Greta avait arrêté de compter les jours, parce que l'exercice devenait presque impossible maintenant que le jour ne se levait plus. Il fallait ruser, redoubler d'ingéniosité pour comprendre le temps qui passait et elle n'avait simplement plus la force de le faire. La vie devait continuer pourtant, la plupart des métiers devenaient difficiles à exercer à commencer par celui d'épicier de ses parents. La boutique s'était vidée, même s'ils avaient évité d'être pillés, les quelques jours qui avaient suivis le début de l'éclipse avaient vu venir de nombreux villageois qui s'assurait d'avoir assez à manger pour se cloîtrer jusqu'à ce que tout aille mieux. Et il y avait le reste, plus personne n'osait sortir, le danger rôdait partout, alors la ville de Brisbane ne tournait plus comme elle avait l'habitude de le faire. Plutôt que de continuer à se lamenter à la boutique, elle était sortie à nouveau, se dirigeant vers les jardins botaniques. C'était une promenade des plus banales mais cela n'avait plus rien d'un bon bol d'air parce que la brume et la nuit étaient suffocantes. Elle s'était arrêtée là, son long manteau flottant dans le vent alors qu'elle observait au loin se dessiner le labyrinthe menaçant. « Encore vous ? » avait-elle demandé après avoir sursauté en réalisant la présence à côté d'elle. « Je ne sais pas si vous m'avez suivie mais il ne faut pas vous inquiéter. J'ai écouté vos conseils, finalement. » Elle aurait du la remercier mais à la place, elle lui avait souri en désignant de l'index le Jacaranda. Elle se souvenait combien elle aimait venir s'y reposer à l'ombre de ses jolies feuilles fuschia. Le soleil n'était plus là, l'arbre ne pouvait plus retrouver de sa superbe et il n'avait plus besoin de faire d'ombre aux humains qui se lamentaient maintenant de tant de jours sans soleil. C'était encore pire qu'un hiver trop froid ou qu'une période de pluie qui ne finissait pas et elle en était maintenant convaincue, la vie aurait une toute autre saveur si tout rentrait dans l'ordre. « Je n'ai même pas demandé votre nom, la dernière fois... » Pourtant l'inconnue l'avait sauvée, lui indiquant combien il était important de ne pas sombrer. Greta avait écouté, puis elle était rentrée chez elle auprès de ses parents pour ressasser tout ce qu'elle avait entendu ce jour-là.

Elle n’avait jamais passé autant de temps dehors que depuis le début de cette éclipse. C’était sans doute un peu paradoxal. Là où la plupart des habitants de la ville avaient déserté les rues, apeurés par les créatures qui rôdaient dans l’ombre, elle, elle passait le plus clair de son temps dehors, ne rentrant que pour manger, dormir et passer un peu de temps avec sa famille. Pour le reste, elle arpentait la ville. Avait fait de ses promenades son passe-temps le plus prenant. Elle se baladait sans réel but, sans réelle destination ce soir. Elle se trouvait émerveillée par ce manteau obscur qui ne semblait pas s’éclaircir. La lune leur jouait des tours, leur donnant l’impression que le soleil allait se lever alors qu’elle terminait simplement un nouveau cycle. La pleine lune était en approche et Itziar en avait donc profité pour se rendre au jardin botanique. Sous cette lumière, on pouvait voir les plantes sous un angle différent, repérer des petites bêtes qui avaient plutôt tendance à se cacher en plein jour. C’était presque fascinant. Tout aussi fascinant que de percevoir la même silhouette qu’elle avait croisée quelques jours plus tôt au bord de la rivière. La jeune femme sursaute quand elle s’approche. Elle aurait dû faire plus de bruit. Annoncer sa présence, comme il semblait plus opportun de faire ces temps-ci. Elle hoche la tête de haut en bas quand la blonde la questionne. Oui, encore elle. Qu’elle n’aille pas s’imaginer qu’elle la pistait, cela dit. Elle est rassurée d’apprendre qu’elle n’a pas à s’inquiéter cette fois-ci. Un sourire se dessinant sur ses lèvres quand elle lui demande son nom.

