« J’ai pas dit ça pour ça. » je hausse une épaule alors que tu fais ton modeste timide. Je te vois bien lutter pour ne pas sourire face à ce compliment qui n’était qu’une façon de t’assurer (et à moi aussi) que ce que j’avais avec Dan n’avait rien avoir à ce que j’ai avec toi maintenant. Avec toi, c’est plus intense, c’est plus beau, c’est plus magique. C’est incroyable, comme si le temps avait attendu de toute sa longueur dans l’espace pour nous faire nous rencontrer réellement. “Je dis seulement la réalité.” je souffle alors que tu m’embrasses le visage. Une de mes mains va chercher le réconfort d’une des tiennes que j’emprisonne de mes doigts alors que je me berce contre ta silhouette. Je bouge, je change de position, j’embête l’eau et les atomes, tout ça pour qu’au final, j’atterrisse contre toi, de nouveau en pleurs. Je n’aurai jamais pensé pouvoir pleurer autant - ou alors je n’en ai pas conscience. Mais repenser à Victoria ne me provoque que cette réaction. Je n’ai visiblement jamais pu faire mon deuil correctement. J’ai beaucoup de mal à laisser partir les gens. Je devrai me raccrocher à nos bons moments, nos souvenirs si joyeux et si drôles mais ils sont tous teintés de cette ombre noire au tableau. Je ne peux que me dire que nous n'avons pas assez profité, que nous devrions toujours être amies encore aujourd’hui, qu’elle serait la première à t’adorer autant que je t’aime moi. Victoria se faisait tellement l’office de Cupidon, à me faire croire que l’amour existe quelque part même pour moi. J’espère que de là-haut, elle est fière de moi. Je n’en suis pas certaine, ceci dit, vu que je t’ai blessé. « I know… » tu m’embrasses le front et je suis tellement ravie que tu sois si grand. Tu me donnes l’impression de pouvoir me camoufler toute entière du monde entier et c’est littéralement le seul cocon auquel j’aspire là.

« Feels good to cry… » je n’en suis pas sûre. Je n’ai jamais aimé pleurer, encore moins autant. Les yeux sont gonflés, le coeur est lourd, les pensées négatives s’enchaînent, l’énergie s’épuise… Non, je ne trouve pas ça très bon pour l’instant. Peut-être qu’après m’être écroulée de fatigue, je verrai les choses différemment. Je suis déjà très soulagée de m’être confiée de la sorte. Comme un coffre fermé depuis longtemps venant de s’ouvrir brutalement. « You could even cry me a river pour reprendre les mots sains de Justin Timberlake. » je lève mes yeux vers toi et c’est ton léger sourire qu’ils croisent. Je le caresse du bout des doigts avant que tu n’embrasses ma joue, mes doigts restant sur ta mâchoire. « J’aime beaucoup son prénom. Victoria. » je souffle un peu en passant ma main dans mes cheveux. “Avec son accent, c’était encore plus mignon.” il n’y avait rien que Victoria pouvait dire ou faire qui était une erreur à mes yeux. Elle était incroyable. “Elle m’avait dit que les rapports sexuels avec une personne que l’on aime étaient différents. Elle disait que c’était comme “le feu d’artifice”. J’y ai pas cru à l’époque alors que je sortais avec Dan…” c’est une bien triste vérité. Si tu veux un élément de comparaison, tu l’as juste ici. Dan refusait d’accepter ou de voir l’évolution de notre relation alors nous stagnions ; toi et moi, c’est tellement l’opposé. Ma main caresse ta joue alors que j’accroche nos regards. “Mais maintenant, je comprends exactement ce qu’elle voulait dire. Que ce soit ça ou le reste.” le reste étant être amoureux, que ce soit réciproque, la vie de couple. C’est un message que je te donne clair et limpide, le coeur gros mais tellement reconnaissant. Partager son coeur, avoir l’impression de quelqu’un qui peut comprendre sans parler, qui peut sentir sans voir, ça n’existait que pour les autres. Et puis t’es arrivé et tout a changé, pour le meilleur. Même si le pire est arrivé car je t’ai blessé. Je continue à te scruter avant de demander, si doucement, si fragilement ; “pourquoi je t’ai blessé ?” est-ce que c’est vraiment le meilleur moment ? Non, car je sais que ça va me morfondre encore plus mais oui, car je ne suis plus à ça près. Je préfère savoir pour ne pas répéter, pour faire mieux, pour être à la hauteur. Je ne veux pas te blesser. Ce n’est pas le contrat officieux entre nous. Le pire est que j’ai l’impression d’avoir déjà fait cette promesse des semaines auparavant. A chaque fois que j’ai merdé, en somme.

