TW : perte d’enfants, consommation de cocaïne


Lexie traine légèrement des pieds en arrivant à la réserve d’animaux de Lone Pine, peu intéressée par ce genre de bêtes. La brunette n’était, de manière générale, pas une fan de la nature. La jeune Walker était une pure citadine, de ceux qui aiment les hauts gratte-ciels, les boutiques de luxe, et l’agitation permanente. Et en approchant du sanctuaire des animaux, elle ne peut que constater qu’il y aura pire que les bêtes aujourd’hui : les enfants. Elle est encore à plusieurs centaines de mètres de l’entrée que les familles affluent déjà de partout, des bambins hurlant en courant dans tous les sens. Elle laisse échapper un soupire et continue jusqu’à l’entrée où elle retrouve Zoya et sa fille.

« Hey, Lexie, ça me fait plaisir de te voir. »

La brunette lui sourit avec sympathie. Elle sait que si elles ne se sont pas vues, ces derniers mois, c’est entièrement de la faute de Lexie. Une nouvelle fois, elle avait lâché son amie. Elle l’avait fui un temps en apprenant sa grossesse, empêtrée dans ses problèmes. Elle avait à nouveau fui lorsqu’elle avait perdu son enfant. Les semaines s’étaient enchaînées, puis les mois. La tristesse avait été traitée avec une consommation accrue de cocaïne, et une grande solitude. Les gens l’abandonnaient toujours, finalement. Noah l’avait quitté, comme elle l’avait toujours craint, alors Lexie avait préféré éloigner les autres. Elle n’était de toute façon pas d’humeur à sympathiser et elle espérait que, cette fois-ci, Zoya ne lui tiendrait pas rigueur de son silence. Son accueil était en tout cas avenant et sympathique, et la photographe ne s’était pas découragée, malgré le comportement de Lexie. Les yeux bleutés de cette dernière se posent sur la petite Chloé dans sa poussette, et elle se force à sourire.

« Salut microbe ! Un check ? »

Elle lui tend la main pour que la petite tape dedans, incapable de plus de signe d’affection pour un enfant. D’ailleurs, juste après cet échange, un môme la bouscule et Lexie ne peut empêcher son visage d’afficher une mine de dégoût. La journée s’annonçait longue … La brunette se promet cependant de faire un effort pour son amie. Après tout, depuis que la jeune Walker essaie de se reprendre en mains, elle a besoin de toute l’aide qu’elle peut trouver. Elle est sobre depuis deux mois … ou presque. Il lui est arrivé de reconsommer de la cocaïne, c’est vrai, mais elle multiplie les efforts pour ne plus sombrer dans l’enfer qu’elle a connu. Tout soutien est le bienvenu, ainsi que toute occupation, même si celle-ci consiste à supporter des cris d’enfants au milieu d’animaux endormis.

« Tu veux faire ta photo avec un koala toi aussi ? Promis, ça restera entre nous. »

Lexie laisse échapper un petit rire mais secoue la tête.

« J’m’en voudrais de piquer la place d’une de ces charmantes têtes blondes avant la prochaine sieste de Monsieur Koala … »

A son avis, le temps était compté. Elle se joint cependant à Zoya et Chloé pour patienter, alors que la petite fille s’émerveille de tout et semble avoir du mal à rester dans la file. Il y a tant de choses à découvrir que ses yeux papillonnent en tout sens, et qu’elle semble trépigner sur place.

« Comment tu vas, Lexie ? »

A ces mots, la brunette tressaille légèrement : c’était une vaste question, particulièrement compliquée. En réalité, elle n’était pas certaine d’avoir une réponse, tant sa vie est compliquée en ce moment. Elle laisse un instant s’installer, prend le temps de réfléchir. Finalement, ses yeux bleutés dans lesquels ses tourments sont visibles se plongent dans ceux de son amie.