« Depuis toujours parents et amis m’appellent Itziar
Vous me direz sûrement que ce n’est point banal.
Je répondrai que vous ne l’avez probablement entendu nulle part.
Et vous ? Avez-vous un prénom original ? »

Elle était probablement un peu originale. Elle aurait pu répondre plus simplement, mais elle comptait bien tenir son rôle de fille perchée quelques instants de plus. Elle ne s’arrête pas là, d’ailleurs. Elle s’interroge sur sa présence ici, sur ce qui lui a fait changer d’avis depuis la dernière fois.

« Vous me voyez ravie de vous trouver ici.
Moi qui étais persuadée que vous aviez sombré.
Qu’à côté de votre nom était inscrit ici gît.
Quel passe-temps avez-vous trouvé pour vous revigorer ? »

Peut-être qu’elles partageaient à présent le même passe-temps. Peut-être qu’elle serait intéressée de savoir ce qu’elle avait bien pu observer ces derniers jours. Alors, elle continue sur sa lancée.

« Laissez-moi partager avec vous les détails de mon dernier rendez-vous.
J'aimerais vous expliquer quelle vilaine bête j’ai croisé.
Certains auraient été tentés de fuir en criant au loup.
Mais le chasseur avec son épée, le loup a massacré. »

Elle en dévoile un peu plus. Elle reste vague. Elle ne veut pas la choquer si jamais elle n’a pas envie d’entendre ce genre de choses.

La nuit était claire, la lune baignait tout de sa lumière argentée. Les étoiles scintillent au-dessus de ma tête, et le calme de la nuit est réconfortant. Sortir à cette heure tardive est une habitude que j'avais depuis longtemps. Les effets de la Lune n’en sont que plus forts. Les sentiers familiers menant aux jardins semblent plus mystérieux encore depuis l’éclipse et si je n’étais pas moi-même une sorcière, je pencherai pour donner un côté mystique à ce jardin botanique. Les arbres, les feuilles, tout est baigné dans une lueur douce, presque surnaturelle et ça a le don de m’apaiser, paradoxalement. Mon objectif ce soir-là était de collecter des herbes médicinales pour mes potions et pour la boutique, le genre de plantes qu’on ne trouve qu’à certaines heures de la nuit. La lueur de la lune me guidait à travers les allées, illuminant les plantes que je cherchais. Depuis la grande Lune, j’ai l’impression que le silence règne en mettre ici, la vie semble s’être échappée, terrée dans l’ombre pour mieux survivre et les seuls mouvements que je perçois sont ceux des feuilles que le vent fait bouger.

En temps normal, il n’y a pas âme qui vive à cette heure tardive, mais depuis la grande Lune, les âmes qui errent ici ne sont pas toujours sereines. Pour cette raison, je ne m’attarde pas très longtemps. Ce soir, j’ai la chance de ne croiser personne, ma besace remplie des herbes et autres baies que la nature a à m’offrir, je me décide à rebrousser chemin quand il me semble entendre quelques brins de voix féminins non loin de là. Ce n’est pas vraiment ma curiosité qui me pousse à écouter aux portes, juste un besoin de m’assurer que le danger ne rode pas dans l’ombre. Aussi quand je croise le regard des deux jeunes femmes, je ne peux m’empêcher de leur adresser un sourire avant de les saluer. « Ne prêtez pas attention à moi Mesdames. Je ne fais que passer. Je vous souhaite une belle nuit. » Je viens finalement couvrir ma tête avec la capuche de ma cape avant de m’échapper de la nuit pour retrouver mon chez moi.

Spoiler:

