Ce n’était plus comme Agent Fédéral du FBI américain que Cade foula de nouveau le sol de l’Australie. Après le verdict catastrophique de la commission, beaucoup de questions avaient fait leur apparition dans sa tête. Il était resté dans sa chambre d’hôtel toute une journée, après avoir fêté son licenciement de plusieurs verres de whisky dans un pub miteux d’un petit quartier de Los Angeles. Et il avait réfléchit. Que lui restait-il ici ? Plus de famille, plus de boulot et des potes qui se comptaient sur les doigts d’une main…  Mais à Brisbane, qu’avait-il de plus ? Sa sœur semblait embarquée dans une vie qu’elle faisait mine de maitriser. Quant à ses deux frères, ils ne lui montraient pas plus d’intérêt, ayant acquis certaines habitudes pendant sa trop longue absence. Il y avait bien Oakley, et les quelques connaissances qu’il avait fait lors de ces deux dernières années, mais il n’était pas certain de tenir le coup comme ça. Il y avait Savannah… Allongé sur le lit, un bras derrière sa tête pour la soutenir, les mots qu’ils avaient échangés raisonnèrent comme un épouvantable écho et pire, ils se vérifiaient désormais. Cade soupira. Sa seule motivation depuis qu’on l’avait dépossédé définitivement de son badge et de son arme de fonction, c’était la bouteille qu’il avait acheté dans une petite épicerie du coin et qui était posée sur le seul et unique meuble de la chambre…

Los Angeles l’écœurait à présent et Grimes du se retenir plusieurs fois pour ne pas débarquer dans les locaux des fédéraux pour refaire quelques tronches. Quand il ouvrit la porte de son appartement à Brisbane, tout lui paru aussi vide et triste que son quotidien actuel. Il laissa tomber son sac dans l’entrée et sans grand entrain, il alla prendre une douche.

Rien n’y faisait, Cade ne parvenait pas à se débarrasser des images de ses hauts gradés qui lui avait annoncé que sa carrière était terminée. Il revoyait son paternel lui balancer qu’il n’était qu’un moins que rien et le regard apeuré de Joan qui découvrait de quoi il était capable. Il repensait à Savannah qui lui jetait son égoïsme à la figure et ça faisait mal à l’intérieur. Les semaines qui suivirent son retour en Australie n’apportaient rien d’inédit. L’ex agent fédéral s’était enfoncé dans un trou qui n’était rythmé que de sorties au bar, de rencontres volontairement infructueuses et d’un tempérament exécrable. Il envoyait tout valser, peu importe la personne ou l’intention et cela lui avait valu deux ou trois fins de nuit mouvementées. Ce qui le ramena à la surface ? Rien d’autre que Milena qui venait le chercher à l’hôpital après un accident de voiture qu’il n’était pas certain d’avoir provoqué. Dans la voiture de l’avocate, assit sur le siège passager, il l’avait écouté lui faire un sermon barbant qu’il prit en considération une fois qu’elle eut évoqué leurs souvenirs communs et heureux, et leurs deux petits frangins qui, même s’ils ne l’avouaient pas, avaient bien besoin de leur ainé. Milou était comme ça… si droite dans ses bottes que parfois elle en devenait une vraie source d’énergie. Et bien que le plus souvent, Cade cherche à se moquer d’elle, il donnerait et ferait n’importe quoi pour sa petite sœur. En rentrant chez lui, ce n’était pas à sa famille qu’il pensa en premier lieu, mais bien à Savannah. Fatigué de ces dernières noires semaines, il réalisait qu’il n’avait pas été tendre. Et surtout… qu’elle manquait à sa vie. Elle et sa légèreté, sa bienveillance, sa douceur dont il avait grand besoin en ce moment. Hésitant, il était assis au bord de son canapé et il tournait et retournait son téléphone portable entre ses mains. Un appel serait inutile, à l’instant où elle verrait son nom apparaitre, elle ne décrocherait pas, il en était persuadé. Grimes se sentait si penaud que débarquer chez elle serait gênant… et pourtant. Il fourra son portable dans sa poche et d’un pas décidé, il se mit au volant, s’engageant dans une manœuvre ferme et déterminée.

Cade serra les dents devant la porte de l’appartement de Savannah. Il s’arrêta là plusieurs secondes, ravalant sa fierté et tentant de ne pas trop anticiper ce qui allait être dit si par chance, elle était là et voulait bien le recevoir. Il posa la main sur le mur et son doigt vint lentement appuyer sur la sonnette. Peu présentable, il n’avait pas pris le temps d’enfiler autre chose qu’un vieux jean, un tee shirt et une veste noire. Sa balafre sur la joue témoignait de ces quelques derniers jours tumultueux qu’il regrettait déjà pas mal. Quand la porte s’entrouvrit enfin, Cade redressa la tête et rencontra le regard bleu de Savannah. La surprise s’était lue sur son visage et en réponse, l’ex agent fédéral esquissa un léger sourire sincère, presque soulagé de la voir. – Hey… souffla-t-il en craignant encore de voir la porte de refermer dans un excès de colère. Il n’en était rien. Ils étaient face à face, sans trop savoir par où commencer, tels deux gosses après une bagarre dans la cour de récréation. – Je peux entrer ? Il soutenait son regard, souhaitant lui communiquer qu’il n’était pas là pour en rajouter une couche… mais bien pour le contraire. – S’il te plait… Termina t-il pour supprimer toute hésitation qui pourrait fulminer dans son esprit.