« J’essaie, Zoya. J’ai tout perdu … mais j’arrête la cocaïne. Alors … »

Elle secoue la tête : il est toujours difficile pour elle de s’étendre sur ce qu’elle ressent.

« J’essaie, c’est tout. Et toi alors ? »

Son intérêt est réel. L’amitié de Zoya a toujours été importante pour elle, et elle a trop longtemps délaissé son amie.

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Ca grouille d’animaux, ça grouille de gens et, pire que tout, ça grouille d’enfants. Un supplice pour Lexie, mais elle a conscience de sa chance : la première fois qu’elle avait ignoré les appels de Zoya, la photographe avait boudé pendant des lustres et lui avait clairement fait comprendre sa façon de penser. Lexie sait parfaitement que, si elle n’avait pas traversé toutes les épreuves qui avaient été mises sur sa route, Zoya ne l’aurait pas laissé revenir, après un aussi long silence. Alors elle pince les lèvres, inspire un grand coup, et promet d’attendre au moins trente minutes avant de râler. C’est raisonnable, trente minutes, non ?
Dans la queue pour prendre une photo avec un koala, un souvenir mignon devant lequel Chloé semble n’avoir pu résister, et sa mère non plus, cette dernière insiste.

« Sérieusement ? Tu t’en voudrais ? Moi non ! Je suis sûre que si on les distrait un peu avec quelque chose d’autre, on pourra tous leur passer devant. »

Lexie dévisage son amie d’un air interrogateur, un sourcil haussé.

« Encore faudrait-il qu’on ait réellement envie de leur passer devant … »

En réalité, la brunette avait tenté de trouver une excuse bidon en déclinant la possibilité d’une photo avec le koala. La vérité est qu’elle n’avait aucune envie de poser à côté d’un mangeur d’eucalyptus. D’ailleurs, elle commençait à se sentir oppressée dans cette file, avec plein d’enfants devant elle, et plein d’enfants derrière. Le volume sonore était incroyable, et elle sentait déjà sa tête cogner.
Et comme si la sensation désagréable causée par la proximité de tous ces gens ne suffisait pas, voilà Zoya qui devient sérieuse et l’interroge afin de savoir comment elle va. Mal. Mais mieux. Et pour l’instant, c’est tout ce qu’elle pouvait faire.

« Tu as traversé beaucoup, Lexie. Tu es une battante. Je sais que ça finira par aller. »

Lexie lui sourit, sans grande conviction. Ca pourra aller mieux, sans aucun doute. Mais la douleur sera toujours présente. Personne ne lui rendra son bébé et, elle l’avait maintenant compris, personne ne lui ramènera Noah. L’addiction, quant à elle, sera toujours présente, combattue au quotidien. Alors sa vie pourra s’améliorer, mais elle ressemblera toujours à un bordel sans nom. Elle restera toujours une jeune femme brisée, bousillée par les épreuves de la vie.

« Puis tu peux compter sur moi pour te changer les idées … bon même si tu vas me dire que j’aurai pu trouver plus distrayant que des animaux qui sentent mauvais … Mais au pire, tu pourras peut-être te livrer à un combat avec un kangourou tout à l’heure ? »

Cette fois-ci, Lexie éclate franchement de rire, imaginant le spectacle.

« Je te laisse le combat de boxe avec le kangourou, mais je veux bien ton appareil photos pour immortaliser ça ! »

Elle poursuit, le sourire aux lèvres.

« Si la prochaine fois, tu envisages de m’inviter dans ces aires de jeux intérieures pour enfants, je t’en prie, achève-moi avant ! »

Hors de question qu’elle mette les pieds dans cet enfer sur terre ! C’était une limite qu’elle ne franchirait pas, elle était catégorique.

« Moi ça va. Je reviens de Los Angeles. J’y suis allée pour la Fashion Week. C’était dément ! »

Lexie lui lance un regard noir, feignant d’être outrée, tentant de réprimer un sourire.

