Vous êtes en voiture, direction Elimbah. Elle est venue te chercher chez ta psy, Birdie. Cette session ci, tu as eu le temps d’y aller en personne et pour le gros morceau que c’était, c’était une bonne chose. Ton diagnostique. Elle t’a dit le mot, ou plutôt, l’acronyme. «  CPTSD. » Ca paie pas de mine comme ça, mais de ce qu’elle t’a dit ensuite et de ce que tu es en train de lire sur l’écran de ton téléphone après une recherche google, ça fait du sens. Yep.

Le timing avec votre séjour à Elimbah ne pouvait pas mieux tomber. Tu as besoin d’un break de cet appartement qui est une bénédiction autant qu’une malédiction pour toi. Tu supportes de moins en moins le non espace que tu as. Aujourd’hui, ce moment là, il te faut un bon endroit pour ta tête autant que ton corps. Tu es tout silencieux dans la voiture parce que t’es encore en train de traiter l’information du CPTSD. Tu n’as pas mis de musique et si Bird non plus, le silence de l’habitacle est clairement trop fort. Tu sors de tes pensées à cause d’un coup de klaxon (peut être celui de Birdie, tu n’es pas très présent là). « J’ai eu le diagnostique. » Que tu dis enfin. C’est facile à dire Jordan. Tu t’es mis ça dans la tête depuis la session précédente. Tu t’es préparé à le lui dire à Birdie. A t’ouvrir un peu plus. Sauf que c’est pas si simple au final. « CPTSD. Complex Post Traumatic Stress Disorder. » Que tu dis machinalement sans réfléchir. Car tu t’es mis en tête que c’était facile de le dire alors tu le déroules comme ça. Une suite de mot qui ne dit pas tant sur toi à première vue et pourtant… Tu sais que c’est bien tout l’inverse une fois qu’elle se sera familiariser avec. Est-ce que c’est toi qui va lui en parler ? Est-ce qu’elle va faire ses recherches? Est-ce que tu vas savoir comment expliquer ? Est-ce que c’est le bon moment d’en parler ? Oui ça l’est certainement car elle a bien vu comme tu es dans ta bulle depuis que vous avez pris la route. « Je connaissais pas. » Tu dis, encore plutôt sous le coup de la nouvelle et surtout de tout ce qui en découle. C’est juste un acronyme. C’est pas grand chose à dire. Oui, tu te le répètes en boucle. Perturbé autant que soulagé de le lui avoir dit, quoi qu’il en soit.

@Birdie Cadburry

Direction Elimbah. Vous en avez bien besoin. Ca te soûle de ne pas trouver votre bonheur sur le sujet du logement. Plus le temps passe, plus tu as l’impression qu’il n’y a rien pour vous. Est-ce que c’est encore un signe ou une connerie comme ça ? T’en sais rien mais en tout cas, ça te gonfle fort. Tu veux ton chez toi, tu veux ton jardin, les meubles que tu auras choisis. Et Jordan, oui oui, bien sûr. Est-ce que c’est la perspective de savoir que vous êtes dans un logement de transition, que vous n’avez pas vraiment le choix, que tu vas avoir ta maison qui te rend aussi impatiente ? Il y a des choses. L’agent qui vous suit doit sûrement vous détester. Vous lui avez demandé de vous envoyer des photos car faire quatre visites pour rien, ça commence à être pesant pour le moral. Et pas de maison banale, témoin, sans charme, sur un seul étage. Ni collée aux voisins. Clairement, il doit vous détester.

T’attends patiemment Jordan près de Van Gogh. Tu l’y as amené et t’as fait le tour du quartier pour que le temps passe plus vite avant de retourner dans ton véhicule pour les dernières minutes. T’as mis un peu de musique, tes doigts tapotant sur le volant alors que tes prunelles naviguent sur ce qu’il se passe en face de toi. La musique ne bouge pas, elle reste en fond même quand Jordan arrive. Même quand vous quittez la ville. Iel n’a pas dit un mot et t’en as pas dit un autre non plus. C’est rare que tu sois aussi silencieuse mais ce n’est pas si gênant. Tes pensées bourdonnent et si t’avais été chez vous, t’aurais sûrement écrit dans un de tes carnets. Tu risques de le faire en arrivant à Elimbah.