Cette scène qui s'était déroulée sur le parking avait eu l'effet d'une bombe dans mon quotidien. Cade n'en avait pas conscience, mais cet échange, si virulent fût-il, m'avait bouleversé. Il m'avait bouleversé, de la meilleure façon qu'il soit, pour finalement me détruire, sans que je ne m'y attende. Le temps était pourtant parvenu à adoucir les angles, lui accordant la tolérance dont je n'avais pas fait preuve en débarquant dans ce café à ce moment là. J'avais été trop loin, bien trop loin. La déception avait été si forte qu'elle m'avait poussé à l'attaquer violemment par le biais de la parole, motivée par des émotions bien trop fortes pour pouvoir les contrôler. Je ne sais pas ce que j'attendais de lui à ce moment précis, peut être juste pouvoir déverser cette colère qui m'animait, et qui était surtout, et avant tout, provoquée par le silence dont il avait fait preuve à ce sujet. Je pensais que nous étions assez proches pour qu'il puisse vouloir aborder le sujet avec moi, et je constatais que nous n'étions pas du tout en accord finalement. Cette théorie fût confirmée lorsqu'il tenta de me rattraper, osant me faire passer pour une femme assez naïve pour oser croire encore aux belles histoires d'amour, me balançant, peut être involontairement, qu'il était bien loin de ça, et que j'étais assez stupide pour avoir donner oser croire un instant que notre relation pourrait peut être débouché sur quelque chose de plus concret. Blessée dans mon orgueil, cela avait suffit pour me faire quitter les lieux sans aucun regret...

Il avait hanté un moment mon esprit, bien plus de que raison, et ce, malgré le temps qui passe. La colère avait disparu pour laisser place à un sentiment bien plus douloureux, la déception amère qu'entrainait ce genre de chose, et ce manque puisant qu'il laissait par son absence. Le résultat d'une rupture qui ne pouvait même pas pouvoir prétendre à ce titre. J'avais laissé tomber les barrières les unes après les autres, sans deviner que la souffrance serait tout de même là au final, peu importe les règles qu'il avait instauré. J'avais songé à le contacter, m'excuser auprès de lui pour ces paroles blessantes que je lui avais adressé, soulager ma conscience, et m'assurer qu'il ne m'en tenait pas rigueur.Et puis...Je m'étais résignée à le faire. C'était probablement mieux que cette relation se termine dans ces conditions, permettant de s'en défaire plus rapidement et ainsi pouvoir passer à autre chose. Le temps parvient toujours à faire son travail, pas vrai?

Assise sur le canapé, la lumière de mon ordinateur illumine mon visage alors que mes doigts s’attèlent à écrire le prochain article. Un verre de vin pour accompagner le processus et stimuler mon imagination, je m'apprête à tremper mes lèvres lorsque la sonnette retentit, suscitant un arrêt soudain de toute action. Je n'ai pas souvenirs attendre de la visite ce soir. Je dépose l'ordinateur portable sur la table basse devant moi et me lève afin de me diriger vers la porte, m'attendant à y trouver un visage masculin... C'en est bien un, mais pas celui auquel je m'attendais. Cade Grimes se trouve devant ma porte, après presque deux mois de disparition, il est venu jusque chez moi. "Cade", son prénom m'échappe, comme si j'avais besoin de le dire à voix haute pour m'assurer qu'il soit bien là. Une sorte de flashback s'impose à moi durant quelques secondes, me rappelant nos derniers échanges, ces cris, ces regards foudroyants.... Les sourcils haussés, je décèle un sourire sur ses lèvres, semblant hisser le drapeau blanc et ainsi interrompre la guerre froide dans laquelle nous nous sommes plongés durant ces dernières semaines. Mon regard redécouvre les traits de son visage, et constate également les marques qui s'y trouvent."– Hey…" Mon coeur manque un battement, et toutes ces bonnes résolutions semblent être mise à mal maintenant qu'il se trouve devant moi. Je tente de me convaincre qu'il ne s'agisse là que d'un simple effet de surprise, rien de plus."– Je peux entrer ?" Etait-ce réellement une bonne idée? Pourquoi vouloir avoir cette discussion maintenant, au moment où j'étais parvenue à mettre un semblant d'ordre dans ma vie. Ma bouche s’entrouvre, incapable d'en laisser sortir un son pour autant. Une partie de moi a probablement besoin d'entendre la raison de sa présence, mais l'autre, elle, se montre bien plus sur la réserve, n'en oubliant pas le carnage qu'il avait provoqué en si peu de temps. La tornade Grimes était de retour...S'était t-il finalement souvenu de mon visage? Débarquait t-il dans un moment de faiblesse ultime? "– S’il te plait… ". Je déglutis avant d'oser hocher la tête, l'invitant à entrer en dégageant le passage d'un pas lent et incertain. "Vas y" Il passe la porte d'entrée, et je profite de devoir fermer cette dernière, et ainsi lui tourner le dos, pour fermer les paupières fortement, grimaçant, et me donner ainsi le courage pour la suite. Je fais quelques pas machinalement jusqu'au salon, me tournant vers lui après quelques secondes pour lui faire face " Qu'est ce qui t'es arrivé?" Demandais-je en désignant d'un signe de main son visage tuméfié.

