L’enchaînement des évènements n’ont finalement pas été tant le coup de massue que tu aurais pensé vivre. Tu n’es plus avec Daisy, tu es enceinte et celui qui te rend dingue à chaque fois que tu le croises, c’est le même type qui est assis sur un de des tabourets de ta soeur à grignoter un petit déjeuner de fortune dont il semble très bien s’accomoder. Ta main est toujours sur sa cuisse et la question posée attend une réponse que tu trépignes d’avoir. Ne serait-ce que pour visualiser un peu mieux quel genre de personnage il est, son type de personnalité, ce genre de choses. L’argent nourrit les âmes, c’est bien connu ; même si la question du loto n’est toujours que théorique, alors que tu soupçonnes la pratique d’être parfois différente et très éloignée. Il suffit de voir trop de billets s’afficher et c’est la fin du bon sens - même si ça, c’est à débattre car tu es la preuve vivante que l’argent ne fait pas totalement le bon sens non plus.

« Ça dépend combien. Si c’est vraiment beaucoup, j’achète des maisons à tous mes amis qui m’ont hébergé bien trop souvent… Et je m’achète une immense maison pour moi avec plein de chambre pour accueillir mes potes s’ils ont besoin. » tu souris avec attendrissement parce que c’est hyper généreux de faire ça. Jordan t’a dit tantôt qu’il créchait de canapé en canapé, une information que tu as pu aisément retenir puisque tu fais la même chose. Là, tu squattes chez ta sœur mais qu’en sera-t-il demain ? Non, tu es enceinte ; tu ne peux pas te la jouer égoïste et personnelle. Tu ne peux pas non plus te mettre dans de sales draps. Pourtant, tu pourrais largement t’en défaire car t’es loin de faire encore la taille d’une baudruche. En tout cas, tu aimes bien son idée. « Et puis après je sais pas… Le talent ça s’achète pas donc j’essayerai de continuer à faire mon bout de chemin dans la musique avec mon groupe… » tu passes ta langue sur tes lèvres en récupérant ta main en hochant la tête. “Tu pourrais louer de meilleures salles ou acheter du meilleur matos, non ?” ça t’étonne qu’il n’y pense pas, à ça.

« Tu ferais quoi toi ? Avec plein de fric du jour au lendemain ? » ta réponse automatique ; “Je le donne à des associations. L’argent ne me sert pas à grand-chose." tu as des besoins simples et tu refuses toute forme de consommation de société, même si tu as, comme tout le monde, un ordinateur, un téléphone et tout ce qui va avec. Cependant, tu as un moment d’arrêt, la main en suspension avant de la fourrer dans ton léger kimono, tes yeux se baissant vers ton ventre. “Même si…” tu secoues la tête ; tu ne comptes pas le garder. “Non, ouais, les associations.” que tu dis en relevant la tête vers lui. Ton dos se colle à la bordure de la table derrière toi et tu penches ta tête sur le côté en le scrutant. “T’as un peu de…” tu sors une de tes mains pour aller passer ton pouce sur la commissure de sa lèvre inférieure où réside un peu de nutella. Le pouce qui reste un peu trop longtemps, Birdie. “You look good in this.” que tu dis en souriant légèrement, mais le pensant sérieusement. Même si ta tenue préférée reste nue. Evidemment.

« Yeah I would buy studio time. » oui, ou ça. Tu n’as pas connaissance très claire de ce qu’il faut pour le succès d’un groupe, à part des membres et un minimum de talent. Mais si Jordan le dit, tu ne peux qu’approuver car lui est très bien placé pour savoir. « I’d buy a studio just for me and my band. » ça, c’est ce que tu avais compris. Tu ne vois pas pourquoi il paierait pour d’autres. A part pour montrer une certaine gratitude. Tu hasardes. Tu n’y connais rien. La seule chose que tu sais, c’est que Jordan chante bien. Et qu’il sait aussi très bien te faire chanter. Comme un instrument. L’image te fait sourire sans même vraiment t’en rendre compte.