“Espèce de connard!” C’est un klaxon qui brise le silence ainsi que tes insultes car c’est un pauvre con qui vient de vous doubler. Tu n’aimes pas te faire doubler, c’est comme une confrontation sur ta conduite. Tu secoues la tête en maugréant dans ta barbe. « J’ai eu le diagnostique. » Avant que Jordan ne parle. Tu tournes la tête vers lui. “Oh yeah ?” Tu te demandes s’iel va te le dire. Il y a de grandes chances car ça sera cruel sinon. « CPTSD. Complex Post Traumatic Stress Disorder. » Oulà. Beaucoup de lettres et de mots. Tu plisses le nez dans ta réflexion alors que tu reportes ton attention sur la route. « Je connaissais pas. » “Ca veut dire quoi ?” Il existe tellement de termes en psychologie. Y’en a bien un pour toi aussi mais t’as jamais cherché à approfondir le sujet.

“Espèce de connard!” La douce voix de ta moitié qui résonne à la suite du klaxonne. Ca a le don de te sortir de ta zone. Tu reviens dans le présent. Tu as ton téléphone toujours dans tes mains avec la page Wikipédia sur le CPTSD. Tu sais pas pourquoi t’as besoin de relire plusieurs fois. Besoin que ça s’imprime un peu mieux dans ta tête peut être ? Tu réalises doucement un peu plus à chaque fois. “Oh yeah ?” Tu le lui dis sans réfléchir car c’est juste des lettres. C’est pas grand chose. Ca veut rien dire. Même si tu donnes la signification, ça reste plutôt flou tout ça.

“Ca veut dire quoi ?” C’est donc naturellement qu’elle veut comprendre un peu plus. Là par contre, ça devient un peu plus piquant pour toi. « Hmmm. » Tu cherches les mots et puis tu lis ce qui est écrit sur la page wiki qui est sous tes yeux mais non. T’as pas envie de dire ça non plus. Y’a pas de définition simple mais tu as trouvé quelque chose de plutôt parlant plus tôt, tu fais une recherche dans l’historique des pages que tu as visité et tu trouves ce que tu cherches. Tu tortures ta lèvre inférieure car vraiment, c’était effectivement bien plus simple de juste donner le nom. Car là, le reste, devient bien plus réel. Tu n’as jamais parlé de ça à Birdie et tu as oublié les mots de Maggie à l’enterrement. Elle a mentionné à Birdie que son Sullivan n’a pas été que mauvais. Ca a peut être mis la puce à l’oreille de Birdie ? Tu lui as dit quoi toi après ? Quand t’as vrillé suite à son décès ? Tu ne te souviens pas. Tu n’étais pas dans un bon espace mentalement, tu préfères ne pas te souvenir de cette période. Elle a existé. Elle est passé. C’est du passé. Oui.

Tu prends une grande respiration et tu te décides de lire ce qui est sur la page Wikipedia car au final, peut importe ce que tu lis, y’a rien qui fait passer ça plus doucement qu’une autre. C’est donc avec un ton machinale que tu lis à voix haute. « Le trouble de stress post traumatique complexe est un trouble qui peut apparaitre après une exposition à un événement ou à une série d’événements de nature extrêmement menaçante ou terrifiante, le plus souvent prolongés ou à des événements répétitifs dont il est difficile ou impossible de s’échapper. » Tu prends une nouvelle inspiration, une très grande inspiration. Et tu souffles doucement. Tu encaisses un peu plus à chaque fois la réalité de ce terme autant que tu es en train de partager ça avec Birdie. Pas sûr que tu aies le coeur à en dire plus. Ton nez reste baissé vers ton téléphone car il est bien plus aisé de ne pas regarder ton oiseau là. Et puis c’est Hero de Mariah Carey qui commence à la radio. Tu n’écoutais rien mais celle ci tu l’entends dès la première seconde tellement tu la connais. Ce n’est pas une coïncidence pour toi. C’est ta mère, c’est Rosa, c’est ceux qui sont là pour toi sans être là avec toi. Ca te fait énormément de bien. Tu vas même lever le son un petit peu mais tu ne chantes pas, tu écoutes. Tu prends ça comme si c’était elles qui te parlent, parce que c’est exactement ça. C’est totalement incroyable mais c’est bien loin d’être la première fois que Mariah Carey sort de nul part. C’est flippant autant que fascinant. Tu ne t’y habitueras jamais. Ca te réconforte tellement… Tu en avais bien besoin là.