« Et tu ne m’as même pas emmené ?! C’est pas comme si j’aurais eu besoin de poser des jours de congés en plus … »

Vu qu’elle avait été virée et qu’Elijah passait son temps à lui confier des missions au Walker Group pour l’occuper. Elle esquisse une moue avant de reprendre, d'un ton plus enthousiaste.

« Raconte ! C'était comment ? »

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Lexie s’est fait violence pour venir ici, pour Zoya, pour éviter que son amie ne lui reproche de ne pas d’efforts, alors qu’elle a ignoré ses appels pendant de longs mois. Ca n’avait rien de personnel, Lexie avait simplement écarté tout le monde lors de sa descente aux enfers. Elle n’avait envie de voir personne, de discuter avec personne. Elle n’était pas capable de supporter des discours tout faits ou des mots maladroits. Et elle n’avait pas envie d’entrainer quelqu’un avec elle dans sa chute. Heureusement, son amie Zoya avait eu la décence d’attendre, alors Lexie avait accepté le lieu de rendez-vous, et la voilà qui patientait en plein cagnards, entourée de gosses qui s’impatientaient et piaillaient dans tous les sens.

« Il n’aura aucune chance face à moi, tu le sais. Mais ok, deal. »

Lexie lève les yeux au ciel en esquissant un sourire : Zoya envisageait sérieusement de faire un combat de boxe avec un kangourou. Cette femme était définitivement folle, mais c’était aussi une des raisons pour lesquelles Lexie l’appréciait autant. Les échanges se poursuivent avec légèreté, et la brunette apprécie cette pause dans son quotidien plutôt morose et difficile, malgré les cris des bambins.

« La prochaine fois, on ira dans un environnement plus agreste. Où il n’y aura personne pour t’agacer. Juste moi. Je sais que tu m’adores, tu peux le dire. »

Lexie éclate de rire.

« Tu me vends pas du rêve là, tu le sais ? »

En promettant déjà qu’elle l’agacera lors de leur prochaine rencontre, la photographe ne présente pas leurs futurs plans sous leur meilleur jour. Et pourtant, Zoya ne serait pas Zoya si elle n’était pas aussi frustrante et énervante.
La conversation devient plus sérieuse un instant, quand la Lewis interroge Lexie pour savoir comment elle va, mais cette dernière ne fait qu’effleurer le sujet dans sa réponse. Elle n’a pas réellement en parler, pas encore, pas encore qu’elle le fait constamment avec Channing, avec Elijah, avec Alexandra, sa coach de sobriété, ou encore lors des réunions. Elle renvoie donc la balle à Zoya, qui lui parle de Los Angeles.

« Dément ! Rien que d’être repartie à l’étranger m’a fait un bien fou depuis tout ce temps. J’ai profité comme il se devait et je reconnais que j’ai déjà hâte de pouvoir repartir. »

Lexie sourit à son amie : ça lui fait plaisir de la voir ainsi épanouie.

« Et c’est déjà prévu ? D’autres shootings à l’étranger ? »

La balade se poursuit dans le parc à kangourous et, si Lexie ne l’avouera jamais, elle est là plutôt impressionnée. Voir les gens se promener au milieu des animaux est incroyable. Les bêtes se laissent approcher assez facilement, sans doute habituées à la présence de l’homme. Zoya surveille Chloé qui court partout, et Lexie les suit.

« Lex’, si je t’ai fait venir aujourd’hui, c’est aussi parce que j’ai quelque chose à te dire. »

Les pieds de la brunette s’arrêtent instantanément, et elle dévisage son ami, les sourcils froncés. Elle n’apprécie pas trop cette entrée en matière, et craint le pire. On commençait rarement à annoncer des bonnes nouvelles de cette façon.

« Je ne t’ai jamais dit qui est le père de Chloe et ce n’est pas quelqu’un qui t’es inconnu. »

A ces mots, la brunette hausse cette fois les sourcils, surprise. Elle n’a en effet jamais demandé qui était le père de Chloe, s’en fichait, pour être honnête, parce qu’elle n’imaginait pas le connaître.