“Je dis seulement la réalité.” Elle insiste et tu devrais certainement viser les lèvres au lieu de son visage tout simplement, afin qu’elle arrête de chercher à te flatter. Ça se voit sur ton visage que t’apprécies. T’es chou. Elle mêle une de ses mains à une des tiennes et tu ne peux pas t’empêcher de caresser sa peau de ton pouce machinalement.

Ta boutade sur cry me a river aura réussi à lui extraire un sourire et t’es dans la fierté de cet accomplissement. Birdie a l’air toujours aussi mal au creux de tes bras, l’impression qu’elle pourrait pleurer encore pendant le reste de la journée. Tu espères qu’après elle s’en sentira mieux. Sa main sur ton visage, tu baisses les yeux vers elle. I wish I could just cast a spell and take all your sadness away… “Avec son accent, c’était encore plus mignon.” Tu souris doucement alors qu’elle te partage un peu plus à propos de Victoria. “Elle m’avait dit que les rapports sexuels avec une personne que l’on aime étaient différents. Elle disait que c’était comme “le feu d’artifice”. J’y ai pas cru à l’époque alors que je sortais avec Dan…” Elle continue de parler, de partager, tu tournes un peu ton visage afin de pouvoir embrasser la paume de Birdie. Un geste pour apaiser son âme un peu plus et qu’elle continue de raconter encore plus. L’impression que ce genre de fenêtre sur les tréfonds de son âme, de ses souvenirs, de son histoire est très rare. “Mais maintenant, je comprends exactement ce qu’elle voulait dire. Que ce soit ça ou le reste.” Tu n’es pas sûr de ce dont elle fait mention à propos du reste mais tu comprends de manière globale ce qu’elle a voulu dire. Vous vous aimez, Dan et elle ne s’aimaient pas. Ou pas de la même manière, car il devait y avoir de l’affection, ou de l’attirance malgré tout. Tu vas déposer un long baiser sur ses lèvres avec tout l’amour dont tu peux lui passer via ce biais. I love you. Car elle arrête pas de dire qu’elle t’aime, car elle s’ouvre à toi, tu es vraiment dans ta fierté de la voir aller plus loin dans ses retranchements. Arrêter d’être l’huitre qu’elle sait être depuis le début à gratter des infos sur toi mais à ne rien donner sur elle.

Vos yeux les yeux un dans les autres, tu l’as toujours dans tes bras comme si tu portais un nourrisson. Tu la berces presque même. “pourquoi je t’ai blessé ?” Ton visage qui montre ton incompréhension face à cette question. « Tu te rappelles pas ce que t’as dit ? » Car pour toi, y’a pas de questionnement à avoir sur le sujet. C’était clair et limpide mais… oui, il y a un mais. Elle était en train de vriller et peut être que réellement elle ne se souvient pas de la rage qu’elle a laissé filer entre ses lèvres. « You made me feel like I was stupid… »  Ça c’est vraiment un truc qui te retourne toujours. Vous avez juste pas la même façon de voir les choses, ça ne fait pas de toi quelqu’un de stupide. Il y a d’autres façon de parler aux gens. « … and you used my own issues to hurt me. » It worked perfectly. Ça pique encore beaucoup d’y repenser. Tu ne dis pas plus car tu sais qu’elle a parlé sans réfléchir. La colère avait pris le dessus. Mais quand même, tu te demandes si elle comprend un tant soit peu que comme elle qui vrille pour un post instagram, toi tu es parano et très anxieux quand y’a des choses hors de ton contrôle. Vous êtes pareil dans vos absurdités mais y’a les trauma derrière qui rendent tout ça bien plus effrayant. « 'Cause I got issues but you got 'em too… »  Yep, t’es en train de chantonner doucement ces paroles car elles sont parfaites. « So give 'em all to me and I'll give mine to you… » Même si elle les utilise contre toi. Cos you’re fucked up Jordan, mais surtout tu peux rien faire à ce propos à présent. Elle sait certains de tes problèmes et peut les utiliser à ton encontre. Le reste est une question de confiance, ou de stabilité. Sûrement un peu des deux. « Bask in the glory of all our problems… 'Cause we got the kind of love it takes to solve ‘em… »  Tu l’espères en tout cas. « Yeah, I got issues... And one of them is how bad I need ya. » Sûrement pour ça que tu trouves toujours des excuses à tout ses comportements. Yup… Tu restes convaincu que c’est ses trauma qui parlent plus qu’elle. Elle est prisonnière de ses démons et tu ne comptes pas la laisser seule avec eux. Nope.