« Vraiment? » le grand blond a l’air surpris et tu hausse les épaules en hochant la tête. “Ouais, vraiment. Bon, j’en donnerai peut-être aussi à mes proches mais sinon…” tu pourrais te payer un appartement, oui. Tu pourrais ne plus avoir à travailler, aussi. Mais la vérité est que tu t’emmerderai si tu n’avais plus à travailler. Si tu pouvais être libre de faire ce que tu veux. Tes jobs ne sont pas si chiants que ça, ce sont les contraintes allant avec qui le sont. “Je préfère donner tout ça à des gens qui en ont besoin plutôt qu’à des banques.” une vision tranchée des choses, le symbole même de ton aversion envers la société de masse. Tu ne l’as jamais caché. Tu n’es pas une enfant de la consommation de masse, c’est clair. Y’a qu’à voir tes fringues ; chinées, retapées, recrées par toi-même. Hors de question d’aller dans ces boutiques de merde pour ressembler à tout le monde dans des couleurs horriblement ternes, sachant qu’en plus des gens voire même des enfants sont sous exploités pour ces conneries. Tu as des principes. Tu ne soules personnes avec mais tu tiens tes positions.

« J’ai vraiment quelque chose sur la bouche ou tu voulais juste te rapprocher de mes lèvres ? » dans le réflexe le plus idiot, tu passes ta propre langue sur ta lèvre avant de la mordiller tout en souriant légèrement. “Both ?” que tu demandes comme une question ; il avait vraiment une tâche mais s’il veut croire à une tentative de rapprochement… Il n’a peut-être pas tort non plus. Il faut dire que t’es déjà bien proche depuis tout à l’heure. « You really don’t need money? » ta main dans la sienne ne bouge pas antant que tes opales claires sur son visage. « Si tu en as trop tu peux me le donner. » tu ricanes chaleureusement dans un mouvement adorable d’épaules et de tête. “Si on est amis au moment où ça arrive, ça peut être envisageable.” parce que vous n’êtes pas amis, là ? C’est compliqué. C’est un plan cul. Qui t’a foutu en embryon dans ton ventre. Tu ne sais pas trop quelle entité ça donne. Est-ce que tu le considères comme un ami ? Pas vraiment. Même si vous discutez déjà depuis un petit moment, il n’empêche que vous semblez marcher sur des oeufs. Vous y allez sans totalement oser. C’est compliqué. “Tout le monde a besoin d’argent, malheureusement. C’est comme ça que ça fonctionne. Mais je choisis de ne pas en avoir besoin. Pas autant, en tout cas. Je dis pas que je garderai pas un petit fond, pour me louer une chambre quelque part. Mais je suis seule, j’ai pas forcément de projets à venir, je cherche pas à avoir mon propre chez moi… Qu’est-ce que je pourrai foutre de tout ça ? Autant le donner à des gens à qui ça pourra servir.” un petit don anonyme de six chiffres. Tu es altruiste comme ça. C’est ton éducation qui veut ça. C’est naturel pour toi.

Ta main dans la sienne semble si naturelle et pourtant, il ne faudrait pas. Mais au point où vous en êtes, ce n’est pas le pire qui puisse vous arriver à ce stade. Vous avez déjà atteint le point de non retour. C’est déjà un miracle que vous vous voyez toujours. Même pour faire des rondes de sexe passionnés dans chaque recoin de l’appartement de ta soeur. La grossesse ne diminue en rien ta libido ; t’as même plutôt l’impression que c’est l’inverse. Peut-être que ton corps compense le manque d’affection par le sexe, les rapports charnels. Et c’est Jordan que tu vois constamment - c’est son gosse, certes, mais c’est aussi l’amant qui te comble le mieux. Like we were made for each other. Deux blocs, deux morceaux d’un même puzzle qui s’associent avec une facilité incroyable. Quiconque rentrerait là pourrait croire que vous êtes plus que des partenaires sexuels. A vous dévorer des yeux, à chercher la proximité de l’autre, à vous caresser doucement. Sans même chercher plus loin, mais juste à profiter de la présence de l’autre.

« D’you think we can be friends one day? » une question dont tu ne t’attendais pas. Ton visage est marqué par la surprise alors que vos mains se lient encore plus sans même que vous vous en rendez compte. L’entité de ce que vous êtes est toujours floue et confuse. Tu as vu ta relation avec Daisy se finir pour ce grand blond sortir de nulle part. « Have you made up your mind…? For the baby. » t’as un léger rire, un peu nerveux, qui te secoue jusqu’aux épaules. “So many serious questions suddenly.” comme si tu portais le destin de votre relation, quelle qu’elle soit, sur tes épaules - dans ton ventre, en l'occurrence. “Je pense que oui, on pourrait si on le veut. On commence presque à l’être, non ?” parce que vous parlez, vous discutez entre deux ébats, que tu connais des brides de ta vie comme il en connait un peu de la tienne. Rome ne s’est pas faite en un jour. “Why, do you think we can’t ?” que tu lui retournes à la négation car tu entends un certain sceptisme. Sûrement l’enfant, ça. Une faute qui n’est pas encore visible de l’extérieur mais que tu le ressens très bien de l’intérieur.

Et en parlant du bébé… Tes prunelles descendent sur ton ventre camouflé en déglutissant légèrement. “I’m not sure I’m gonna keep it.” pourquoi la supposition ? Pourquoi l’incertitude ? Tiens tes propos. “I’m not in a situation to have a baby.” tu vis chez ta soeur, tu ne sais déjà pas comment tu vas vivre tes neuf mois de grossesse - il y a des chances que tu finisses à Elimbah quoiqu’il arrive. “I think it deserves better than... All of these.” et quand tu dis that, tu englobes ta personne, ton lien avec Jordan, ton manque d’habitation, ton travail qui ne va sûrement pas durer. Sans compter que tu n’es pas dans l’esprit toi-même d’avoir envie d’une charge pareille maintenant. “J’ai neuf mois pour me décider, de toute façon.” un rappel que ça va être long, que tu vas avoir toute la galère sur tes épaules et que t’as plus qu’à subir maintenant que t’y es.

Jordan ne répond pas à l’interrogation que tu lui retournes ; de toute façon, tu réponds à sa deuxième mais tu notes dans un coin de ta tête que tu aimerais avoir sa liste de raisons qui pourraient faire que vous ne pourriez pas être amis. Au moins des gens qui se tolèrent, non ? T’en sais rien ; au final vous ne passez pas non plus beaucoup de temps à discuter donc vos visions des choses peuvent être différentes. Ce n’est pas forcément une bonne chose mais ce n’est pas non plus la pire. Vous êtes deux êtres humains différents, c’est normal que vous n’ayez pas les mêmes idées. Même si tu n’aimes pas ton air fuyant qui se prend d’admiration pour son assiette.

Il a l’air cependant d’accord avec toi en ce qui concerne l’embryon dans ton ventre - non pas que tu attends son aval, il a été clair qu’il ne veut pas être impliqué et tu as été claire dans l’autre sens à dire que tu ne t’attendais pas à ce qu’il le soit. Tu as un peu moins de neuf mois maintenant mais tu as encore le temps de voir les choses venir. Ou pas, car neuf mois, ça peut passer vite - oui, si on considère que les semaines passées ont déjà été particulièrement longues à certains moments. « I don’t think we can be friends if you keep it… » tes épaules s’affaissent, la douche froide est totale et puissante. Tu le regardes complètement éberluée. “Tu… Tu savais que j’allais mener cette grossesse à terme.” sur ça aussi, tu as été précise. Tu ne veux pas couper une fleur qui germe. Il n’a jamais été question de s’en débarrasser. Ta mâchoire se crispe alors que ton buste se raidit. “Pourquoi me dire ça à part pour enfoncer le couteau ? T’es déjà pas assez satisfait de m’avoir foutu en cloque, faut aussi que tu me sortes des conneries pareilles ?” tu arraches ta main de la sienne tout en t’éloignant de lui. Quel bouffon. Jordan sait depuis le début. Elle est où, la surprise, hein ? “C’est pas possible…” que tu dis plus pour toi même en passant tes mains contre la racine de tes cheveux alors que tu commences à marcher dans le salon. “C’est quoi cette réflexion de merde ? T’as foutu un putain d’être humain dans mon ventre et tout ce que t’as à dire c’est qu’on peut pas être amis si je le garde ? Comme si je te l’avais caché alors que j’ai été claire dès le début!” tu commences à tempêter, et à juste titre. “Je t’ai dit que j’attendais rien de toi! Ton amitié, tu peux te la foutre là je pense. Mais la prochaine fois que tes potes m’appellent en plein de la nuit pour t’amener à moitié ivre mort, compte pas sur moi pour répondre. Parce qu’après tout, on est pas amis, on est même pas potes, on est rien!” t’as essayé d’être gentille, tu t’es montrée plutôt docile et coopérante. Tu as compris que la situation méritait de ne pas s’emballer mais il ne faut pas non plus te prendre pour une idiote. Tu as été assez maltraité par Daisy, tu ne vas pas laisser un donneur de spermes te faire ce genre de réflexions stupides. Aussi doué soit-il pour te faire atteindre tous les ciels qui puissent exister en haut.

Tu es complètement outrée - pour de vrai cette fois-ci. « Yeah that I know. » il sait, il sait, il sait, alors pourquoi il joue les surpris. Comme si c’est une pochette cadeau alors que tu as été claire avec lui dès le début. Tu as été bien idiote. Tu ne sais pas trop à quoi tu t’attendais - pas grand chose, à vrai dire, t’évites de t’accrocher aux gens pour ce genre d’histoires - mais certainement pas à ça. Jordan rejoint le palmarès des déceptions, tu n’es plus vraiment à ça près. « I didn’t mean it in this way… » tu masses ta nuque et tu grimaces, t’en as aussi marre de ces hormones, de ces sauts d’humeur, de l’univers qui continue à te chier dessus perpétuellement et aussi de Jordan qui là, veut éclaircir quelque chose parce qu’il n’a pas été foutu de la faire cinq minutes avant. « We can’t be friends if you want to raise the kid. I can’t be a friend who is also the father of your child. I can’t do that… » tu as une poker face absolument incroyable à ce moment-là.

“Oh, you can’t do that. Poor little thing, afraid of a fucking child.” okay, tu vas reprendre ta respiration et faire tout ce qu’il faut car tu es en plein craquage de nerfs, là. Tu pinces l’arête de ton nez en soupirant. “Je pense pas le garder de toute façon. Pas comme ça. Je viens de te le dire. Je comprends en quelle langue je dois te parler. J’en connais pas d’autres, de toute façon.” de toute façon, c’est très simple ; tu n’as pas envie d’être mère dans de telles conditions si ça devait arriver un jour. C’est hors de question. Tu vaux mieux que ça et ton futur gosse aussi. “Il mérite une famille qui va subvenir à ses besoins. Pas un père qui va totalement le rejeter et une mère qui sera pas foutue de garder un toit stable sur sa tête.” outch, mais c’est la vérité, non ? Tu ne peux pas le nier et lui non plus. “On a rien de parents, on est même pas ensemble. Qu’est-ce que tu veux faire avec ça, hein ? Je suis pas stupide non plus. J’ai capté que t’en voulais pas, c’est pas la peine de me le répéter mille et une fois.” toi, tu choisis de subir la grossesse parce que tu tiens à honorer le cycle de la vie - sans arrières pensées religieuses ou quoique ce soit. Si Jordan veut rôder au-dessus de ta tête en faisant mine de ne pas vouloir s’intéresser, mais de le faire quand même tout en te soulignant une énième fois à quel point il rejette absolument tout à propos de cette situation, tu n’as vraiment pas besoin de ça.

« C’est pas ce que t’as dit. » t’as envie de lui hurler que t’as appris ta grossesse il n’y a encore pas si longtemps. Lui rappeler que c’est encore relativement frais à tes yeux, que tu es bien plus chamboulée que lui. Qu’il peut aller se faire foutre, lui et ses propos de merde lui rappelant qu’elle n’est qu’une partie de jambe en l’air qui a mal tourné, qu’il ne veut pas être impliqué dans aucune manière. Oui, tu ne veux pas forcément le garder garder ce gosse mais si tu finis par le vouloir ? Tant pis pour Jordan, ce n’est pas comme si vous étes quelque chose de toute façon. Tu as bien compris que tu n’étais qu’un passe temps, autant qu’il l’est pour toi. Voilà, c’est juste ça, votre entité. Un passe-temps. Chez qui on débarque en plein milieu de la nuit après avoir trop picolé. Parce qu’il a parlé de toi à ses amis. Sûrement pour railler qu’il a réussi à foutre une meuf en cloque. Tes pensées dépassent l’entendement mais elles restent sous ce format là ; ça ne sert à rien de t’époumoner pour rien. Pour le peu que tu connaisses Jordan, il n’entend que ce qu’il veut. Alors qu’il aille chier. Tu ne lui as rien demandé.