« C’est Freddy Mulligan. »

En entendant ce nom, qui semble avoir été banni de la bouche des Walker depuis son annonce théâtrale et son départ pour l’étranger, le visage de Lexie se ferme. Elle ne ressent que de la colère à l’égard du Mulligan. Il s’était rapproché d’elle pour avoir un accès aux autres Walker, lui mentant sans aucun scrupule. Puis il avait lâché cette fameuse bombe : il était leur demi-frère, le fils de Richard Walker. Lexie n’avait d’abord pas voulu le croire, avait refusé d’imaginer son père, qu’elle idéalisait, comme un infidèle, qui leur aurait caché des choses. Elle avait exigé un test génétique auquel Freddy s’était prêté, avant de disparaitre pour LA pour y poursuivre sa carrière. Et ça, la brunette ne le lui pardonnerait jamais ! Comment avait-il pu menacer de renverser tout l’équilibre familial, déjà particulièrement fragile, pour ensuite s’en aller ? Lexie ne voyait décidément pas l’intérêt de dévoiler une telle information, si ce n’était pas pour tenter de faire partie de leur famille.
Le silence s’installe entre les deux jeunes femmes et tire en longueur quand la jeune Walker prend le temps de réfléchir à sa réponse. Finalement, elle secoue la tête.

« Non, je ne connais pas le père de Chloe. »

Ce n’est pas si faux : elle ne connaissait pas réellement le Mulligan. Il n’était qu’un manipulateur, doublé d’un menteur, qui avait tout renversé sur son passage avant de déguerpir. Elle ne veut pas entendre parler de lui, et ne fait pas le rapprochement avec Chloe, qui est en réalité sa nièce. Elle n’en est pas capable à cet instant. Elle se force à esquisser un sourire en regardant la petite.

« Je pensais pas dire ça un jour, mais j’espère qu’elle tiendra de sa mère … »

Elle tente l’humour pour détendre un peu l’atmosphère qui est soudain devenue glaciale.

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Lexie n’aime pas parler d’elle. Elle n’aime pas réellement être le centre de l’attention. Elle a toujours attiré les curieux, les journalistes ou les paparazzis, parce qu’elle est une Walker. Son nom est connu, alors tous voulaient savoir ce dont la fille de Richard était capable. Lexie n’a fait qu’entretenir cette attention qu’on lui portait en multipliant les frasques, mais non pour être vue. Ce qu’elle cherchait, c’était à attirer l’attention de sa mère, juste celle de Mary Walker, et énerver la matriarche au plus haut point. Et pourtant, Lexie n’a jamais aimé parler d’elle, et la situation ne s’est pas arrangée depuis qu’elle a traversé l’enfer. Elle n’a pas envie de raconter les épreuves qu’elle a subies, n’a pas envie d’y revenir encore. Elle le fait suffisamment lors des réunions des alcooliques et narcotiques anonymes. Elle le fait suffisamment avec Alexandra, sa coach et amie. Elle le fait suffisamment avec ses frères. Alors elle est ravie de pouvoir détourner la conversation vers Zoya, d’autant plus quand celle-ci lui parle de ses shootings à l’étranger et d’une vie qui lui semble trépidante et intéressante.

« Pour l’instant, non. Mais mon boss a son agenda rempli de nouvelles destinations qui me font de l’œil. Je vais sûrement lui faire du charme pour qu’il accepte de me prendre avec lui. »

A ces mots, Lexie éclate de rire. Elle imagine très clairement Zoya tout faire pour rendre un travail exemplaire et, si cela ne suffit pas, elle la voit déjà faire son sourire ravageur, menacer puis hurler. Elle sait cependant que son amie saura y faire.