Que penserait Milena quand elle apprendrait qu’il avait réussi à perdre ce pour quoi il avait toujours prétendu être le meilleur ?! Que dirait Leo quand il saurait qu’il avait été jugé coupable d’un homicide par une hiérarchie impitoyable et qu’il ne bosserait plus pour le FBI américain ?! Et son père… qu’en dirait-il ? Lui qui avait fondé beaucoup d’espoir sur son ainé et qui s’était confronté à son esprit rebelle et à ses choix décevant… Il aurait probablement sur lui un regard désabusé, presque moqueur en voyant qu’il n’était même pas capable de garder son boulot. Un travail plutôt honorable qui n’avait jamais trouvé grâce aux yeux du père Grimes, souhaitant léguer tout son savoir et tout son empire à son premier fiston. Le droit, ça n’avait jamais été le dada de Cade. Et son père avait trempé dans tellement de trucs louches que ça l’en avait dégouté pour de bon alors qu’il n’était qu’un adolescent aux tâches de rousseurs apparentes mais déjà doté d’un fort caractère qu’il était dangereux de contredire. Seul dans sa chambre d’hôtel de Los Angeles, peu après le verdict, Cade avait beaucoup songé à tout ça. Tout foutait le camp, il n’arrivait plus à rien. Si certains voyait ça comme la simple page d’un bouquin qui se tourne, lui voyait le côté défaitiste de la suite de l’histoire. Son arrivée à Brisbane relevait pourtant d’un optimisme à toute épreuve… mais les éléments s’étaient enchainés. Les cartes de ce château si fragiles qu’il était parvenu à ériger étaient tombées petit à petit, en quelques mois seulement.

Alors qu’il était bien décidé à tout envoyer balader et profitait de tout ce temps libre pour s’adonner à ce qui rythmait juste ses soirées auparavant, il en vint à une conclusion. Cette vie de débauche et cet état d’esprit ne pouvait pas prendre le pas... il ne le fallait pas. S’enfoncer dans l’alcool et les bastons improvisées pendant plusieurs semaines n’était pas représentatif de sa persévérance et de la combativité dont il faisait preuve quand les choses commençaient à aller mal. Ce soir-là, il avait le choix. Se rendre dans cet énième bar où l’attendrait peut-être une créature de rêve et un barman peu scrupuleux qui le servirait dés qu’il lèverait le doigt ou qu’il lui adresserait un signe de la tête. Ou bien laisser sa fierté sur son canapé et céder à sa plus grande envie depuis qu’il était rentré… voir Savannah. Lui parler. Essayer de lui expliquer qu’il regrettait depuis qu’ils s’étaient quittés devant le café. Tenter de lui dire qu’il avait besoin d’elle.

Un peu fébrile à l’idée qu’elle puisse ne pas lui ouvrir sa porte, Grimes sonna en préférant s’empêcher d’anticiper cette conversation à venir. Dans ces moments de sincérité complète, l’ex agent fédéral ne se reposait pas sur une poésie apprise par cœur. Ce soir, il avait besoin de savoir si elle lui laissait une chance de se racheter… Il ne tarda pas à rencontrer le regard bleuté de Savannah. Une expression de surprise se lisait sur son visage et il y avait de quoi. Presque deux mois s’étaient écoulés, beaucoup de choses s’étaient certainement produit depuis et sans doute avait-elle définitivement tiré un trait sur Cade Grimes. Quoi qu’il puisse se passer dans sa tête à elle, pour lui c’était comme une bouffée d’air et à la fois un énorme nuage qu’il lui était primordial de chasser. Il sourit, donnant tout de suite le ton de sa visite, et la supplia presque de le laisser entrer pour discuter. "Vas y" Finit-elle par lâcher au terme de quelques secondes tendues où elle aurait pu décider de ne pas lui accorder cette chance. Il franchit le seuil de la porte lentement, comme s’il découvrait son appartement pour la toute première fois. " Qu'est ce qui t'es arrivé?" Il s’était à peine retourné pour lui faire face que déjà elle mettait le doigt sur une question sensible. Ces dernières semaines avaient été témoin de choses dont il n’était pas du tout fier et qu’il aurait voulu mettre en arrière-plan si cette plaie n’était pas si visible sur sa pommette. Il s’en sentait déjà misérable à ses yeux. – Oh ça... juste une mauvaise aventure… Se rendant compte qu’il glissait sur la même pente qui avait été savonnée par les reproches véridiques de la jeune femme, il reprit. – J’ai fais une mauvaise rencontre y’a quelques jours…ça aussi ça m'a valu une correction. Toujours cette façon de minimiser les aventures qui ne lui étaient guère favorables, il espérait quand même ne pas avoir à s’expliquer davantage. Il se frotta les mains nerveusement, ne sachant pas trop par quel bout commencer, et il posa ses fesses sur l’accoudoir du canapé tout en lui faisant toujours face. – Écoutes Savannah… il baissa la tête, penaud, et la releva. – Je suis peut-être la dernière personne que t’as envie de voir…et c’est compréhensible. Il soutenait son regard, faisant preuve d’une honnêteté touchante. – J’ai merdé. Je sais que j’ai merdé. Son regard se perdit ensuite dans le vide, sur le parquet si régulier que ça lui en donnait la nausée. – Je pensais éviter tout c’que j’ai finalement gagné. Malheureusement c’est un peu une habitude chez moi. Un haussement de sourcils vint surligner ce jugement de lui-même qui n’était pas du tout glorieux. Il ne prononça plus un mot durant plusieurs secondes, et ses yeux se posèrent tendrement et fragilement sur elle. – J'regrette c’qui s’est passé, c’que j’ai pu te dire… Tu sais que je n’en pensais pas la moitié. Et tu m'as beaucoup manqué...