La réponse ne vient pas tout de suite. Est-ce que Jordan a demandé à sa psy ? Tu ne poses pas de questions ni tu le presses. Pour la reine du déni que tu es, tu peux comprendre que ton partenaire ne soit pas pressé.e d’en parler. Tu ne peux que supposer au vu de l’intitulé de ce qu’iel vient te dire. Il y a un trouble quelque part et tu soupçonnes que ça vient de son passé. Bien plus passif que Rosa. Tu as pu en avoir un aperçu l’an dernier suite au décès de son géniteur. Tu te dis que c’est quelque chose de compliqué car jamais, jamais Jordan n’a dit un mot sur ça. Mais tu as bien compris que Sullivan Fisher était plus son géniteur que son père. Il ne t’a pas laissé un souvenir positif la seule fois où tu l’as rencontré, par hasard en plus, avec Penny.

Comme à chaque fois, tu laisses le temps à ton partenaire. Si iel ne débloque pas un mot, alors tu te mettras à parler de la dernière découverte que tu as faite la nuit dernière en regardant une chaîne animalière. « Le trouble de stress post traumatique complexe est un trouble qui peut apparaitre après une exposition à un événement ou à une série d’événements de nature extrêmement menaçante ou terrifiante, le plus souvent prolongés ou à des événements répétitifs dont il est difficile ou impossible de s’échapper. » Mais Jordan s’exprime. Ou plutôt, iel semble lire ce que son téléphone portable lui sort. “Merci Wiki ?” Que tu lui demandes avec un léger sourire - oui, même toi, tu connais Wikipédia, quand même. Mais la définition n’a rien de drôle. Ca confirme juste ton ressenti vis-à-vis de ce que tu as pu comprendre ici et là. Dans les silences et les mal êtres notamment.

Jordan monte un peu le son de la radio. Est-ce que c’est une façon de te dire “je veux pas en parler” ? Tu mords ta joue, ton cerveau se torturant pour savoir quoi dire sans qu’iel se recroqueville dans sa carapace. Tu sais ce que c’est de ne pas vouloir accepter la vérité en face. De se rendre compte qu’il y a un terme pour mettre des mots aux maux. Que le passé de Jordan lui a créé un véritable traumatisme qui persiste dans sa vie de tous les jours. Toi, c’est ‘juste’ ta nature. Tu as l’impression d’être cataloguée, fichée et, pour une fois, tu n’aimes pas te dire que tu n’es pas normale.

Alors tu penses à ton ressenti. Ce qui t’aide assez à demander ; “T’en penses quoi ?” C’est vague, il n’y a pas de piège. Jordan peut ne pas répondre, peut détourner le sujet, peut répondre oui et non. Tu oses alors que c’est tout frais, tout neuf. L’air d’Elimbah va vous faire du bien. Aussi bien individuellement qu’ensemble. Vous vous connectez toujours très bien là-bas. Le lâcher prise a du bon. La nature aussi. La magie d’Elimbah.

Birdie te laisse tout le temps, tout l’espace dont tu as besoin pour lui répondre. Au final tu ne fais que lire ce qui est inscrit sur l’écran de ton téléphone car l’inverse semblait trop compliqué pour toi. “Merci Wiki ?” Tu préfères garder une distance avec le terme. Tu ne veux pas mettre la définition à ta sauce. « Ouais… » C’est tout ce que tu trouves à répondre car tu es totalement premier degré là. C’était bien Wikipédia que tu lisais. Elle s’en est rendu compte aisément.

Tu pars dans les nuages alors que Hero joue à la radio. Un signe d’un soutiens supplémentaire, invisible, mais que tu as tous les jours en plus de celui de Birdie et de tes proches toujours en vie. Tu te laisses immerger dans la chanson et tout ce qu’elle représente. Ca t’apaise, te fait du bien. “T’en penses quoi ?” Et ça te donne l’impression d’avoir la capacité de répondre à cette question toute simple, car c’est ce que tu fais, sans difficulté. « C’est… » Tu rassembles tes mots pour former une phrase qui a du sens. « Je pensais vraiment pas qu’il y avait un terme pour… ça. » Pour ton passé traumatisant oui Jordan. « J’ai lu un peu… Pas juste wikipedia. » Car ça fait un moment que vous roulez et que tu lis. « Je… C’est exactement ça et c’est… Trop… Bizarre. C’est… » Tu as du mal à former tes phrases. « C’est exactement ça. » Tu te répètes car tu ne sais pas quoi dire de plus à ce niveau là. « CPTSD. » Tu répètes. « Je comprends pas pourquoi ma psy m’en a pas parlé plus tôt. » Tu marques une pause. Peut être parce que ça te fait un petit choc quand même Jordan ? Peut être que ce moment là était le bon ? Tu sais pas. Tu as juste mille questions et surtout, tu as envie de lire des témoignages de personnes avec ce même diagnostique. T’as trouvé des podcasts et même des livres en regardant rapidement. Tu regarderas de plus près une fois que vous serez à Elimbah.