Seulement quelques jours étaient passés depuis qu’elle avait quitté les bords de la rivière et elle se demandait encore et encore ce qu’il se serait passé si l’inconnue n’avait pas été là. Greta n’était pas sûre qu’elle aurait osé franchir le pas, il fallait bien du courage pour s’autoriser à sombrer pour toujours. Il y avait cependant quelque chose d’attirant au fait de pouvoir choisir son propre destin mais le sien avait décidé de mettre une grande blonde sur sa route, une étrangère mystérieuse qui l’avait sauvée, au même titre qu’avaient pu le faire les sorciers ou les chasseurs. Et la lune qui trônait toujours fièrement à la place du soleil rendait les choses si étranges qu’il était difficile d’être surpris ces derniers temps mais après avoir sursauté en la voyant arriver, Greta avait bel et bien été étonnée de la voir là. « Depuis toujours parents et amis m’appellent Itziar. Vous me direz sûrement que ce n’est point banal. Je répondrai que vous ne l’avez probablement entendu nulle part. Et vous ? Avez-vous un prénom original ? » Son sourcil s’était arqué car elle ne se souvenait pas de l’avoir entendu s’exprimer ainsi auparavant. « Greta. Je m’appelle Greta. » Une réponse qui semblait bien banale, peu évasive et avec un prénom qui n’était pas aussi particulier que celui d’Itziar. Greta lui avait adressé un sourire, mettre un nom sur le visage de cette femme l’amenait à ressentir encore plus de sympathie pour elle qu’auparavant. « Vous me voyez ravie de vous trouver ici. Moi qui étais persuadée que vous aviez sombré. Qu’à côté de votre nom était inscrit ici gît. Quel passe-temps avez-vous trouvé pour vous revigorer ? » Greta s’était pincée les lèvres entre elle, se sentait légèrement idiote d’avoir fait vivre un tel moment à la jeune femme. Elle avait été là au moment le plus sombre de son existence et l’avait sauvée, venant prendre une place importante dans son existence alors qu’elle ne l’avait jamais vue auparavant. C’était comme si Brisbane avait rétréci depuis l’éclipse, comme oppressée par l’absence de soleil et réunissant certains destins qui n’auraient probablement jamais dû se croiser dans d’autres circonstances.« Vos mots ont résonné en moi, Itziar. J’avais peut-être simplement besoin d’une main tendue et entre vous et moi, je ne sais pas si j’aurais vraiment sauté. Je ne suis pas comme ça, normalement. » Elle trouvait important de se justifier, comme si Itziar allait émettre un jugement sur une personne qu’elle ne connaissait pas et alors qu’elle évoluait dans un monde où chaque âme semblait perdue. « Vous avez développé un talent pour la poésie ? » avait-elle demandé en évitant d’avoir un rire trop prononcé au cas où elle serait réellement poète. Sa voix était douce, son discours en rime sonnant presque comme une mélodie aux oreilles de Greta qui se laissait bercer par la voix chantante d’Itziar. « Ne prêtez pas attention à moi Mesdames. Je ne fais que passer. Je vous souhaite une belle nuit. » avait-elle finalement entendu alors qu’elle se perdait dans ses pensées. Poliment, elle avait salué la jeune femme, avant de la voir disparaître dans l’obscurité.


« Laissez-moi partager avec vous les détails de mon dernier rendez-vous.
J'aimerais vous expliquer quelle vilaine bête j’ai croisé.
Certains auraient été tentés de fuir en criant au loup.
Mais le chasseur avec son épée, le loup a massacré. »

A ces derniers mots, Greta s’était figée, sentant son sang ne faire qu’un tour à l’intérieur de ses veines. « Un chasseur ? » avait-elle demandé, voyant déjà le visage d’Arthur prendre forme dans son esprit. Elle ne l’avait plus vu depuis si longtemps que c’était peut-être là la raison de son abandon. « A quoi ressemblait-il ? Vous a-t-il dit son nom ? » Les questions fusaient et soudain Greta avait réalisé son impolitesse. « Vous n’avez pas été blessée ? J’imagine que vous avez du avoir votre lot d’adrénaline…  » Elle se souvenait de ce que lui avait confié Itziar à leur première rencontre et si elle s’inquiétait maintenant pour elle, elle ne pouvait que noter le visage serein de la jeune femme qui devait avoir vu ce combat comme une opportunité.