« Si tu pouvais en profiter pour le convaincre de m’emmener … Je suis certaine que je pourrais être utile pour l’une ou l’autre chose. »

Et elle en a besoin, sans aucun doute. Une escapade à l’étranger pourrait lui changer les idées et la sortir de l’univers parfois étouffant de Brisbane.

Mais la conversation ne reste pas longtemps légère, et Lexie en veut presque à Zoya de détruire leurs projets de voyage et la bulle imaginaire qu’elles se construisaient. Surtout quand la photographe en profite pour annoncer à la Walker une nouvelle dévastatrice : Freddy Mulligan est le père de Chloé. Le demi-frère de Lexie, celui qui a révélé à tous son identité et l’infidélité de leur père, et a ensuite disparu des radars. Il avait balancé une bombe destinée à les détruire, mais sans vouloir faire partie de leur famille. Lexie n’a jamais compris ses raisons, ni son comportement. Elle se souvient de leurs rencontres qu’elle imaginait fortuites à l’époque, mais qu’il avait sans doute provoqué. Elle se souvient encore du charme qu’il lui faisait, sans doute pour être dans ses petits papiers, et ça lui donne la nausée. Elle se souvient de son intrusion dans leur univers qu’il a tenté de démolir. Alors non, elle ne le connait pas, et elle ne veut plus jamais entendre parler de lui. Elle indique à Zoya qu’elle espère que Chloé tiendra de sa mère.

« Ca va de soi, il ne peut pas en être autrement. »

Les yeux bleus de Lexie passent du regard attendri de la mère à ceux de l’enfant, et sa mâchoire se crispe. Elle voit les yeux de Freddy, les yeux de Richard, les yeux de Walker, quand elle regarde Chloé. Et quand la gamine grandira, elle repèrera sans doute également d’autres choses, que son visage de bambin empêche aujourd’hui de noter. Freddy est là, il sera toujours là, et Lexie secoue la tête pour tenter de faire disparaître cette pensée négative.

« Si ça peut te rassurer, je le déteste tout autant. Je suis allée à sa rencontre quand j’étais à Los Angeles pour lui parler de la nécessité qu’il soit aussi aux côtés de Chloe. Il n’a rien voulu savoir. Sa carrière a définitivement plus d’importance que sa propre fille. »

Lexie se mord l’intérieur de la joue pour contenir sa colère, mais on peut la lire aisément dans son regard. Ce mec n’était que déception. Elle murmure entre ses dents « quel salaud » ! Puis ses yeux se radoucissent et c’est un regard compatissant qu’elle porte sur Zoya et sa fille, celle qui va grandir sans père. Mais peut-être vaut-il mieux grandir sans père qu’avec un tel père. C’est en tout cas ce dont Lexie est convaincue quand elle pense à sa mère. Hésitante, détestant le contact physique, la brunette fait cependant un effort et pose une main qu’elle espère réconfortante sur l’épaule de la photographe.

« Je suis désolée. »

Pas parce qu’elle se sent coupable, non. Mais pour tout ce que Zoya et Chloe ont déjà affronté, et tout ce à quoi elles devront encore se confronter.

« J’ai mis le temps à te le dire pour des raisons évidents et Elijah et moi étions d’accord à ce sujet. Tu as un lien avec Chloe et si jamais tu voulais toi aussi faire partie de sa vie, tu en as tout autant le droit, qu’importe que Freddy soit un abruti fini qui lui, n’aura plus jamais aucun droit sur elle. C’est ton choix, Lex … »

Les sourcils de Lexie se sont froncés au fur et à mesure de la tirade de Zoya. Les mots de la Lewis ne font pas de sens, et la brunette l’interroge.

« Elijah … et toi ? Qu’est-ce que ça veut dire ? »

Pitié, faites que Zoya ne lui révèle pas qu’ils étaient en couple et qu’Elijah devenait un père de substitution pour cette enfant. Elle le connait trop bien pour savoir qu’il ne laisserait ni Chloe ni Zoya surmonter toutes les épreuves d’une vie à deux sans aide. Et Lexie redoute une nouvelle confession de son amie.