« Ouais… » Ta tentative d’alléger un peu le moment n’a pas trop fonctionné. Bon. Tu ne peux pas lui en vouloir. Ce n’est pas rien d’entendre quelqu’un qui vous écoute parler depuis des mois mettre un terme sur ce que vous avez. Ou ce que vous êtes. En avoir connaissance est une chose, l’accepter en est une autre. C’est clairement plus simple quand on le sait le plus tôt possible. Enfin tu penses.

« C’est… » C’est chiant qu’iel t’en parle alors que tu conduis. Tu ne peux pas l’encercler dans tes bras pour lui donner tout le soutien qu’iel semble avoir besoin. Mais quelque chose te dit que Jordan a besoin de se replier sur lui-même. Tu es toujours soucieuse quand iel se renferme sur lui. Ce n’est pas toujours bon signe. « Je pensais vraiment pas qu’il y avait un terme pour… ça. » Ca. Un joli terme pour désigner tout et n’importe quoi. Des traumas ou des comportements excessifs, pas vrai, Birdie ? « J’ai lu un peu… Pas juste wikipedia. » Vous avez roulé tant que ça ? T’en as pas confiance. T’en doutes pas venant de lui. Alors que toi, tu n’as même pas eu le réflexe d’aller chercher sur le net. Ni le courage d’ailleurs. Shut up. « Je… C’est exactement ça et c’est… Trop… Bizarre. C’est… » Voilà, c’est bizarre. Oh que ça te parle, ça. C’est bizarre. Troublant. « C’est exactement ça. » Une étiquette qui est à la fois lourde mais compréhensible ? Tu arrives à comprendre pourquoi Jordan te dit ça. « CPTSD. » “Tellement de lettres…” Toujours des lettres. « Je comprends pas pourquoi ma psy m’en a pas parlé plus tôt. » Tu mords ta joue. C’est clairement une question rhétorique car évidemment que tu n’as pas la réponse. “Peut-être qu’elle ne le connaissait pas non plus avant ?” Après tout, il y a des découvertes tous les jours, non ? Contrairement à toi qui as eu le droit à un terme au bout de même pas un an de consultation. “Tu penses que ça peut t’aider maintenant que tu le sais ?” Tu lui as déjà posé la question avant qu’iel le sache mais tu la reformules malgré tout après. Dans le fond, toutes ces questions attendent des réponses qui vont te faire valider, ou pas, ta propre expérience. Tu as tellement envie qu’iel te dise non cette fois-ci. Que ça ne changera rien… Mais tu peux rêver. Jordan fait quasiment toujours tout pour aller mieux et iel s’en donne les armes et les moyens. Il serait bon que tu continues de t’en inspirer.

“Tellement de lettres…” Tu hoches la tête pour confirmer ses mots. CPTSD. Que tu te répètes comme si ça allait t’aider à prendre un peu plus conscience. Oui, tu sais que c’est comme ça que tu fonctionnes. Tu as besoin de répéter les choses, de les entendre, de les lire sous des formes différentes pour que ça prenne du sens. Des lettres comme ça qui tombent comme un cheveux sur la soupe et qui définisse toute ta personne. Va falloir plus de temps pour bien l’assimiler, c’est certain.

“Peut-être qu’elle ne le connaissait pas non plus avant ?” « Oh. C’est vrai qu’elle a mentionné qu’il y avait pas beaucoup de ressources dessus parce que c’est plutôt récent comme terme… » T’as été tellement sonné, perturbé par la découverte de ces lettres que tu ne te souviens pas de tout ce qu’elle a dit, mais que Birdie souligne ça, ça t’aide à replonger sur certaines choses qu’elle t’a dit pendant la session du jour.