La façon dont s’était achevée l’année 2019 m’avait laissé un goût amer. Entre mes déboires personnels et familiaux, on peut dire que cette nouvelle année apparente, ne se déroulerait pas sous les meilleurs hospices. Si je suis assez vulnérable pour me laisser entrainer dans ce tourbillon qui cherche à m’attirer , de manière générale, vers un fond obscure et peu flatteur, je m’efforce de lutter cette fois-ci, relativisant par le cataclysme qui s’abat au dessus de la tête de la famille Williams, provoquant sans plus attendre une séparation brutale et déchirante de la troupe. La suite s’annonce compliquée, et inconsciemment, je m’impose ce rôle de conciliateur, espérant pouvoir un jour, réunir les deux aînés de la famille, ce qui est à l’heure d’aujourd’hui, véritablement impossible. et définitif Cette annonce est cependant parvenue à mettre en arrière plan cette histoire avec Cade. Aucune nouvelle depuis ce moment bouleversant que nous avions vécu autour d’une banale tasse de café. Est-ce si étonnant? Les mots furent à la hauteur de l’amertume ressentie. Je ne l’avais pas épargné, et contre toute attente, j’étais parvenue à obtenir une réaction de sa part, dure, mais peut être aussi méritée. Je n’avais pas cherché à savoir, je n’avais tenté de le comprendre, j’avais juste, exprimer, de façon égoïste, mon total désarroi. Et je n’avais pas pris la peine de m’excuser, malgré ces remords qui étaient apparus avec le temps. Peut être nous ressemblons nous bien plus que je ne saurais l’avouer.

Les semaines s’étaient enchaînées, et j’avais tenté de reprendre une vie normale. Je ne manquais pas de travail, et ce dernier m’avait permis de donner un coup de pouce pour cette volonté de renouveau. Tout s’était finalement un peu dissipé, éteignant peu à peu mes différentes émotions pour me concentrer sur le présent. Je ne peux pas prétendre à une vie exemplaire, loin de là, mais je m’efforce à la rendre plus simple en tout cas, comme avant. Mais c’était comment avant déjà? Je n’avais cependant imaginer un instant pouvoir revoir la silhouette de Cade devant ma porte ce soir, surtout après presque deux mois d’absence totale. Aucun appel, aucun message. Malgré les derniers mots échangés, ce n’est pas un visage rempli de colère et de rancune qui se charge de l’accueillir, mais bel et bien de surprise. Je suis incapable de savoir comment prendre cette visite, si un nouvel affront est à prévoir. Le sourire, bien que léger qu’il m’adresse dissipe instantanément mes doutes, et parvient d’autant plus à me perturber au plus profond de mon être. Est-ce une bonne chose que de vouloir avoir cette discussion maintenant? Pour lui, comme pour moi, j’en suis clairement incertaine. Je cède cependant, guidée par une voix intérieure que j’ai longtemps ignorer le concernant. Nous avons l’air de deux idiots alors que nous piétinons jusqu’au salon, incapable d’assumer visiblement nos erreurs.

La marque sur le visage de Cade va cependant relancer ma curiosité naturelle «-Oh ça....juste une mauvaise aventure...» . Une réponse évasive qui ne me surprend plus venant de sa part. «-J’ai fais une mauvaise rencontre y’a quelques jours...ça aussi ça m’a valu une correction.» Je soupire doucement , «Cade....» et baisse le visage, devinant qu’il fait probablement allusion à celle que je lui avais infligé, et dont je n’étais plus si fière avec le recul. Je n’en dis cependant pas plus, pas certaine de vouloir revenir là dessus et de relancer les hostilités. Mes bras viennent se croiser devant ma poitrine, laissant apparaître une certaine fragilité plutôt que cette apparence confiante qui me ressemble bien plus. «Ecoutes Savannah...» Entendre mon prénom à travers cette bouche suffit à accélérer mon rythme cardiaque, j’appréhende immédiatement la suite de cette conversation. Mon regard trouve la force de se poser sur son visage «Je suis peut-être la dernière personne que t’as envie de voir... et c’est compréhensible. » Mes lèvres se frottent l’une contre l’autre, m’empêchant ainsi de pouvoir le contredire sur ce point alors que mon regard se perd dans le sien, de façon profonde, et sans oser vaciller une seule seconde. « J’ai merdé. Je sais que j’ai merdé» Je hoche négativement de la tête. «J’suis pas la plus apte à pouvoir juger» avouais-je en soupirant une fois de plus. «Je pensais éviter tout c’que j’ai finalement gagné. Malheureusement c’est un peu une habitude chez moi». Le voir sous ce visage ne me rend pas jouissif, bien au contraire, et je devine un instant l’impact que mes mots ont pu provoquer avec le temps. Mon regard fuyant vient finalement retrouver le sien, me laissant entrevoir une affection particulière «J’regrette c’qui s’est passé, c’que j’ai pu te dire...Tu sais que je n’en pensais pas la moitié. Et tu m’as beaucoup manqué...» Ce simple aveu soulève mon coeur, bien plus qu’il ne devrait, je suis pourtant incapable de pouvoir lui donner une signification précise. Est ce ma simple présence qui lui manquait, ou uniquement ces moments délicieux que nous avions partager à travers quelques rapprochements physiques? Je baisse le visage, incapable de soutenir son regard sans éprouver certains regrets. «Je sais...Bien que tu n’sois malheureusement pas loin d’la vérité. » avouais-je avec un sourire ironique. Il avait raison, j’étais probablement bien trop exigeante, bien trop idéaliste, et c’est ce qui malheureusement nous éloigner l’un de l’autre, ce qui m’avait laisser enfiler ce costume d’éternelle célibataire pendant bien trop longtemps. «Et moi aussi. J’pense pas pouvoir prétendre te connaître, mais si j’suis bien sûr d’une chose, c’est que tu n’es pas comme ton père» j’en étais intimement persuadé, sans même connaître personnellement le principal intéressé. « Pour un égoïste, on peut dire que tu t’es montré plutôt présent pour moi lorsque j’en avais besoin» Un doux sourire sincère prend place sur mes lèvres, avant d’hausser les épaules. «On a juste pas la même vision de la vie» Un haussement d’épaules pour accompagner cette triste vérité qui m’avait éloigné de lui. Nous n’avions pas les mêmes attentes, cela ne nous avait cependant de nourrir une affection l’un pour l’autre. Et puis... ces mots qui me brûlent les lèvres viennent à m’échapper. «Et toi aussi tu m’as manqué». Il n’avait pas conscience jusqu’à quel point. Un moment qui semble m’échapper alors mon regard se balade à travers le sien de façon extrêmement troublante.