« Vous parlez de moi avec mon frère ?! Vous prenez des décisions par rapport à moi ensemble ?! Zoya … »

Elle se sent soudain trahie. Elle a l’impression qu’on lui a une nouvelle fois caché des choses, qu’on l’a à nouveau tenu à l’écart, et elle déteste cela.

« Comment tu réagirais si moi j’allais voir un de tes frères pour discuter de ce que tu peux ou ne peux pas savoir ?! »

Elle est en colère. Evidemment qu’elle est en colère. Freddy lui a caché des choses. Richard lui a caché des choses. Elijah lui a caché des choses, en disparaissant pour l’autre bout du monde pendant des années et en l’abandonnant. Et voilà que maintenant Elijah et son amie Zoya s’y mettaient à deux pour cacher encore plus de choses. Elle bouillonne, et elle n’est pas prête pour tout ça. Même si Zoya vient de pointer le lien de parenté entre Chloe et elle. De toute façon, les liens familiaux n’ont jamais eu réellement d’importance chez les Walker. Seuls les liens fraternels ont semblé survivre à leur environnement.

« J’suis pas du genre à pouponner, Zoya … »

Les enfants, ça n’avait jamais été son truc. Et c’était pire depuis qu’elle avait perdu le sien. Elle n’avait pas envie de faire du baby-sitting, ou même des câlins ou des jeux avec Chloe. Elle n’était pas prête.

« Et c’est pas à moi de réparer vos erreurs, à Freddy et à toi ! »

Freddy, parce qu’il était un connard incapable d’assumer ses responsabilités. Zoya, parce qu’elle avait couché avec un goujat irresponsable. Et à cet instant, il lui importe peu que, elle aussi, il y a quelques temps, a eu un rapport non protégé qui aurait pu déboucher sur une vie de famille. La colère l’emporte sur sa capacité à raisonner, et peu importe à quel point la photographe va répliquer, car ce serait mal connaître Zoya que d’imaginer un seul instant qu’elle va laisser passer les propos de la brune.

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Rétrospectivement, supporter une file d’attente débordante de bambins surexcités pour faire une photo avec un koala était une promenade de santé et un moment agréable. Car la légèreté qui semble pourtant s’imposer dans ce parc animalier a bien vite disparu quand Zoya a annoncé à Lexie que Freddy, le demi-frère de celle-ci, était le père de Chloe. Finie l’époque où la photographe envisageait de piquer la place d’un autre enfant ou de faire un combat contre un koala. Finies les minutes pendant lesquelles les deux amies ont envisagé un séjour ensemble à l’étranger, pile ce qu’il faudrait pour changer les idées de la Walker. La grande révélation de Zoya a chassé ces instants légers. Et si, dans un premier temps, Lexie rejette toute mention de Freddy, toute idée de l’implication du Mulligan, elle compatit bien vite quand elle apprend qu’une fois encore, l’acteur a déserté en fuyant toutes ses responsabilités.

« Je n’ai pas besoin de lui. C’est pour Chloe que je suis triste. »

Lexie affiche une moue triste en hochant la tête.

« Je sais. »

Elle connait Zoya, sa force de caractère et ses ressources : elle sait qu’elle s’en sortira, et Chloe aussi, en un sens. Elle ne manquera de rien, sans aucun doute, sauf d’un père, et c’est un regard compatissant qu’elle pose sur l’enfant qui joue quelques mètres plus loin. Cette petite fille grandira sans père, un peu comme elle, alors qu’elle aurait tant eu besoin que Richard reste à ses côtés pour l’aider à grandir et à surmonter les épreuves de la vie. Mais Freddy, malgré son lien de parenté avec Richard Walker, est sans doute plus proche de Mary, la matriarche, en terme de caractère, et finalement, il vaut peut-être mieux pour Chloe vivre sans père que vivre avec un père qui ressemblerait à la mère de Lexie.
Zoya continue à parler, à expliquer pourquoi elle ne révèle le lien de parenté unissant l’ancienne journaliste à Chloe que maintenant. Et rapidement, la compassion laisse la place à la colère. Elijah, son frère aîné, est au courant de tout, et avec Zoya, ils ont convenu ensemble du bon moment pour tout révéler à Lexie. Non seulement ils se connaissent, mais en plus, ils discutent d’elle et prennent des décisions la concernant, et cette idée révolte la jeune Walker. Lexie a toujours voulu être indépendante et ne supporte pas que l’on souhaite gouverner sa vie.

