Il n'y a pas à dire, sa conscience se porte bien mieux lorsque sa chasse le conduit tout droit aux portes d'une prison. C'est là qu'Edward a tout récemment entrepris son repérage, trouvant en un criminel tout juste relâché – ou échappé – une proie idéale car cet homme aux lourds méfaits ne peut être qu'une plaie pour ce monde, et une vie qu'il ne culpabilisera au moins pas d'ôter. Ce n'est pas un innocent, son flair lui dit même qu'il a lui aussi répandu plus d'une fois le sang dans cette ville et c'est tout naturellement qu'Edward débute sa traque, suivant l'homme sans même que ce dernier ne le remarque. L'approcher n'est pas bien difficile car l'imbécile ne se doute de rien jusqu'au tout dernier instant, subissant l'assaut de ses crocs s'enfonçant dans sa peau et s'effondrant dans un râle aussitôt. L'attaque est aussi rapide qu'efficace et le sang de ce malfrat est à la hauteur de ce qu'Edward en attendait, lui permettant ainsi de laisser les animaux de la forêt profiter de leur liberté pour un soir supplémentaire comme d'épargner des innocents dont il rechigne toujours à s'abreuver, malgré la méfiance inspirée à son clan. Certains diraient d'Edward qu'il est un mauvais vampire, quand lui donnerait tout pour retrouver une simple vie de mortel, ici-bas.

C'est une ordure de moins qui peuple ce monde, pour ça il est au moins satisfait. Tuer ne sera pour lui jamais un plaisir mais il faut bien se nourrir, quand bien même il ne restera bientôt plus assez de criminels en liberté pour compenser les autres vies qu'Edward refuse de dérober. Un dilemme de tous les instants pour ce vampire bien trop humain et une immortalité qu'il paie le prix fort, comme lorsque sa traque du soir lui vaut une attention qu'il n'aurait pas pu prévoir. L'homme sans vie toujours à ses pieds, Edward se voit pris sur le fait par celle qui ne peut être qu'une chasseuse, et dont l'arme étincelante s'élève sans attendre contre lui. L'un de ses congénères aurait déjà sorti les crocs mais pas lui, car sans doute qu'un combat de ce type n'est pas non plus ce qui l'attire. « Vous pouvez baisser votre arme. » il annonce même, suffisamment revigoré par le sang du criminel pour ne pas ressentir le moindre besoin de s'en prendre à elle, pas même pour se défendre. « Cet homme le méritait. » Drôle de discours provenant d'un vampire, car il ne manquerait plus qu'il ajoute avoir agi dans l'intérêt de tous. Des humains, oui, bien plus que dans l'intérêt des siens c'est certain mais son apparence vampirique et sa victime non loin de lui ne semblent pas de cet avis. Il le sait, tout à cet instant joue contre lui.

C'est une mort que l'on pourrait qualifier d'atroce car l'homme attaqué par surprise se retrouve avec le cou brisé mais ce n'est pas ce qui risque d'émouvoir Edward, convaincu d'avoir nettoyé ce monde d'un scélérat de moins. Si à ses yeux la logique de son acte ne fait pas le moindre doute, la chasseuse fasse à lui ne risque pas de tenir le même discours alors que sa réaction face à l'arme qu'Edward l'invite à baisser s'avère immédiate : « Et puis quoi encore. » En d'autres termes, il peut toujours courir pour que celle-ci lui accorde le bénéfice du doute et ce n'est pas en affirmant que l'homme n'a eu que ce qu'il méritait qu'elle se rangera davantage de son côté. Ils appartiennent après tout à deux espèces ennemies, de quoi autoriser cette flamboyante chasseuse à se méfier doublement de lui.