“Tu penses que ça peut t’aider maintenant que tu le sais ?” Très bonne question. Tu as une réponse aussitôt d’ailleurs. « J’espère. » Tu baisses un peu le son de la radio maintenant que Mariah a fini ça te dérange plus qu’autre chose au milieu de cette conversation où tu as besoin de rassembler tes pensées plus que d’habitude. « Plus on a d’information sur soit mieux on sait naviguer… » Tu le lui as déjà dit mais tu ne t’en rends pas compte. C’est juste des mots qui sont la vérité absolue pour toi. Ca fait du sens et ça a toujours été comme ça. « Ca me fait penser quand Maggie m’a parlé de ma mère. De savoir qu’elle était pianiste ça a mis du sens dans ma vie… » C’est absolument mignon comme tu compares à un truc qui est bien plus beau que… CPTSD. C’est peut être pas clair cette comparaison mais toi tu te comprends. Ca éclaire des choses, ça fait du sens, ça te valide.

« Oh. C’est vrai qu’elle a mentionné qu’il y avait pas beaucoup de ressources dessus parce que c’est plutôt récent comme terme… » Ceci explique cela. C’est tout de suite compréhensible. Oui, non pas que tu t’inquiétais de la rapidité que ça a été pour ton cas. Jordan est suivi.e depuis des années ; pour toi, un an aura suffit pour te cerner. Te diagnostiquer. Alors que tu ne t’y attendais pas. Tu venais seulement car t’avais besoin d’une oreille extérieure pendant un moment donné dans ta vie. Ce n’est pas pour rien que ça a fait blocus. Ce n’était pas prévu dans le schéma que tu correspondes à des cases. Surtout de ce genre-là.

« J’espère. » Tu espères pour lui aussi. Ca a l’air de tellement le faire cogiter que ça serait malheureux si ce n’était pas un débouché positif. « Plus on a d’information sur soi mieux on sait naviguer… » C’est une belle phrase. “Beau mantra.” Ça te dit d’essayer de le mettre en application, Birdie ? « Ca me fait penser quand Maggie m’a parlé de ma mère. De savoir qu’elle était pianiste ça a mis du sens dans ma vie… » Tu n’as jamais connu de moments pareils. Tu n’en as jamais eu besoin non plus. “Mmh.” Tu humes légèrement. Tu ne sais pas quoi rajouter. Alors tu vas simplement prendre sa main pour l’amener contre toi. Pour la serrer fort. Lui dire un silencieux je sais là. Tu n’as pas besoin d’être vocale ; iel le sait. T’es toujours là.

Voilà que ça t’amène à réfléchir, à laisser ton esprit divaguer. Il se dirige là où tu ne veux pas mais c’est sûrement parce qu’il le faut. Tu ne dis rien pour l’instant à Jordan car tu n’es même pas renseignée toi-même. Si tu l’étais un peu plus, peut-être que ça serait plus facile… Pour lui et pour toi.

“Beau mantra.” Tu trouves aussi. Ca t’a toujours bien aidé dans la vie, c’est la même chose quand tu connais mieux les autres. Tu navigues mieux autour d’eux. La vie est plus simple de manière générale quand on sait comment les autres fonctionnent. On s’adapte, on fait des compromis, on s’énerve et se frustre moins.

“Mmh.” Birdie t’écoute et tout autant que toi, n’est pas plus bavarde. Tu finis le trajet en continuant de lire et chercher des informations supplémentaires sur internet. Tu as le nez dans ton téléphone et tu es content.e d’avoir pris ton ordinateur avec toi cette fois ci. Tu as quelques trucs à faire pour le boulot mais tu avais aussi trop besoin de venir à Elimbah.

La dernière chanson qui passe à la radio alors que vous arrivez dans le village c’est Bohemian Rhapsody. Tu lèves un peu plus le son, légèrement, alors que tu ranges enfin ton téléphone, profitant de la chanson entièrement. « Des fois je me dis qu’on pourrait rester à Elimbah tant qu’on a pas de nouvelle maison. » C’est peut être même pas la première fois que tu le mentionnes. « Et puis après je me souviens que t’es chef d’entreprise… » Un sourire en coin se forme sur tes lèvres car mamamamamama tu t’enflammes toujours en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Birdie en big boss ça te fait trop de choses. Et là c’est parfait comme tangente car tu as envie de passer à autre chose niveau conversation. Tu as lu assez en une heure là. Tu verras la suite plus tard. Tu te laisses le temps de digérer tout ce que tu as appris aujourd’hui entre la session et google. Si tu te laisses pas respirer tu risques juste de te faire peur avec tout ça alors que ça ne devrait pas l’être. C’est une information. Toi tu n’as pas changé. Tu t’élèves juste un peu plus dans le savoir de ta propre personne.