« Je suis sortie avec ton frère il y a de ça quelques années … quand il vivait encore à New York. »
« Quoi ?! »

Lexie n’en croit pas ses oreilles ! A cette époque, il manquait à la jeune femme un frère, un frère installé aux Etats-Unis qui s’amusaient avec une de ses amies de lycée. Et si Zoya et Lexie s’étaient perdues de vue à ce moment-là, elle détestait l’idée que, pendant qu’elle espérait que son frère revienne les épauler et les aider à supporter les épreuves que la famille devait affronter, il fricotait avec son amie. La brunette a beau tenter de se maîtriser, elle sent rapidement la colère monter, alors qu’un sentiment de trahison l’envahit. Le volume sonore de son échange avec Zoya a atteint des proportions que les animaux qui les entourent ont du mal à supporter, alors qu’ils prennent petit à petit la poudre d’escampette. Les promeneurs leur jettent des regards assassins, mais Lexie se fiche bien de leur avis et crie à Zoya à quel point elle a merdé.

« De la même façon que toi, je le reconnais. On ne pensait pas à mal en prenant une telle décision, c’était … pour ton bien. »

Lexie secoue la tête, outrée par les paroles de la Lewis. Elle a l’impression de reconnaître Mary dans ces mots, la matriarche qui prend des décisions pour leur autre, dans leur intérêt, mais qui est toujours à côté de la plaque.

« Tu penses honnêtement que tu l’aurais pris comment si tu l’avais su après la perte de ton bébé, Lexie ? »

La brunette serre les dents.

« Va te faire foutre. »

Mal, sans aucun doute. Peut-être plus mal que maintenant. Mais est-ce que la situation pourrait être pire, finalement ? Lexie poursuit, affirme qu’elle n’est pas du genre à s’occuper d’enfant, et ce peu importe qu’elle vienne de perdre son bébé ou pas. Ce n’est pas elle, elle n’est pas ainsi. Et ce n’est pas parce que Freddy, son demi-frère, a merdé, qu’elle doit réparer ses erreurs. Ce n’est pas parce qu’ils partagent le même sang qu’elle doit faire amende honorable auprès de Zoya et Chloe. Elle ne leur doit rien du tout.

« Vos erreurs ? Donc Chloe est une erreur à tes yeux ? »

Evidemment que Zoya est en colère, mais la Walker aussi, et ses yeux lancent des éclairs.

« T’as merdé en couchant avec un connard, sans aucun doute. T’as merdé en ne mettant pas en place toutes les protections nécessaires. Alors ne va pas maintenant me faire croire que ta fille est le fruit de ton amour pour Freddy ! »

Ce n’est pas Chloe, l’erreur, c’est le comportement que Zoya a eu et pour Lexie, il est inenvisageable que la photographe le nie. Elle-même avait merdé avec Noah, avait fait l’amour avec lui sans qu’ils ne se protègent, et elle était tombée enceinte. Mais les similitudes entre les deux femmes s’arrêtent là, car Lexie a finalement perdu un bébé dont elle ne voulait pas à la base, alors que Zoya a choisi de garder sa vie et de l’élever seule s’il le fallait. La Lewis a fait ses choix, et Lexie ne lui doit rien. Fusillant du regard son amie, elle la regarde s’éloigner avec sa fille avant de prendre à son tour la direction de la sortie du parc.