Son arme, elle, semble en tout cas déjà prête à servir mais Edward ne tremble pas lorsque celle-ci s'élève contre lui. « Vous ne pouvez pas dire qu’il le méritait uniquement parce qu’il est un humain sans défense. » Il n'était pas armé, c'est vrai, et n'a pas non plus eu le temps de réaliser ce qui lui arrivait mais était-il pour autant l'homme impuissant qu'on lui présente ? Non, marque-t-il en remuant fermement la tête. « C’était un criminel, et il a sans doute lui aussi retiré quelques vies par ici. » Bien sûr, elle peut ne pas le croire quand il affirme sélectionner ses victimes sur ce genre de critère mais on oublie trop souvent ces humains foncièrement mauvais profitant de l'éclipse et des menaces surnaturelles pour commettre leurs crimes, eux-mêmes capables du pire sans pour autant bénéficier de canines affutées. Le danger ne provient pas uniquement des ténèbres, car l'enfer a déjà ouvert ses portes à certains hommes sans pitié. « Vous êtes des tueurs. Tous. » Et sans doute que sa victime en était un lui aussi, quand bien même il croit sentir que la chasseuse en ferait presque une affaire personnelle. « Cet homme méritait de vivre. » Non, voudrait-il là encore lui répondre alors qu'elle entreprend de tirer et le rate de peu, sûrement dans le seul but de le faire fuir. « Vous vous trompez d’ennemi, je n’aurais fait aucun mal à cet homme s’il avait été aussi innocent que vous le dites. » Et il ne l'était pas, il faudra le croire là-dessus alors que son regard appuie cette idée encore et toujours. « C’est pour cette raison qu’il a été ma cible, tout comme je suis la vôtre désormais. » En témoigne son arme toujours pointée sur lui, face à laquelle Edward continue de se tenir droit, s'interdisant de faiblir. « J'ai été humain aussi, vous savez. » finit-il par souffler, même si son existence de mortel semble désormais remonter à une éternité. Il n'a pas choisi cette vie et regrettera toujours l'ancienne, qu'importe le cadeau que son créateur estime lui avoir fait.

James détesterait le voir engager cette discussion avec une chasseuse, mais il ne se doute pas encore qu'un de ses sbires les surveille très précisément au même instant. Ce dernier fera bientôt tomber l'un de ses boutons de manchette pour attirer son attention et c'est auprès de son créateur qu'Edward ira à l'arrivée demander des comptes, quand bien même se sentir épié n'est pas encore sa principale préoccupation. Face à lui, la jeune femme ne semble pas croire un traitre mot de ce qu'il avance. « Et tous les autres avant lui ? Ils étaient des criminels, eux aussi ? » Si seulement Edward pouvait lui prouver que c'était bien le cas, pour au moins une grande majorité de ses dernières victimes. Il soupire alors, conscient que personne ne pourrait croire à la morale et aux principes d'un vampire. « Vous ne me croirez pas si je vous dis que oui. » C'est pourquoi il ne l'affirme pas directement, se contentant de semer un léger doute dans son esprit alors que le terme innocent n'est définitivement pas celui qu'Edward pourrait apposer sur sa victime. Il n'avait rien de tel, et c'est ce que son apparence peut mine de rien indiquer quand on se prend à l'observer de près. « Qu’est-ce qu’il a fait ? » Oh, Edward ne détient bien sûr pas un dossier complet sur lui. Il n'a pas le temps de s'informer en détail sur ses victimes quand l'appel du sang est le plus fort mais il sait au moins où sa chasse est susceptible de le mener. « Il s'est échappé de prison. Je ne connais pas la nature exacte de ses crimes. » La curiosité de la chasseuse l'intrigue tandis qu'il ajoute, avec le même flegme imperturbable. « Mais il avait du sang sur lui avant même que je le touche. » Et des griffures sur les mains, parfaitement visibles, pouvant laisser penser que cet homme s'en est pris à quelqu'un entre son évasion et sa venue dans ces jardins.

« Je rends justice. » clarifie-t-elle, comme pour marquer la différence nette entre elle et lui. Edward s'efforce pourtant lui aussi de rester juste en épargnant les vies innocentes lui rappelant bien trop les proches qu'il a perdus, en dépit de sa condition de vampire voulant qu'il soit avant tout un buveur de sang sans scrupules. C'est en tout cas ce que James aimerait voir en lui. « Nous nous ressemblons plus que vous ne le pensez, mais je ne peux pas vous en vouloir. » D'en douter comme de se méfier, et ce même si ses prochaines paroles semblent la déstabiliser un peu plus encore. L'une est humaine, l'autre a techniquement cessé de l'être mais n'a-t-il pas malgré tout gardé un cœur vibrant comme le sien ? Au fond de lui, c'est bel et bien humain qu'il peut se sentir. « Allez vous en. » Elle semble rendre les armes, dans tous les sens du terme, et Edward s'étonne du peu de résistance dont elle fait preuve ici. Est-ce la façon dont les choses vont se terminer, en repartant simplement chacun de leur côté ? Il semblerait que oui, à une nuance près toutefois. « Qu'allez-vous faire de lui ? » Lui, l'homme étendu au sol dont il a un peu plus tôt ôté la vie. Il ne sait toujours pas si la chasseuse l'a cru quant à son statut de criminel, mais il doute à présent aussi que toute forme de vie ait réellement abandonné sa proie, à bien considérer celle-ci. « Il n'a pas l'air tout à fait mort. » remarque-t-il, comme s'il cherchait à l'avertir, ne sachant pas de quoi l'homme serait capable s'il revenait contre toute attente à lui. Impossible ?

les p'tits dés: