La récente visite des parents d'Halston est loin d'avoir déserté les pensées du danseur et pour cause, le piège que ces derniers lui ont tendu lui reste en travers de la gorge en raison d'une pression qu'Eddie n'a pas besoin qu'on lui mette sur la question du mariage. C'est pourtant ce qu'Henry et Harriett n'ont pas hésité à faire à peine leur fille éclipsée dans une autre pièce, non sans lui faire part de leur impatience et sous-entendre assez lourdement qu'il n'était pas normal qu'il n'ait pas encore passé la bague au doigt de celle lui ayant donné un fils. Halston mérite mieux qu’un simple concubinage d'après sa mère, de quoi laisser penser qu'un couple doit impérativement se dire oui devant l'autel pour être pleinement légitime mais ce qu'Eddie trouve le plus risible, c'est bien qu'au départ lui-même n'était pas considéré comme assez bien pour leur fille. Ses beaux-parents ont-ils enfin vu leur avis évoluer à son sujet ou sont-ils avant tout pressés de revoir Halston en robe blanche, même si ce doit être pour s'unir à un danseur ne cochant pas toutes les cases à leurs yeux ? Eddie ne s'attend pas à devenir un époux parfaitement convenable du jour au lendemain au simple prétexte qu'ils viennent de former une famille mais ce qui l'agace le plus n'est même pas qu'Henry et Harriett aient tenté de lui forcer la main, car leur intervention perturbe surtout les plans que le jeune père avait tout récemment commencé à méditer de son côté. Il ne niera pas avoir songé au mariage le premier car cette idée s'apparente depuis quelques temps à un désir silencieux dont Eddie s'est jusqu'ici contenté de parler à Charlie, prouvant ainsi qu'il n'est pas allergique au fait d'épouser la femme partageant sa vie mais souhaitant en revanche étudier la chose avec tout le sérieux du monde pour ne rien précipiter, ce que ses beaux-parents ne sont sans doute pas en mesure d’assimiler. Il ne serait pas concevable de leur donner ce qu'ils veulent sur un plateau, Eddie détesterait même plus que tout entreprendre les choses pour satisfaire leurs exigences mais alors, doit-il repousser cet éventuel projet à plus tard pour se sentir réellement libre de considérer la chose ? Et s'il finissait par planifier une demande et par acheter une bague en conséquence, n'aurait-il pas le sentiment de les laisser gagner ? C'est aussi à sa propre mère qu'Eddie songe, conscient que celle-ci pourrait également revoir ses jugements à l'égard d'Halston si le mariage dont elle a toujours rêvé pour son fils venait à se concrétiser mais même s’il pourrait pas trouver mieux pour parvenir à un terrain d'entente général, Eddie déplore le fait que cette union soit la seule véritable option en sa possession pour faire accepter leur amour. Un dilemme que le danseur a eu en tête toute la journée et avec lequel il s'apprête désormais à regagner son domicile, emportant avec lui ses préoccupations et ses doutes tout en espérant qu'Halston ne pourra rien en ressentir.

Trahir l'échange s'étant tenu entre leurs invités et lui est bien sa dernière intention, d'autant plus lorsqu'il retrouve l'insouciance de sa compagne et ce sourire qui lui a encore bien trop manqué durant les heures passées à son studio. Eddie ne s'épuise plus comme il pouvait le faire au théâtre mais croire qu'il parviendrait à rompre totalement avec la danse aurait été très mal le connaître, une situation lui permettant au moins de rester connecté à sa passion tout en transmettant celle-ci à des élèves comme Jordan, dont la progression donne un sens à cette autre casquette que le danseur et professeur avait quelque peu délaissé avec le temps. S'il arrive que la scène lui manque, il n'en est pas moins heureux de s'adonner momentanément à ce qu'il préfère sur un parquet et salue donc cette pause lui étant bénéfique car sans elle, Eddie serait encore en train d'errer tel un zombie entre les couloirs de sa compagnie. Pourtant, sa réponse n'a rien de surprenant face à Halston car si un sentiment prédomine chez lui à cet instant, c'est assurément la joie d'être rentré un peu plus tôt pour pouvoir profiter de sa petite famille. « Mon dernier cours de la journée a été annulé mais je ne vais pas m'en plaindre. » Il étire un sourire à son tour et dépose son sac dans un coin de la pièce, retirant par la même occasion cette veste de survêtement à l'intérieur de laquelle Eddie se sentirait presque étouffer. Quant à sa journée, il est de coutume qu'Halston cherche à savoir comment celle-ci s'est déroulée. « Sûrement meilleure que celle de mes élèves qui ont encore bien transpiré. C'est pour leur bien, ils le savent. » Ce n'est certes pas toujours une partie de plaisir d'évoluer sous ses directives mais aussi intransigeant puisse-t-il être, Eddie reste un professeur passionné et prêt à les accompagner avec bien plus de patience que ce qu'on pourrait penser. « Comment était la tienne ? » il questionne à son tour avant d'accueillir le baiser de l'américaine contre ses lèvres, celle-ci le prévient que Sasha ne l'a pas attendu pour s'endormir et cette image