Greta, la jeune femme s’appelait Greta. Un prénom simple à retenir pour une jeune femme qu’elle n’était pas prête d’oublier. Elle avait pensé à elle ces derniers jours. Ce demandant ce qu’elle avait bien pu faire après qu’elles se soient quittées. Elle s’était demandée si elle était rentrée chez elle, sagement. Si elle avait traîné dehors encore quelque temps avant de retrouver ses quartiers. Ou si elle avait trouvé un autre muret duquel se jeter. Elle avait essayé de ne pas trop penser à cette possibilité-là. Préférant s’imaginer qu’elle avait pu faire la différence. Qu’elle avait pu interférer avec le cours des choses. Force était de constater que ça avait été le cas. Que la jeune femme n’avait pas cédé à la panique et à cette solution extrême qu’elle avait envisagé l’espace de quelques instants. Si elle avait fait au moins une chose de bien depuis le début de cette éclipse, c’était cela. “Vous m’en voyez ravie, Greta. Je ne sais pas si vous auriez sauté ou pas, mais je n'aurais pas pu faire comme si je ne vous avais pas vue. Je n’aurai pas pu me le pardonner.” Elle aurait également passé toute la nuit à se demander ce qu’il serait advenu de cette silhouette oscillant dangereusement vers les profondeurs de la rivière. Un sourire se dessine sur ses lèvres, quand la jeune femme la questionne quant à sa prose. “Oh ça ? Non. Je ne dirai pas un talent. Mais ce n’est qu’une manière de plus de m’amuser. Quand tout devient ennuyeux, jouer avec les mots reste une source fiable. Cela fait travailler l’imagination et l’esprit. Un bon moyen d’échapper à la réalité.” Non pas qu’elle en avait particulièrement besoin. Après tout, elle se complaisait toujours dans ses activités nocturnes peu communes, mais elle était quelqu’un qui ne s’arrêtait jamais, qui avait besoin de stimulation et de divertissements constants, alors, elle comblait, les moments plus creux, d’une manière ou d’une autre.

Son flot de paroles est interrompu par une jeune femme mystérieuse. Elle les salue avant de s’éloigner. Laissant à Itziar tout le loisir de continuer, surprise de voir son interlocutrice intéressée par son histoire de chasseur. “Il est grand, brun, un peu mystérieux. Coventry. Arthur. Arthur Coventry, voilà comment il s’appelle. On me l’a fortement recommandé.” Déclare-t-elle. Elle ne savait pas d'où venait la curiosité de la jeune femme. Peut-être voulait-elle, elle aussi, se lancer dans la chasse de créatures surnaturelles. “Par chance, non, je n’ai pas été blessée, il avait apporté une cape, me permettant de me camoufler dans les moments plus critiques, dirais-je.” Ajoute-t-elle avant de tourner la tête brusquement, ayant entendu des branches craquer. “Vous croyez qu’elle est vraiment partie ? La femme de tout à l’heure. Je ne voudrais pas qu’elle écoute ce que j’ai à vous raconter. Peut-être pourrions-nous aller dans un endroit plus privé ?” Propose-t-elle. Elle ne saurait dire pourquoi, mais cette inconnue ne lui avait pas inspiré confiance.