Le visage balafré de Cade traduisait parfaitement bien son état d’esprit actuel et les difficultés qu’il avait pu rencontrer ces dernières semaines. La perte de son boulot qui avait suivit les mots cinglants de Savannah l’avait bousculé dans une espèce d’ouragan d’où il lui paraissait compliqué de sortir. Rien n’était parvenu à égayer son teint blafard, noirci par les lumières tamisées des différents pubs qu’il avait fréquentés, dans l’espoir ou non de trouver quelques distractions dans un verre de whisky ou dans les jolis yeux d’une jeune femme. Tout lui avait semblé si fade. Était-ce juste parce qu’il ne pouvait plus prétendre occuper un poste digne au sein d’une institution reconnue et au service de la nation américaine ? Se sentait-il démunie de toute mission honorable qui faisait de lui l’homme qu’il était devenu, faussement égoïste et profondément préoccupé par le sort de pauvres victimes ? Ou bien s’agissait-il de son égo qui prenait un vilain coup dans la tronche ? « Tu n’est pas si différent de ton père ». Cette phrase raisonnait dans sa tête comme un écho détestable et moralisateur. Tout ce qu’il ne voulait pas, c’était ça… lui ressembler. Agir comme il avait pu le faire, perdre beaucoup en chemin et ne même pas s’en apercevoir. Au final, se retrouver seul avec lui-même et hait par son propre fils !

Il avait fallu cet accident de voiture pour en rajouter une couche mais surtout pour que Grimes réalise qu’il pouvait se bouger le train et changer quelques trucs pour l’avenir. Le discours sermonneur de Milena aura aidé mais c’était les yeux rivés sur cette lampe a moitié vacillante au plafond de l’hôpital que Cade comprit ce qu’il devait faire pour espérer voir la lumière au bout du tunnel. Devant la porte, l’ex agent fédéral s’interdit de penser à ce qu’il allait bien pouvoir dire à Savannah quand elle ouvrirait. Si par chance, elle lui permettait d’en placer une avant de refermer. Il fallait qu’il joue la carte de la spontanéité et que, pour une fois, il se livre véritablement quant à ce qu’il ressentait. Chose peu aisée pour quelqu’un qui a érigé une carapace aussi dure que la sienne autour de lui et qui laisse peu de place aux vrais sentiments. Il ne se mentirait plus à lui-même et lui mentirait pas non plus. Leur dernière conversation avait certes été houleuse, cela n’avait en rien altéré ce qu’il avait au fond. Cette attirance constante et toutes ces pensées qui lui soufflaient la même chose : Ne la perds pas !

Maladroit mais toujours aussi sûr de sa démarche, Cade finit par croiser le regard de Savannah et immédiatement, tout se réchauffa à l’intérieur. Comme une vague déferlante de réconfort alors qu’elle n’avait pas encore prononcé un seul mot. Elle le fit entrer, forcément consciente qu’ils allaient évoquer ce qui s’était passé et il n’attendit pas plus que ça. Il avait comme ce besoin de lui avouer ses regrets et l’envie qu’il avait de ne pas la voir s’éloigner de lui pour lui avoir dissimulé une partie de son passé. «J’suis pas la plus apte à pouvoir juger» Il la regardait et continuait de s’exprimer avec une honnêteté presque sensible, les fesses posées sur l’accoudoir du canapé. Il termina par ce ressenti si évident… Savannah lui avait manqué. Sa douceur dans les derniers moments difficile. Son sourire et sa répartie ironique, tout comme son regard bienveillant… des petits détails de personnalité dont il avait besoin pour pouvoir se relever et avancer. «Je sais...Bien que tu n’sois malheureusement pas loin d’la vérité. » Il baissa la tête, prêt à tout entendre et à la convaincre qu’il n’était pas un insensible. «Et moi aussi. J’pense pas pouvoir prétendre te connaître, mais si j’suis bien sûr d’une chose, c’est que tu n’es pas comme ton père» Elle décidait de revenir sur cette comparaison qui lui avait fait si mal et sur laquelle il était revenu, seul au-dessus de son verre. Il redressa la tête, et par ce regard il l’a remercia de ces mots. Au fond, il avait toujours su qu’elle ne le pensait pas puisque, de toute façon, elle n’avait eu que de petites informations au sujet du père Grimes… mais c’était bon de l’entendre revenir là-dessus…Il esquissa un faible sourire et hocha positivement de la tête. « Pour un égoïste, on peut dire que tu t’es montré plutôt présent pour moi lorsque j’en avais besoin» Egoïste.. peut-être que d’une certaine façon, il l’était.. Mais envers elle, il avait tenté de mettre ce défaut de côté. «On a juste pas la même vision de la vie» Ce constat sonnait comme une fatalité aux oreilles de Cade. Il planta ses yeux sur elle en réalisant qu’il s’agissait là de la conclusion qu’elle voulait donner à l’ébauche d’une relation déjà terminée. Il baissa la tête à cette pensée et regarda ses mains jointes involontairement. – Ouais… T’as sans doute raison… Ah bon ? Avait-il déjà oublié qu’il était là pour la convaincre de ne pas disparaitre de sa vie ?! Il subissait bien trop ces derniers temps pour la laisser dire ça et pourtant…c’était véridique. Jusqu’à présent, Grimes s’était refusé de s’imaginer dans une relation exclusive et officielle alors que Savannah était une jeune femme qui rêvait de s’épanouir pleinement avec un homme qui assumait. «Et toi aussi tu m’as manqué» Voilà quelques petits mots qui le rassurèrent un peu et illuminaient un peu l’impitoyable vérité qu’elle venait d’énoncer. Il redressa la tête et lu dans ses yeux qu’elle le pensait vraiment. Il se leva et s’approcha d’elle à pas lents. – Je peux faire mieux. Il s’approcha encore jusqu’à être tout près d’elle et il continua.  Sa main vint chercher la sienne pour un contact physique dont il avait besoin et qui, il l’espérait, sera reçu comme une réconciliation. – Savannah, je peux faire plus si tu m’en laisse l’opportunité… Il soutint son regard et termina dans un souffle. – J’ai besoin de toi…