du petit prince qu'est déjà leur fils ne manque pas de le faire sourire. « Il s'habitue à la vie de pacha et nous, on en est complètement gagas. » Eddie plaide coupable sans l'ombre d'un doute, cet enfant à peine arrivé dans leurs vies est déjà leur plus grande fierté ainsi que l'être le plus précieux sur lequel ils soient amenés à veiller. Et parce que perturber le sommeil de Sasha n'est pas une éventualité, le jeune père attendra que ce dernier se réveille pour lui raconter sa journée comme il aime tant le faire – et ce, alors même que le nourrisson ne doit pas en comprendre grand-chose. Il remarque en tout cas qu'Halston n'est pas encore habillée et n'a aucun mal à supposer d'où elle peut provenir, en l'occurrence d'une salle de bain où Eddie aurait bien aimé la rejoindre si l'occasion lui en avait été donnée. « Si j'avais su je serais rentré encore plus tôt pour prendre une douche avec toi. » Il profite de leur proximité retrouvée pour passer ses bras autour d'elle par-dessus sa serviette et dépose un baiser dans le creux de son cou, mais la première réaction de sa compagne n'est pas vraiment celle qu'Eddie avait espéré. Elle semble fébrile, comme dérangée par ce contact soudainement initié et cela n'est pas sans lui rappeler que leur vie intime et leurs moments de tendresse ne sont plus ce qu'ils étaient depuis la naissance de leur fils. Halston ne se dévoile plus devant lui, il pouvait jusqu'ici tenter d'ignorer cette réalité mais ce soir, Eddie ne peut que constater que ses élans semblent indisposer l'américaine comme si elle n'appréciait plus de se laisser toucher. « Halston ? J'ai dit ou fait quelque chose de mal ? » Son regard est empreint d'inquiétude en le demandant et ses bras n'osent désormais plus amorcer le moindre mouvement, retrouvant à la place le long de son corps à défaut de savoir comment agir et se tenir.

Derrière le jeune professeur qu'Eddie n'a jamais totalement cessé d'être se trouve maintenant un père, et la différence se perçoit nettement lorsqu'il passe les portes de son studio de danse où autrefois, son groupe avait pour habitude de répéter en toute insouciance. Avec la venue de cet enfant, c'est une page de sa vie qui se tourne et Eddie a conscience que ce nouveau rôle combiné à ceux déjà existants le rendra encore moins disponible pour sa petite bande, quand bien même ses camarades de toujours sont mis face à l'évidence depuis le jour où ce projet de famille a été porté à leur connaissance. Il n'était pas question de leur mentir ou d'émettre la moindre promesse, pas alors qu'être père sous-entend que son fils passera désormais avant tout le reste, remettant en perspective l'ensemble de sa vie sans qu'aucun aspect n'en soit épargné. Le temps qu'il peut consacrer aux autres comme les différentes casquettes qu'il peut collectionner, conjuguant pour de bon au passé les représentations si longtemps assurées avec les Insane Boyz mais bien évidemment pas leur amitié. Simplement, Eddie se doit de penser à sa famille et c'est ce qu'il fait en donnant la priorité à celle-ci, tout en assurant ses cours en attendant de retrouver pleinement sa place au théâtre où ses venues sont aujourd’hui bien plus rares. Si la question d'un congé paternité s'est inévitablement posée, le jeune père craignait que cette pause ne l'éloigne un peu trop de la danse alors c'est le juste milieu qu'il s'est efforcé de trouver, non sans optimiser ses journées pour renouer au plus vite avec sa compagne et leur fils, toujours prêts à l'accueillir. Il sourit face à la remarque d'Halston s'amusant que ses élèves transpirent plus que lui et ne pourra pas prétendre le contraire, car si Eddie maitrise aujourd'hui les exercices dispensés et ne souffre pas vraiment des efforts effectués, il ne peut pas en dire autant de celles et ceux dont les courbatures seront encore nombreuses demain. De son côté, l'américaine lui confirme que sa journée était placée sous le signe de la douceur, référence au calme dont leur fils peut faire preuve du haut de ses trois mois de vie. « Inutile de te demander s'il a été sage, alors. » Puisque la réponse à cette question, le jeune père la connait déjà. Sasha n'est pas de ces nourrissons remuants et c'est mine de rien un soulagement qu'Eddie n'a jamais osé verbaliser autour de lui, compte tenu de la présence d'un trouble de l'attention avec hyperactivité dans sa famille. Souriant de plus belle à la comparaison entre leur fils et un petit prince, Eddie ne peut que donner raison à sa compagne sur ses prochaines paroles. Sasha n'aura pas toujours ses deux parents à la maison pour s'occuper de lui et ces moments en famille, aussi précieux soient-ils, se feront par la suite un peu plus rares lorsque tous deux auront repris leur travail respectif. C'est une chose à laquelle Eddie ne désire pas penser tout de suite et il devine aux yeux d'Halston qu'il en va de même pour elle, car sans doute sera-t-elle plus angoissée encore que lui lorsque la question de confier leur fils à d'autres soins que les leurs devra véritablement se poser.