“Vous m’en voyez ravie, Greta. Je ne sais pas si vous auriez sauté ou pas, mais je n'aurais pas pu faire comme si je ne vous avais pas vue. Je n’aurai pas pu me le pardonner.” Elle était touchante, avec sa façon de s'intéresser à elle, et elle était forcément sincère car leurs chemins ne se recroisaient que par un coup du destin. Elle ne demandait rien en échange, elle avait simplement été présente au bon endroit, au bon moment. “Oh ça ? Non. Je ne dirai pas un talent. Mais ce n’est qu’une manière de plus de m’amuser. Quand tout devient ennuyeux, jouer avec les mots reste une source fiable. Cela fait travailler l’imagination et l’esprit. Un bon moyen d’échapper à la réalité.” avait-elle répondu lorsque Greta l’avait interpellée sur la façon dont elle avait prononcé ses premières phrases, en vers, comme une poétesse. Et très vite, Itziar avait évoqué son combat avant de parler d’un chasseur et la curiosité de Greta avait été piquée au vif : était-ce d’Arthur dont elle parlait ? Etait-il en vie ? Il avait une mission à accomplir, il l’avait laissée aux mains de Cesar pendant un temps mais ils avaient tous dû reprendre le cours de leur vie car l’éclipse n’en finissait pas et, depuis, elle ne savait plus où il était. Elle ne le cherchait pas non plus, les rumeurs sur la guilde des chasseurs ayant gagné son esprit. “Il est grand, brun, un peu mystérieux. Coventry. Arthur. Arthur Coventry, voilà comment il s’appelle. On me l’a fortement recommandé.” Un frisson l’avait parcourue et son visage s’était tourné vers celui d’Itziar. Bien sûr, elle ne voulait émettre aucun sentiment de jalousie, elle était simplement en train de prendre conscience qu’il était vivant, en sécurité, continuant à maintenir en sécurité les habitants de Brisbane. Des sentiments différents se mélangeaient en elle, elle était rassurée mais, au même moment, ressentait le manque cruel de sa présence. « Il est effectivement très recommandable. » avait-elle finalement dit après plusieurs secondes, affichant un sourire en évoquant les talents de son amant. Très vite, elle avait reporté son attention sur le présent pour venir s’inquiéter de ce combat qu’avait vécu Itziar. “Par chance, non, je n’ai pas été blessée, il avait apporté une cape, me permettant de me camoufler dans les moments plus critiques, dirais-je.” Son sourcil s’était arqué à l’évocation de la cape mais ce n’était pas ce qui l'intéressait. « Et Arthur, a-t-il été blessé ? Où est-il ? » Peut-être aurait-elle dû être plus discrète et éviter de trop s'intéresser à ce chasseur, il avait été clair sur l’importance de rester discret pour qu’ils soient tous les deux protégés. Mais elle fabulait, parce qu’elle pouvait tout simplement se soucier du sort des chasseurs en général. “Vous croyez qu’elle est vraiment partie ? La femme de tout à l’heure. Je ne voudrais pas qu’elle écoute ce que j’ai à vous raconter. Peut-être pourrions-nous aller dans un endroit plus privé ?” Regardant par-dessus l’épaule d’Itziar, Greta pouvait constater la silhouette de la femme qui s’éloignait dans la pénombre. « Je la vois partir, oui. Mais nous devons rester vigilantes, les vampires savent se mêler à nous et si tel est le cas, ses pouvoirs lui permettent de nous entendre. » L’effroi la gagnait alors qu’elle réalisait avoir évoqué Arthur potentiellement devant un vampire, elle devait chasser cette idée de son esprit. « Peut-être devrions-nous rentrer ? Nous reverrons-nous, Itziar ? » avait-elle demandé, voulant comprendre si elle souhaitait laisser le destin continuer à décider de leur sort.

La remarque de la jeune femme lui fait lever un sourcil interrogateur. Connaissait-t-elle le chasseur ? L’avait-elle déjà fréquenté ? Comment pouvait-elle savoir s’il était recommandable ou non ? Elle ne lui donnait pourtant pas l’impression d’être une jeune femme qui se frottait au danger ou aux chasseurs. Peut-être que les apparences étaient trompeuses. Peut-être qu’elle n’était pas si innocente qu’elle n’y paraissait. “Vous le connaissez ?” Demande-t-elle. Elle était curieuse et pas du genre à garder ses questions pour elle. Greta venait de lui tendre une perche et elle ne faisait que l'attraper D’autant plus que la jeune femme ne s’arrête pas là pour ce qui était de son intérêt pour le chasseur puisqu’elle la questionne ensuite sur une quelconque blessure de ce dernier. Itziar à l’impression de pouvoir lire de l’inquiétude, à la fois dans sa voix et sur son visage. A-t-elle une affinité particulière avec le Coventry ? Elle ne peut s'empêcher de sourire légèrement avant de lui répondre. “Il va bien … Enfin, de ce que je sais. C’était il y a plusieurs jours. Je ne l’ai pas revu depuis.” Elle ne le côtoyait que pour la mission qu’elle lui avait confiée. Rien de plus. Elle ne le connaissait pas et ils ne partageaient rien d’autre que ce marché entre eux. Alors, elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’il avait bien pu faire depuis qu’ils s’étaient quittés après la traque. La dernière fois qu’elle l’avait vu, cela dit, il semblait en pleine forme. Pas même une petite égratignure. Ce loup n’avait eu aucune chance de s’en sortir. Le combat avait été perdu d’avance. “J’imagine qu’il est chez lui ? Êtes-vous allée vérifier ? Sinon, je ne peux pas vous aider, je n’en sais rien.” Elle ne pouvait pas compter sur elle cette fois-ci. Ce n’était pas l’envie qui manquait pourtant. “Si je le croise, je peux lui dire que vous le cherchez si ça vous dit.” C’était le mieux qu’elle puisse faire à ce stade. Elle ne pouvait même pas promettre qu’une fois le message transmis, le chasseur viendrait à sa rencontre. Elle ignorait tout de leur relation.