Décidée à faire honneur à ces nouvelles résolutions en ce début d'année, j'avais tâché de mettre un peu d'ordre dans ma vie. L'équilibre sur lequel je me reposais, et qui s'avérait être un homme que je ne connaissais pas véritablement n'était plus, et je me retrouvais une fois de plus, une fois de trop, à fonder bien trop d'espoir dans une relation qui n'était le reflet que de ce que je voulais bien voir, quelque chose qui aujourd'hui encore, me faisait défaut. Lui n'avait pourtant pas menti, il n'avait jamais prétendu être l'homme idéal, prêt à satisfaire et combler mes moindres désirs, il n'avait fait que respecter ce plan qu'il s'était fixé, et qui ne demandait aucun investissement personnel, hormis celui de se livrer à l'autre sans retenue au cours de moments sensuels et de rien se promettre. Si la déception et cette amère douleur avaient rythmé les jours qui ont suivi, je n'étais pourtant jamais parvenue à regretter chacun d'entre eux. C'était probablement ce qui était le plus gênant dans l'histoire. Malgré une attitude qui ne méritait pas d'éloge et des mots fracassants, je n'étais pas parvenue à ressentir cette colère plus longtemps pour cet homme. Son absence à mes côtés avait cependant déclenché le processus de guérison, forcée de constater que je me devais de passer à autre chose, tout comme lui semblait le faire de son côté.

Malheureusement, cette visite impromptue vient mettre à mal ce semblant de stabilité qui m'est offert. Il débarque comme une fleur, oubliant probablement le temps qui s'est écoulé depuis nos derniers échanges, avec ce léger sourire persuasif sur le visage. Ma bonté, parce qu'il est plus difficile de mettre ça sur son dos, se charge de l'accueillir presque bras ouverts. Je devine pourtant les conséquences que pourraient découler de cette décision, qui est finalement loin d'être sage, mais qui est justifiée par cette envie de connaître les intentions de sa venue mais aussi, et surtout l'envie de m'assurer qu'il aille bien. A première vue, ça ne semble pas aller dans ce sens, la marque qui est logée sur son visage en est bien la preuve.Il va me l'avouer d'une certaine façon, sans que je ne cherche à lui soutirer d'information, défiant un comportement que je lui avais auparavant reproché, et qui expliquait pourtant la distance entre nous ce soir. Nous étions bien loin du moment où je prenais mes grands airs pour le bousculer, optant pour des répliques plus épiques les unes que les autres dans un état d'agitation absolu. Préférait t-il donc ma tolérance du moment? Qui pourrait s’apparenter à une sorte d'indifférence finalement, cherchant à lui prouver que ça ne me concernait effectivement pas. Je parviens même à lui trouver des excuses, lui apportant le réconfort qu'il était semble t-il venu chercher ce soir, après l'avoir, de façon certaine, cherché au fond d'un verre vide, accoudé au comptoir d'un de ces bars. Je pensais pourtant tout ce que je disais, bien qu'il ne méritait peut être pas autant de clémence, surtout après avoir déserté mon quotidien si longtemps. J'avais besoin qu'il sache que je le soutenais malgré tout, malgré un parcours rempli d'erreur. Et je n'en oubliais pas la priorité

"Comment s'est passé ta convocation?" demandais-je finalement, abordant le sujet qu'il n'avait peut être pas envie d'évoquer avec celle qui avait osé pointer du doigt son non professionnalisme de la sorte. J'osais espérer malgré tout qu'il ait pu retrouver ses fonctions, retrouver ce qui le rendait....lui. Sa présence sur le continent Australien n'était cependant pas de bon présage.