Pour l'heure, c'est au présent que le danseur souhaite conjuguer ses pensées et s'il en vient à entreprendre un rapprochement pour le moins naturel auprès de sa compagne simplement vêtue d'une serviette, l'évidence selon laquelle ce premier contact incommode Halston lui saute bien vite aux yeux. Ce n'est pourtant qu'un baiser déposé dans le creux de son cou, accompagné il est vrai de mains dont Eddie vient au même moment l'encercler mais il ne pense pas se tromper en supposant que cette approche lui aurait plu autrefois, car c'est bien tout l'inverse qu'il peut voir comme ressentir ce soir. Le silence de l'américaine n'est pas pour le rassurer et son éloignement l'amène à penser que peut-être, ses gestes ou ses mots étaient de trop à son arrivée, quand bien même Eddie n'avait pas en tête de brusquer quoi que ce soit. Son regard la sonde avec une inquiétude de plus en plus prononcée tandis qu'elle avoue ce qui semble être la source du problème : son reflet, qu'Halston dit avoir le plus grand mal à affronter aujourd'hui. Un soupir lui échappe en l'entendant déprécier ce corps qui a porté leur fils pendant plus de huit mois, un corps dont elle peine à accepter les changements et qui, pourtant, plait toujours autant à l'homme partageant sa vie. « Halston.. » Son prochain geste est prudent tandis que sa main se pose avec douceur sur son bras, espérant que ce contact-ci ne la fera pas reculer davantage. « Tu as accouché il y a à peine trois mois, et il n'y a pas de plus belle raison de voir un corps changer pour moi. » Parce que ce corps est celui grâce auquel Eddie est un père comblé aujourd'hui, au cas où il aurait besoin de raisons supplémentaires pour le chérir, lui qui n'en manque déjà pas. Halston doute de retrouver un jour sa silhouette d'avant grossesse et le fait qu'elle soit si dure avec elle-même l'attriste, tout comme le fait qu'elle puisse penser que son désir puisse également en pâtir. Eddie s'agenouille alors face au lit au bord duquel l'américaine est assise avant de saisir l'une de ses mains, gardée précieusement dans le creux de la sienne. « Tu sais ce que j'en pense de ces standards, et de toutes ces normes qui voudraient qu'un couple comme le notre n'existe pas. » Ce n'est qu'un exemple à lui donner mais il est assez parlant, car ce n'est pas la première fois qu'Halston se perçoit à travers le regard des autres et se compare à d'autres femmes, autrefois plus jeunes et maintenant plus sveltes. « Chaque corps est différent tu le sais, et le tien reste beau même si tu n'en as pas conscience. Je ne peux pas te forcer à aimer ton reflet si ce n'est pas le cas, mais je refuse par contre que tu puisses penser que tu me plais moins. » C'est avec amour et conviction que son regard vient chercher le sien, sa main toujours jointe à la sienne. « Je ne vois pas de différence quand je te regarde, et tu n'es certainement pas devenue moins désirable. Regarde-moi Halston, et vois que je ne te mens pas. » En cherchant cette assurance dans ses yeux d'une part, mais aussi dans sa voix témoignant de sa sincérité. La pression qu'elle peut se mettre en feuilletant des magazines ou en scrollant sur internet n'est assurément pas une pression qu'Eddie désire lui mettre, ne voyant rien de repoussant dans le corps d'une jeune mère et même bien au contraire, car avoir donné la vie la rend même encore plus séduisante. Tout ça, il aimerait tant qu'elle puisse elle aussi le voir ou qu'au moins, ses doutes puissent s'envoler quand ils se retrouvent dans cette maison où sa nouvelle silhouette ne cessera jamais de plaire à celui vivant avec elle.