« Dès que mes fringues seront secs, je te laisserai tranquille. » “Whatever.” que tu finis par dire en t’affalant dans le canapé avant de prendre ton ordinateur. Qu’il fasse ce qu’il veut, tu t’en fous. Alors pourquoi ça fait un peu mal ? Parce qu’il ne semble te voir que comme une poule pondeuse de son môme, voilà pourquoi. Ce n’est peut-être pas vrai mais c’est ta vérité à toi. Tu te penches de nouveau pour attraper tes lunettes sur la table basse. Tu te réinstalles contre les oreillers, ordinateur ouvert sur tes cuisses. Au moins, tu fais confiance à Jordan pour ne pas te retourner l’appartement le temps que la machine se finisse. L’ignorance est la meilleure des armes. Mais t’as besoin d’évacuer. Naturellement, tu te mets à taper furieusement contre le clavier. Qu’il parte, qu’il déguerpisse. Tu n’es pas assez conne ni méchante pour le foutre à la porte alors qu’il a pas de fringues. Mais tes ondes ne sont plus aussi avenantes. Sans déconner, personne ne s’en était rendu compte.

Tes doigts filent sur le clavier alors que tu n’es même pas sûre de la cohérence de tes phrases. Si ce sont les bons mots placés au bon endroit ou non. Tu as encore le palpitant qui trépigne. Tu n’as jamais aimé le conflit. Tu navigues entre l’envie del’embrouiller un peu plus et celle de te recroqueviller pour pleurer un bon coup. Tu as ce sentiment horrible de n’être qu’un nid à problèmes alors que tu n’es que la messagère de l’alien qui grandit en toi. Tu n’es que son passage pour arriver sur terre. Tu mérites plus de considération à ton sens. Vous êtes capables de créer la vie ; est-ce que lui peut en dire autant ? Non. Mais tu n’iras ni pleurer ni crier. Pas pour l’instant, en tout cas. Tu ignores où est Jordan et tu persistes à penser que t’en fiches. Toi qui voulais juste un orgasme de plus, te voilà à haïr sa présence. Aussi éphémère soit-elle. Tu entends ses pas nus se diriger vers la cuisine puis le robinet qui s’allume. Tu soupires légèrement devant ton écran, fermant les yeux, remontant tes lunettes sur ton nez. Tu es perturbée par sa présence malgré tout. T’aurais envie d’un baiser et d’une étreinte.

Mais plutôt mourir que de brandir le drapeau blanc. Si lui ne te respecte pas, tu le feras pour deux. Tu ne vas pas te laisser marcher sur les pieds ; tu penses avoir été relativement gentille et conciliante jusqu’à maintenant. L’eau qui coule te déconcentre et te voilà avec la nuque contre le dossier du canapé alors que tu attends qu’il finisse ce qu’il fout. La vaisselle ? Que grand bien lui fasse. Qu’il serve au moins à quelque chose d’utile. Le robinet se fait silencieux de nouveau, tu le regardes du coin de l’oeil se diriger vers la salle de bain. Tu relis tes lignes. Tu les effaces. Tu recommences. Ce n’est pas l’histoire de lui et toi. C’est juste toi. C’est ton histoire et tu ne vas pas lui laisser l’opportunité d’empiéter dessus. Quand il revient, il est habillé. Tu n’es pas sûre que ce soit sec mais t’en as toujours rien à foutre. La porte qui se ferme derrière lui te procure un ascenseur émotionnel intense. L’impression que toute la pression que tu as cumulé s’envole. Ton corps tout entier s’affaisse. Tu respires un peu mieux. Ou pas ? En tout cas, c’est avec trois larmes traîtresses qui perlent que tu rajoutes des lignes à ton texte. T’as besoin d’évacuer.