement sur toi 24 heures sur 24 que ça ne te dérangerait pas. Au contraire. Tu aimes pouvoir toucher les choses qui te sont précieuses, ça te rassure. Elle est là. Elle part pas. Elle cherche ta peau, elle la trouve bien aisément. "Tu t'es rendormi? Dans cette position?" Tu hausses les sourcils brièvement, pas sûr de comprendre pourquoi c’est si surprenant. « J’ai aucun contrôle sur mon sommeil. » Quand il t’assomme, tu ne peux rien faire que dormir, peu importe où et comment. Ton corps est juste content de pouvoir se reposer vu tes habituels trois ou quatre heures de sommeil par jour. On peut même pas dire par nuit à ton sujet. Généralement tes horaires c’est plutôt entre 5h et 10h.

« Tu veux qu’on aille s’allonger ? » T’aimerais bien qu’elle mange ou qu’elle prenne une douche, ou même les deux. Mais tu veux rien imposer et si tu la vois être déshydraté c’est à ce moment là que tu lui mettras un verre d’eau sous le nez. Tu vas la garder fonctionnelle dans cette dure épreuve, mais tu ne veux pas qu’elle te déteste d’être autant derrière elle non plus. L’utilisation du on n’est pas anodine. Tu t’inclus parce que non seulement tu ne veux pas la laisser, mais en plus, ça prouve très clairement que ce n’est pas spécial pour elle. C’est pour toi aussi. C’est pour vous, ensemble. Elle n’est pas une petite chose malade de qui il faut prendre soin. C’est une tempête qu’il faut traverser, tu ne sais pas combien de temps elle va durer, mais tu seras avec elle tout le long. Tu remets un peu mieux le plaid sur Birdie car tu as personnellement froid et tu te dis que c’est peut être son cas aussi. Même si elle a un bon hoodie sur le dos et ce n’est pas ton cas.

« J’ai aucun contrôle sur mon sommeil. » Tu hoches machinalement la tête. Tu ne souhaites pas que Jordan soit dans une position inconfortable, encore moins par ta faute. Mais il l'a quand même fait. Il est toujours là. Tu peux resserrer ton étreinte contre lui car il t'en laisse l'opportunité. Il y a de la reconnaissance en toi et cela te permet presque de mettre de côté la véritable contrariété du jour. La réponse de Jordan a du sens. Même si t'es persuadée que c'est juste parce que t'es là qu'il est resté. Tu n'aurais pas pensé et tu réalises de nouveau. Le décès, le suicide, l'envie d'oublier si forte, si intense, la peur, le désespoir. Te raccrocher à Jordan pour te raccrocher à la vie, à ton présent, à ta réalité. Oui, Dan est mort mais Jordan est vivant. « Tu veux qu’on aille s’allonger ? » Tu fais la moue, celle qui est indécise, celle qui réfléchit. Puis tu secoues la tête alors que tes bras se décident de le serrer contre toi. "Nope." Tu ne veux pas dormir. Tu te sens pâteuse, tu te sens sale, tu as la bouche sèche malgré l'eau ingurgité. "J'aimerai bien me laver. Et prendre un café." Des mots qui devraient rassurer Jordan. Tu as l'air plus reposé. Ou alors tu préfères ne pas y penser. Oui, ça vaut mieux pour l'instant. 

Tu finis par déployer tes jambes sur celles de Jordan, les emmêlant entre elles. Voir qu'il s'applique à mettre le plaid sur vous, t'es quasiment à moitié sur sa forme. "Are you cold?" Parce qu'il n'est pas beaucoup couvert. Toi non plus, même si tu as un shirt sur le dos et un hoodie sur les épaules. Te centrer de cette façon sur Jordan est meilleure. C'est de lui dont tu devrais faire attention. De veiller que rien ne lui arrive. Le garder près de toi, en bonne santé, vivant. Alors tu l'embrasse de nouveau sur le menton. Tranquillement. Sans rien attendre de plus. Juste lui prouver que t'es avec lui. Que t'es présente, que t'es à lui. Lui prouver qu'il est ton présent et possiblement ton futur. Tu ne veux pas vous porter le mauvais œil, ceci dit. Mais tu apprécies cette perspective, aujourd'hui plus que d'habitude. "I heard there is a nice bathtub over there." Que tu dis avec une certaine malice, mais aussi un peu de retenue, comme si tu étais craintive qu'il te dise non. Tu ne veux pas le soumettre à ta volonté ; t'iras prendre une douche si la réponse de ton partenaire est négative. Tu veux juste te rafraîchir. Et qu'il se réchauffe réchauffe jamais. Jordan est si précieux. Ton cœur s'alourdit ; repenserais-tu à ce que tu lui as dit il y a quelques heures? Tu ne sais plus trop, mais t'as fauté quelque part, tu le ressens. Tu diriges tes lèvres vers les siennes pour l'embrasser doucement. Tes doigts caressent la racine de ses mèches, alors que tu t'appliques à déposer un autre baiser sur ses lippes avant de baisser les yeux. "Tu crois que… que tu pourrai me faire écouter sur quoi tu travailles en ce moment?" Tu mords ta lèvre tout en relevant tes paupières sur les siennes, tes doigts se dirigeant vers sa joue en souriant faiblement. "Si j'ai le droit." Parce que ça te semble toujours top secret ce qu'il fait, en bas dans sa cave secrète, ou son ordinateur.