La musique entrainante aide aussi à te changer les idées là. Tu as hâte d'aller te rouler dans l'herbe de l'immense jardin, ce grand terrain qui te fait rêver absolument tous les jours depuis que vous êtes dans un immeuble.

Le trajet est particulièrement silencieux mais sans pour autant être gênant. Chacun est dans ses pensées. Tu aurais aimé avoir mille sujets de conversations à cet instant mais rien ne vient. Pour une fois. Alors peut-être que tu augmentes un chouilla la musique. Et peut-être que tu lâches la main de Jordan pour pouvoir apprécier une petite clope. Ce besoin fugace qui te donne un semblant d’apaisement. Après tout, ça te tend un peu, toute cette histoire. Jordan voit de la lumière ; essaie d’en voir aussi. Il y a pire que de rester dans le néant le plus total ? Tu n’aimes pas les étiquettes. Et tu découvres que t’aime encore moins les étiquettes psychologiques. C’est marrant car ça ne te pose pas de soucis quand ce sont les autres.

Enfin la ville puis la maison apparaissent après avoir parcouru les champs de fraises bâchés en cette saison. Il y a un petit sourire qui flâne sur ton visage, comme les traits qui se détendent automatiquement ; l’effet Elimbah est toujours aussi beau et prenant sur toi. « Des fois je me dis qu’on pourrait rester à Elimbah tant qu’on a pas de nouvelle maison. » Ta main à l’extérieur de l’habitacle qui s’agite en fonction de la musique que Jordan a monté, brisant le silence qui persistait. T’allais pour répliquer mais iel te prend de court. « Et puis après je me souviens que t’es chef d’entreprise… » Avant de rouler des yeux. “Chef d’entreprise, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre.” C’est très loin d’être une entreprise et ça ne le sera jamais ; tu veux juste apporter un peu de magie à Brisbane, pas devenir une grande franchise. Et puis, chef, franchement… Non, ça ne te va pas. Mais Jordan dit ça surtout pour t’emmerder, tu le sais. “Mais oui, ça serait compliqué d’ici.” Puis tu tournes la tête vers lui en même temps que tu t’engages dans l’allée de la maison - enfin, enfin! “Et puis, tes amis, Maria, tes concerts, tout ça te manquerait. Tu dis ça parce qu’on y vient que quelques jours ici et là.” Ce n’est pas un reproche, loin de là ; ce n’est pas pour rien que tu fais toi même plusieurs allers/retours. Tu as besoin du calme d’Elimbah et de la frénésie de Brisbane. Ça ne s’explique pas. “Et puis, on capte pas non si bien qu’en ville.” L’internet est en dent de scie dans la région. Une qualité à ton avis. C’est mieux pour pouvoir bien couper. “Home sweet home.” Que tu soupires d’aise en te garant avant de couper le contact. “Mais j’ai vraiment hâte de retrouver un jardin.” Plus toi que lui vu que c’est plus toi qui t’en occupais, qui t’en souciais, qui l’exploitait. Tu entends un bruit à l’arrière du van. Milord est en train de faire des tours dans sa roue installée dans sa cage. Tu souris. “On est arrivés, petits monstres.” Milady se réveille à peine à côté de la cage de son acolyte, baillant de toutes ses chicos.

Quand elle ôte sa main de toi, tu vas poser la tienne sur sa cuisse. Tu apprécies le contact mêmes tu ne réagissais pas plus que ça. C’est une couche de protection supplémentaire dans ton âme et ton petit coeur. Elle est toute proche, elle veille sur toi, autant que l’inverse est vrai.

“Chef d’entreprise, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre.” Ton sourire qui se fait plus large alors que tes yeux hurlent Girlboss please step on me. “Mais oui, ça serait compliqué d’ici.” C’est dommage parce que cette maison est parfaite, car c’est celle de Birdie. “Et puis, tes amis, Maria, tes concerts, tout ça te manquerait. Tu dis ça parce qu’on y vient que quelques jours ici et là.” « Ouais… C’est vrai. » Elle a raison, mais tu vas continuer de provoquer un petit séjour dans le coin plus souvent qu’avant. Tu as besoin d’une maison pour vivre. C’est incroyable comme t’es devenu claustrophobe. “Et puis, on capte pas non si bien qu’en ville.” « Hmmm… C’est vrai. » Elle te remet les yeux en face des trous. T’es juste très triste d’être dans cette maison pour travailler. Il faudrait que tu trouves un endroit plus adapté pour passer tes journées où tu es juste devant ton ordinateur.