Elle a également d’autres préoccupations, Itziar. Elle remarque cette jeune femme qui passe. Puis ce craquement de branches. Elle n’a pas envie d’être écoutée par des oreilles qui traînent. Elle sait à quelle vitesse les rumeurs se répandent actuellement et elle n’a pas envie de se retrouver au cœur de l’une d’elle, ni même d’attirer l’attention de quelconque personne malveillante. C’est pour cela qu’elle questionne Greta. La jeune femme semblant partager son avis. La vigilance semble de mise. “Oui, c’est bien ce qui m’inquiète. Ils sont extrêmement compliqués à repérer. D’autant plus dans cette obscurité.” Confirme-t-elle avec un hochement de tête. “Rentrer me semble plus sage en effet.” Déclare-t-elle avant de mettre la main dans son sac. Elle en ressort un petit carnet avec un crayon. Sur une page blanche, elle inscrit son nom et son adresse avant de détacher le bout de papier du carnet pour le tendre à son interlocutrice. “Si vous souhaitez qu’on se revoie. Ici, pas d’oreille baladeuse.” Dit-elle avant de commencer à s’éloigner. “Prenez soin de vous, Greta.” Lui adresse-t-elle avec un signe de main.

“Vous le connaissez ?” Greta avait hésité avant de répondre, continuant de fixer un point de l’horizon sans jamais détourner le regard. Elle réfléchissait à la meilleure réponse à avoir, alors que tout ce qu’elle disait pouvait être retenu contre elle et jouer en leur défaveur. Alors plutôt que de répondre, elle avait tourné la tête doucement, venant planter ses yeux azurs dans ceux d’Itziar avant de la laisser continuer. “Il va bien … Enfin, de ce que je sais. C’était il y a plusieurs jours. Je ne l’ai pas revu depuis.” Le sourire qui s’était dessiné sur ses lèvres avait probablement trahi ce qu’elle ressentait pour le chasseur, il était de toute façon évident qu’elle ne s’intéréssait pas à son sort pour un simple excès d’empathie. Qu’il était bon d’avoir de ses nouvelles au milieu de cette quête qui semblait sans fin et où elle devait se méfier de tout et de tout le monde. “J’imagine qu’il est chez lui ? Êtes-vous allée vérifier ? Sinon, je ne peux pas vous aider, je n’en sais rien.” Itziar continuait à essayer de lui tendre la main, de manière imagée cette fois, mais ses paroles avaient autant de puissance que la façon dont elle l’avait empêchée de sauter la dernière fois au bord de la rivière. Elle semblait être une personne aux grandes valeurs et la blonde pouvait comprendre pourquoi Arthur avait accepté de l’aider. Elle le méritait. Et tout s’enchaînait, il l’avait aidée, et elle lui avait sauvé la vie, un cycle qu’ils n’auraient pas pu anticiper mais qui faisait probablement partie de leurs destins. “Si je le croise, je peux lui dire que vous le cherchez si ça vous dit.” « Je vous remercie mais ce n’est pas la peine, nous nous retrouverons lorsque le moment sera venu. » avait-elle dit, restant mystérieuse et pourtant confiante que leurs chemins se recroiseraient lorsqu’ils réussiraient à accomplir ce qui les incombait.

Les deux jeunes femmes avaient de toute façon étaient interrompues par le pas lent d’une inconnue qui avait brisé le silence de la nuit. Elle était passée, doucement, leur adressant un rapide bonsoir avant de partir s’engouffrer dans la pénombre. Etait-elle humaine, était-elle une créature ? Elles ne pouvaient en être sûres. “Oui, c’est bien ce qui m’inquiète. Ils sont extrêmement compliqués à repérer. D’autant plus dans cette obscurité.” Il était vrai que la nuit rendait tout plus compliqué, notamment de repérer les caractéristiques de leurs ennemis. “Rentrer me semble plus sage en effet.” avait-elle confirmé alors qu’elles commençaient toutes les deux à s’inquiéter d’être devenues les proies des vampires. Elles couraient un danger et Itziar semblait moins encline qu’elle ne le disait à affronter l’adrénaline de trop près. Attrapant le papier qu’elle lui tendait, Greta lui avait adressé un sourire. “Si vous souhaitez qu’on se revoie. Ici, pas d’oreille baladeuse.” avait-elle dit. “Prenez soin de vous, Greta.” « A bientôt, Itziar. »