Parler de Victoria est étrange. C’est plaisant mais c’est terriblement douloureux aussi. Un mixte de ressentis qui vont cependant bien avec la ligne de conduite que tu as depuis de trop longues minutes à ton goût. Tu ne te rends pas forcément compte du bien être du moment, ou plutôt de ton action. Du sentiment fier que Jordan peut ressentir car tu t’ouvres un peu, tu daignes enfin à parler de toi sérieusement. Oh bien sûr, ton partenaire a pu voir des brides de toi que l’humanité entière ignore car tu es douée à ce point. Mais il est clair que tu ne parles ni de Dan ni de Victoria tous les jours. Et certainement pas à n’importe qui - à personne, à vrai dire. Ce n’est pas pour rien que tu es complètement submergée par l’instant que t’es en train de vivre et de ressentir. Tous ces sentiments en pagaille qui n’en finissent pas de te faire recroqueviller, chouiner, larmoyer. Tu te rappelles exactement pourquoi est-ce que tu n’aimes pas en parler ; tu as horreur de te sentir aussi faible, aussi impuissante, aussi vulnérable. Tu refuses toute pitiée potentielle, toi qui n’as toujours voulu que les autres se sentent bien quitte à faire passer tes problèmes derrière. Chose qui serait difficilement croyable quand on voit les scandales que tu provoques ; mais non seulement ceux-là sont insignifiants mais surtout, ils cachent des choses bien plus profondes que tu préfères totalement occulter.

Mais quand Jordan vient t’embrasser, c’est comme si iel te souffle un peu de sa respiration et t’offre ses poumons pour un air nouveau. Ta confiance en lui est forte, elle est énorme et tu sens que c’est encore plus grand maintenant. Tu es irrémédiablement foutue pour ton partenaire et c’est exactement pour cela qu’iel est dangereux à tes yeux. Même si iel est aussi la plus belle chose qui tu ais dans ta vie en ce moment. « Tu te rappelles pas ce que t’as dit ? » c’est avec désolation qui se lit sur ton visage déformé par la tristesse que tu secoues la tête à la négation. Comme une coque vide à l’intérieur alors que tu ne remets pas les mots sortis de tes lèvres ; seulement la colère que t’as ressenti. « You made me feel like I was stupid… » l’eau est à bonne température mais tu as l’impression de te refroidir un peu - d’où sortent les frissons, autrement ? « … and you used my own issues to hurt me. » tu baisses la tête et tu vois les couleurs de l’eau de très près tellement que ton nez est proche de la surface. Tu aimerais te cacher mais tu t’es bien doutée que c’est parce que tu as été désagréable avec lui que Jordan a fui tantôt. Non, tu n’as pas été seulement désagréable ; t’as été carrément méchante. Oui, tu étais blessée et déçue mais cela ne justifie pas ce que tu lui as dit. Ton coeur se serre à l’idée - qui est loin de l’être, qui est la réalité la plus simple du moment. « 'Cause I got issues but you got 'em too… » évidemment que Jordan va trouver une chanson à émettre et t’aurais presque pu sourire en reconnaissant celle qu’iel a choisi. « So give 'em all to me and I'll give mine to you… » tu passes ton doigt sur ta cuisse avec application, gardant la tête toujours baissée. « Bask in the glory of all our problems… 'Cause we got the kind of love it takes to solve ‘em… » et tu te mets naturellement à pleurer silencieusement parce que ça commence à faire beaucoup pour toi et que tu ne sais même pas quoi dire. « Yeah, I got issues... And one of them is how bad I need ya. » enfin, tes paupières se redressent vers Jordan alors que ton coeur est sur le point de défaillir. Tu te rappelles de lui avoir dit que la vie n’était pas une comédie musicale mais là, tu aurais bien aimé qu’iel continue à fredonner.

Même si tu ne lui en laisses pas le temps car à travers tes petites larmes, tu te penches pour l’embrasser, les bras autour de son cou. Tu ne sais pas quoi dire - encore désolée ? Le mal est fait, Jordan sait que tu ne le pensais pas, et tu sais que même si tu dis que tu ne recommenceras pas, rien n’est jamais moins sûr. Tu as l’impression que promettre à voix haute n’a aucune valeur, que ce ne sont que des paroles en l’air. Contrairement à ton buste contre le sien, à ton corps à moitié relevé pour l’embrasser avec une vigueur toute nouvelle, toute précaire, toute fragile. I love you so fucking much, I’m so sorry, please don’t hold it against me. I’ll better do better, I promise. Des mots que tu n’arriveras pas à dire mais que tu essaies de transmettre par ta bouche contre la sienne, par ta langue allant chercher sa jumelle, par tes mains de chaque côté de son visage. Tu le lâches juste une fraction de seconde pour réguler ta respiration sifflante, le visage toujours larmoyant et les lippes rougies. “I need you too.” in this life and the others. Et tu récupères ses lèvres car ça te semble être bien plus facile et parlant que tous les mots que tu pourras dire.