“Home sweet home.” Tu te sens si bien d’être là. Tu vas recharger tes batteries de bien être autant que tu peux. “Mais j’ai vraiment hâte de retrouver un jardin.” « Je vais aller me rouler dans l’herbe. » “On est arrivés, petits monstres.” Et vous récupérez vos babies autant que vos affaires pour vos quelques jours à Elimbah.

Comme tu l’avais dit, tu es vite allé t’installer dehors. Y’a un beau soleil malgré l’automne, tu profites, ça fait du bien à l’âme autant qu’au corps. Tu t’es allongé dans l’herbe directement. Pieds nus. Tu reconnectes avec la nature, avec toi même. Tu te ground. Tu fais l’étoile de mer, les yeux fermés, tu respires profondément, en silence. C’est limite une séance de méditation que tu fais là. Tu espères qu’elle va venir te rejoindre et s’allonger de tout son long sur toi car son poids sur toi est une couche supplémentaire de sécurité pour toi. Si elle ne vient pas au bout d’un temps qui te semblera long (une heure par là) tu l’appelleras pour qu’elle vienne, mais tu as bon espoir qu’elle vienne toute seule.

« Ouais… C’est vrai. »
« Hmmm… C’est vrai. »

Tu énonces des vérités car tu les connais. Tu sais ce que tu as à Elimbah, tu sais aussi ce qui te manque. Ce n’est pas pour rien que tu reviens vers Brisbane au bout de quelques jours. Le parfait mélange des champs et de la ville. Un pied dans l’un et un pied dans l’autre. Le meilleur des deux mondes et tu es plus que ravie de pouvoir en faire profiter Jordan. D’autant que ton partenaire le demande de lui-même, c’est encore mieux. C’est qu’iel apprécie y venir. Qu’iel y trouve son compte. Que c’est un endroit apaisant et agréable pour lui aussi. Ça te fait vraiment plaisir. Tes amis ont toujours apprécié venir ici de temps à autre mais Jordan a l’air d’être plus sensible aux charmes du coin. A la magie du lieu. Et t’apprécie beaucoup. C’est une des plus belles preuves d’amour à tes yeux. « Je vais aller me rouler dans l’herbe. » Tu souris encore plus, tu l’embrasses furtivement et tu sors de ton van pour aller chercher vos monstres et vos affaires.

T’as eu le temps de faire le tour de la maison pour bien confirmer que vous êtes seuls - tu as prévenu tes sœurs donc tu espères qu’il n’y aura pas de mauvaises surprises. C’est une fois dans ta chambre, assise sur ton lit que tu te mets à cogiter de nouveau. Tu sors ton téléphone et tu tapes. T.D.A.H. Heureusement que Google sait car les lettres se mélangent, t’avais oublié. Occulté. Et pourtant. Les mots que tu lis te chamboulent. C’est toi. Genre… C’est ta description. Tu ne vas pas plus loin que la page Google. Tu descends au rez-de-chaussée. Il y a Milady qui reprend ses marques. Vos animaux ont des colliers avec des puces. Localisables sur application téléphonique. Tu n’es pas friande de technologie mais au moins, c’est utile. Rassurant aussi. Vous pouvez ouvrir les portes fenêtres sans problème. Tu as foi en tes animaux de retrouver la maison. La nourriture surtout. Tu passes aussi dans la cuisine pour regarder le frigo et le congélateur. Il y a des trucs, c’est parfait. Tu abandonnes ton téléphone sur la table avant de partir à la recherche de ton amoureux. Tu vas automatiquement à l’extérieur. Jordan a besoin d’espace. Toi, tu te débarrasses de tes chaussures. De ton gilet. De ton haut aussi. C’est en soutien gorge et jupe que tu prends ton bol d’air. Et que tu vois Jordan au sol, en étoile de mer, les yeux fermés. Tu t’approches et tu fais exprès de lui gâcher le soleil dans le visage pour qu’iel ait conscience de ta présence. “Enjoying yourself ?” Que tu demandes. Tu aimes que Jordan se prélasse et prenne ses aises. C’est vraiment un des plus beaux trucs au monde.