Ce temps passé loin de lui m'avait poussé à prendre du recul sur cette relation bancale que nous entretenions, et dans laquelle j'avais fondé bien trop d'espoir. Ce déchirement était inévitable, malgré un accord commun sur la direction à prendre, nous n'étions pas sur la même longueur d'onde, et la réalité nous avait rattrapé sans plus attendre. Cette remarque que je partage avec lui est une torture, au delà du fait qu'elle soit justifiée, elle vient cependant contrer ces moments bien trop agréables passés ensemble, parvenant à équilibrer la balance de façon équitable. "Ouais… T’as sans doute raison…"  Un léger souffle m'échappe, incapable de savoir s'il s'agit là d'une forme de soulagement ou d’exaspération. Dans un moment d'extrême faiblesse, je viens pourtant lui avouer qu'il a tout autant manqué à ma vie, sachant pertinemment que ce choix de lui en faire part est bien trop insensé et puéril pour une femme qui prétend être passé à autre chose. Mon regard se perd un instant dans le sien, alors que le simple fait qu'il quitte l'accoudoir du fauteuil vient à me mettre dans une situation inconfortable. J'avais deviné, j'avais su exactement ce que ça entrainerait, et voilà que je me retrouve à détourner l'attention face à une approche que je redoute bien trop. "– Je peux faire mieux."  Je baisse les yeux vers le sol un instant, forcée de retrouver bien vite cette silhouette qui se dresse devant moi. Mieux? Du genre éviter de tuer des gens sans aucune implication personnelle? Oser me confier ses plus grands secrets? Ou tenter de m'offrir plus quelques délicates attentions sous la couette? Sa main effleure la mienne, ses doigts cherchent les miens, me coupant littéralement le souffle face cette vague que ça provoque en moi de façon instantanée et certaine. "– Savannah, je peux faire plus si tu m’en laisse l’opportunité…"Mon regard fuyant ose finalement affronter le sien, retrouvant bien assez vite ces raisons pour lesquelles il m'avait été difficile de l'oublier. "Faire plus?" demandais-je en haussant les sourcils. "Plus que débarquer chez moi un soir, après deux mois d'absence totale, juste parce que tu n'as pas trouvé de quoi de mettre sous la dent ce soir?" Un léger sourire ironique s'empare de moi, un ton qui se veut plutôt doux, malgré cette sorte de reproche. Comment suis-je censée prendre son retour? Peut être que je cherchais simplement à le garder à distance, plutôt que de me laisser complètement aller. J'avais tellement espéré pouvoir entendre ces choses auparavant, elles auraient peut être changé notre relation actuelle, le fait est que Cade est aussi indécis et complexe que moi, et que j'en venais à douter de ses réelles motivations. Il ne pouvait pas débarquer ainsi et espérait qu'avec quelques phrases bateaux il retrouverait ce à quoi il avait lui même renoncé l'autre jour sur le parking.   "– J’ai besoin de toi…" Je suis littéralement submergée, sûrement encore trop naïve pour oser croire à la sincérité dont il fait preuve, et mon regard l'implore presque d'abréger cette souffrance qu'il m'impose sans même le savoir. Je n'ai pourtant qu'une envie, venir m'enivrer de cette odeur qui semble se jouer de moi par cette infime distance qui nous sépare, qui serait source de réconfort et de bien-être absolu. J'ai envie de me perdre de façon démesurée dans ses bras, et avoir cette sensation que tout ça était bel et bien réel, et qu'il ne jouait pas... "Cade..."soufflais-je faiblement, luttant amèrement contre cette force gravitationnelle qui me pousse à briser la distance entre nous. "..J'vois quelqu'un" osais-je lancer alors que je suis à deux doigts de sombrer, comme si ma conscience me rappeler à l'ordre. Mon regard est planté dans le sien, observant la moindre réaction de sa part, qui pourrait ou non, venir confirmer sa sincérité. J'imagine pourtant que ce moment de flottement qui nous rappelle de façon certaine des moments enivrants va venir se briser par une telle annonce.

La présence de Cade chez Savannah ce soir là était la réponse aux quelques dizaines de questions que l'ex agent fédéral avait pu se mettre en tête ces derniers jours. Après leur dernière conversation houleuse, la commission qui l'avait mis sur la touche et les allers et venus dans les pubs miteux pour tenter de se consoler de ce mal être, il avait finit par regarder les choses en face. Oui, il en prenait un sacré coup avec la perte de son poste, la seule chose qu'il était persuadé de savoir bien faire dans sa vie, mais il ne voulait pas se réfugier dans les bras de la première jolie jeune femme qui lui ferait les yeux doux, attablée dans un coin sombre d'un pub. Quoi qu'il ait pu essayer de contrer, ses sentiments pour Savannah étaient indubitables. Elle avait rendu son séjour à Brisbane tellement plus facile et agréable. Elle lui avait permit de s'éloigner de ses foutus dilemmes familiaux et d'éviter de trop penser à cette affaire de meurtre dont il était accusé par sa hiérarchie. La belle blonde avait, depuis quelques temps maintenant, dépassé le simple statut de plan cul divertissant l'espace d'une ou deux nuits. En fait... Grimes pensait à elle sans arrêt et il se l'avouait en venant jusqu'ici. Il laissait tomber toutes les barrières. Dans cette période noire, il avait tout à gagner, non ?