Tu gagnes un baiser quand tu lui annonce que tu vas te rouler dans l’herbe et tu espères bien qu’elle viendra en faire de même. Tu passes en revue les choses dont tu te souviens. Dans ta tête. En silence. Tu as laissé ton téléphone à l’intérieur. Tu as envie de rester avec tes pensées, la nature, le silence et les sons de la nature qui t’entoure. Le petit air frais te fait du bien, tu supportes très bien ton hoodie. Et puis tes pensées bifurquent sur totalement autre chose, les visites de maisons, le travail, Halsey bientôt.

“Enjoying yourself ?” Un sourire se forme sur tes lèvres alors que tu l’entends, une heure plus tard, tu ouvres les yeux. « I am. » Tu apprécies devoir qu’elle bloque le soleil afin que tu puisses la regarder sans être éblouit. Tu remarques bien vite le peu de vêtements qu’elle a sur le dos et ça ne te surprend aucunement. Tu as bien de la chance d’avoir une moitié qui aime autant montrer sa chair. C’est tellement le total opposé de toi c’en est incroyable quand on y pense. Pas surprenant non plus en même temps. C’est fascinant. « T’as l’air d’être une apparition divine comme ça. » Tu marques une pause. « Un peu comme tous les jours où je te vois en fait. » T’es bête, mais oui, elle est la personne la plus belle à tes yeux et ton âme. Ton sourire est si beau sur ton visage. Tu tends un bras vers elle alors que l’autre se place au dessus de ta tête car t’es totalement relax. « Come join me. » Tu as bon espoir qu’elle vienne à tes côtés. Tu l’attireras totalement sur toi si ce n’est pas ce qu’elle fait d’elle même. Tu as besoin de tout son poids sur toi. Tu y penses depuis que tu t’es installé.e là et tu vas faire en sorte que ça devienne réalité dans un futur très proche là. Alternativement elle peut te marcher dessus se sera parfait aussi. Tant qu’il y a du contact, tu prends tout.

« I am. » Ton sourire n’a d’égal le sentiment de sollicitude que tu ressens en ce moment. Voir Jordan aussi détendu.e et apaisé.e dans ton monde, ton univers, chez toi, c’est toujours aussi fou. Tu as l’impression que c’est une confirmation en plus que vous êtes fait pour être ensemble. Et c’est aussi une autre confirmation que vous avez la même vision des choses côté maison ; des fenêtres partout, des espaces ouverts, de quoi se ressourcer une fois le pied dehors. “Je vois ça.” Que tu soulignes avec un air appréciateur. Iel a beau porté un sweat, tu ne le prends pas pour un affront. C’est l’automne et il ne fait pas forcément très chaud. Toi, t’aime juste te trimbaler à moitié à poil car tu le peux.

« T’as l’air d’être une apparition divine comme ça. » Tu bombes le torse tout en relevant son minois un peu en l’air. “On me l’a souvent dit.” Dit d’un timbre très prétentieux qui ne te ressemble pas vraiment - parfois c’est sincère mais là, ça ne l’est pas. « Un peu comme tous les jours où je te vois en fait. » Tu te marres légèrement avant de foutre ton pied contre son visage. “Shut up.” Iel est parfois si niais et le pire c’est que ça fonctionne. Tu fonds à chaque fois. Et tu te marres aussi beaucoup. La répartie de Jordan est toujours aiguisée. Tu l’adores. Surtout quand t’en es pas la victime.

« Come join me. » “Ugh.” Que tu dis avec un soupir feinté. “Okay, fine. If you insist.” Non mais tu joues la comédie à fond. Tu t’installes à côté. A peine tu penses être bien que Jordan t’attire vers lui, voire même sur lui. Tu as une petite exclamation de surprise qui sort et même un petit rire alors que t’es buste contre buste, nez à nez avec Jordan. “Hey.” T’es adorable. Il n’y a pas meilleure distraction que ton partenaire à cet instant. Tu te cales un peu mieux pour être confortable. Ton museau contre son torse. Ne pas penser au reste. La maison, le local, tes amis, le ATHD- THDA- bref, ce truc-là. Peut-être que tu te décoinceras un moment à en parler à Jordan. Tu sais pas. T’hésites. Alors tu te tais. Tu profites de l’instant. Les bruits de la nature et les battements de coeur de Jordan sont bien plus agréables à entendre que ta voix.