"Comment s'est passé ta convocation?" Puisque la sincérité triomphait ce soir, et que Savannah savait désormais tout à ce sujet, Cade se devait de lui parler. Il ignorait encore si son dessein était de lui mettre en pleine face qu'il l'avait bien mérité, ou bien si elle allait compatir un peu tout en sachant qu'elle connaissait l'importance de ce boulot pour lui. Grimes haussa les sourcils, et cet air affligé sur son visage trahissait déjà le résultat de la commission. - Très mal. Il n'y allait pas par quatre chemins. Il baissa la tête et regarda ses mains qu'il frotta doucement et nerveusement sur son jean usé. - Ils ont jugé que je n'étais pas apte à reprendre mon poste. J'ai perdu mon boulot.... Et ma dignité avec. Il avait relevé les yeux sur elle et tentait de chasser les images de ces connards qui avaient préféré lui retirer son badge sans scrupules plutôt que de regarder la totalité de sa carrière et de s'y référer pour lui donner une autre chance. Le plus difficile à avaler, c'était pourtant l'absence de Joan ce jour là. Elle avait pourtant été convoquée pour apporter un témoignage sur le comportement de Cade, mais il n'avait pas vu l'ombre de ses cheveux bruns, ni même entendu le bruit de ses talons dans le couloir du grand bâtiment. Rien. Pas un message. Pas un mot capable de le sortir de ce merdier dans lequel il se trouvait depuis deux ans. Cade esquissa finalement un léger sourire en direction de Savannah. - Ça va. Dans ma tête, j'ai déjà pointé mon flingue une centaine de fois sur chacune de leurs têtes mais.. tu vois.. Il ne s'est rien passé d'autre, parce que je n'suis pas un meurtrier. Non Grimes. Ce n'était pas le moment de plaidoyer en ta faveur ! Tout avait été déjà dit à Los Angeles mais au fond de lui, il voulait sans doute convaincre Savannah qu'il n'était pas le type dangereux qu'elle avait aperçu sur les quelques lignes de cette convocation.

Maintenant il avait à cœur d'oublier cette mésaventure professionnelle, mais plus au travers de verres de whisky. Cade s'était approché d'elle et lui avouait indirectement qu'il était prêt à abandonner toutes ces règles qu'ils s'étaient fixés pour pouvoir la serrer dans ses bras et trouver cette sérénité qu'elle lui apportait habituellement. Si elle lui pardonnait son passé, sa conduite et ses manières parfois trop ancrées en lui, ils pourraient voir plus loin que de simples parties de jambes en l'air chez l'un ou chez l'autre. Ces dernières semaines, il avait réalisé qu'il ne le voulait pas seulement, mais qu'il en avait besoin. "Faire plus? Plus que débarquer chez moi un soir, après deux mois d'absence totale, juste parce que tu n'as pas trouvé de quoi de mettre sous la dent ce soir?" Savannah n'avait rien perdu de sa répartie et de son intégrité. Elle se trompait sur le but de sa visite. Cade posait sur elle des yeux ronds bourrés d'une délicatesse et d'un désarroi qu'elle pouvait pourtant discerner. - Si c'était ça que je cherchais, crois moi, je n'aurais pas pris autant de peine... Il lui aurait suffit d'enfiler son costume de Dom Juan et de visiter cette boite de strip tease à l 'entrée de la ville. Rien de plus facile. Mais Cade avait décidé de miser sur l’honnêteté. Envers Savannah, et aussi envers lui même. – J’ai besoin de toi…

Il avait prit sa main avec douceur, espérant qu'elle cesse de croire que Cade et sentiments ne puissent pas cohabiter dans la même phrase. Il avait un genoux au sol et plus rien à perdre. "Cade..." Il planta ses yeux verts dans ses iris bleus, et elle s'apprêtait à le mettre à terre. "..J'vois quelqu'un" Ces quelques mots ne voulaient pas dire grand chose. Et à la fois, ils étaient lourds de sens. Ils étaient fait pour l'éloigner, pour mettre cette distance entre eux que Grimes ne connaissait pas. Ils lui firent mal mais ils étaient recevables. Savannah n'était plus ouverte à quoi que ce soit. Elle fermait les portes. Cade hocha de la tête, presque involontairement, encaissant comme il le pouvait cette nouvelle qui lui donnait, encore une fois, une leçon sur ses choix précédents. Il baissa les yeux sur sa main qu'il tenait toujours. - Ouais... Murmura t-il pour lui même. Cela devait arriver. Quel con ! Comment avait-il pu croire qu'après ce qu'elle avait su et après deux mois d'absence, elle l'attendrait bien sagement dans son canapé avec un verre de vin et des petits fours ?! Il se blâmait pour n'avoir pas saisit sa chance immédiatement et il la blâmait elle, également. Si elle s'était attaché à quelqu'un d'autre, c'était qu'il ne signifiait pas tellement. Car si elle lui reprochait d'avoir été absent, il pouvait en dire autant. Il n'avait reçu aucun appel, aucun message... C'était comme si elle avait tourné la page, trop rapidement. Dans sa lancée, l'ex agent fédéral  qui se prenait un ultime uppercut vint déposer un baiser sur la main de Savannah en affrontant son regard. - J'espère que ce n'est pas flic. Ces types là sont pas très fréquentables ! Un peu d'ironie pour dissimuler sa blessure. Cade, lâcha sa main, baissa les yeux et se dirigea lentement mais sûrement vers la porte d'entrée, dos à elle. Saisissant la poignée, il s'arrêta là et se retourna. - Je vais rester sur Brisbane alors... si tu as besoin de quoi que ce soit... Il ne lui était plus utile de considérer sa vie à Los Angeles bien qu'il n'était pas certain de ce qu'il allait faire ici à présent. Sans doute essayer de digérer en s'épargnant un autre accident. Et s'il pouvait éviter de croiser Savannah et son nouveau mec... ce serait encore mieux. Le cœur lourd, Grimes ne regrettait pourtant pas une seule seconde de s'être livré à elle.