(c) harley

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@RUBEN HARTFIELD & RORY

Ça ne devrait pas le tracasser autant, d'inviter Ruben à le rejoindre au parc pour refaire le monde autour d'un café. Parce que ça n'avait rien d'inhabituel pour les deux amis, de se retrouver sur leur temps libre pour prendre des nouvelles l'un de l'autre, discuter de leur travail respectif et échanger quelques confessions sur leur moitié. Pourtant Rory n'avait jamais autant appréhendé d'envoyer un simple sms, pétri d'angoisse à l'idée que tout ça soit peut être une mauvaise idée. Depuis les événements survenus au domicile de Ruben et Grace, depuis ce repas cauchemardesque où certaines vérités avaient été dites, il craignait en effet de se retrouver à nouveau face à celui qu'il considérait pourtant comme l'un de ses plus proches d'amis. Parce qu'il ne savait simplement pas comment se comporter depuis que les mots de sa sœur n'avaient de cesse de résonner dans son esprit, lui rappelant la souffrance et la confusion qu'ils avaient causé tout autour de la table. Apprendre qu'elle avait avorté de l'enfant qu'elle attendait n'aurait pas pu lui causer de plus grand choc, à lui qui savait tout de son désir profond de devenir mère un jour mais qui bataillait aussi avec son propre désir de fonder une famille. C'était purement inimaginable, de l'apprendre de cette manière, et Rory avait eu besoin de plusieurs semaines pour digérer les choses et simplement attendre d'être prêt à entendre les explications de Ruben. Il le lui avait promis, lorsque l'acteur avait quitté ce dîner avec l'horrible impression que quelque chose s'était brisé entre son ami et lui. Il l'écouterait, s'il éprouvait l'envie de lui donner sa version de l'histoire, cette fois sans que personne n'intervienne. Il lui accorderait le bénéfice du doute, s'il estimait qu'il n'avait pas toutes les cartes en main pour comprendre la situation et se mettre à sa place, là où Grace avait laissé planer le doute quant à sa responsabilité dans cette histoire et montré une rancœur que Rory ne lui avait pas souvent connu. Quand bien même il n'était pas certain de pouvoir comprendre le rôle que le médecin avait pu jouer dans la décision qui avait brisé sa sœur, il lui devait au moins d'écouter ce qu'il aurait à dire. Leur amitié comptait bien trop pour qu'il lui refuse ce droit.

Oates Park n'était pas exactement la porte à coté lorsqu'on vivait en bord de mer, mais la route entre son domicile et Logan City lui avait au moins permis de mettre un peu d'ordre dans ses pensées. Il avait prévenu Swann qu'il s'absenterait pendant au moins les deux prochaines heures et l'avait laissé en compagnie de leur chiot, petite boule de poils affectueuse et toujours en demandes de plus de caresses. Son fiancé savait quelle importance revêtait cette rencontre à ses yeux et combien il avait besoin de s'entretenir avec son ami, pour avoir été le témoin de sa profonde tristesse après le dîner de l'autre soir. Swann savait que sa famille représentait tout pour Rory, de même que ses amis à qui il serait bien incapable de tourner le dos au premier impaire. C'était d'autant plus vrai pour celui qui l'avait lui-même soutenu à l'époque où sa vie se voulait bien plus compliquée. « Ruben. » Assis sur un banc au milieu du parc, Rory releva les yeux dans sa direction lorsque le jeune médecin apparut, ses lèvres dessinant aussitôt un sourire timide. Ils auraient du pouvoir se saluer avec bien plus de chaleur et d'enthousiasme, mais au vu des circonstances ils n'étaient qu'à peine restés en contact au cours des dernières semaines. Rory avait finalement pris sur lui pour lui envoyer ce message, désireux de briser la glace. « Merci d'être venu. » C'était plus simple de se retrouver ici plutôt que chez l'un ou chez l'autre, pour des raisons qu'il n'avait sans doute pas besoin d'énumérer. Ruben était certainement tout aussi conscient que lui qu'il valait mieux que Grace soit tenue à l'écart après l'autre soir, aucun d'entre eux ne voulant compliquer davantage les choses en se rencontrant juste sous son nez. Elle avait toutes les raisons de mal vivre la situation et tout ce que souhaitait désormais Rory, c'était y voir plus clair. « Je t'ai pris un café avant de venir, je me suis dit que t'en aurais peut être envie. » Il désigna les deux gobelets qu'il était parti acheter dans un café proche du parc, lui tendant l'un d'eux avant de resserrer nerveusement ses doigts autour du sien. Un café ne suffirait pas à délier les langues, aujourd'hui, mais c'était un début. Ruben était venu et ils pouvaient au moins tenter de se parler comme ils en avaient toujours eu l'habitude. Tout ne pouvait pas avoir changé.

« C'est ici qu'on se retrouvait toujours pour courir, avant. » Il souffla après plusieurs secondes, ses yeux posés dans le vague tandis qu'il effleurait le sujet avec une prudence nouvelle, inhabituelle lorsqu'on connaissait les deux amis. Ils connaissaient bien cet endroit pour l'avoir souvent arpenté ensemble et ça n'était pas sans raison s'il l'avait fait venir jusqu'ici. Quelque part, Rory espérait probablement renouer avec certains souvenirs, du temps où bien des choses se voulaient plus simples. Du temps où rien ne lui semblait pouvoir fragiliser l'amitié indéfectible qui l'avait toujours lié à Ruben. « Je me rappelle d'une fois où j'avais un peu trop forcé sur mon genou blessé et où tu m'avais aidé à marcher jusqu'à ta voiture avant de me raccompagner chez mes parents. » Repenser à cette anecdote aurait du lui inspirer un sourire nostalgique, mais aujourd'hui le cœur n'y était pas vraiment. Il ne lui avait pourtant pas demandé de le rejoindre pour rester assis en silence à contempler l'horizon. Rory avait envie de faire un pas vers lui, quand bien même c'était bien plus compliqué qu'il l'aurait cru. « Mon père m'aurait passé un savon si t'avais pas été là. Au lieu de ça, il a fait comme si de rien était et il t'a proposé de rester dîner avec nous. Parce que t'as toujours été comme le troisième fils qu'il aurait voulu avoir, et qu'à cette époque-là j'étais très loin de répondre à ses attentes en la matière. » Et Rory ne le disait pas avec la moindre rancœur, ayant simplement accepté depuis longtemps que ses choix avaient souvent été contestés par son père. Après la blessure qui l'avait contraint à arrêter le football, il n'avait eu de cesse de le décevoir parce qu'il n'avait pas emprunté les chemins qu'il aurait désiré pour lui. Devenir acteur était bien loin de contenter les exigences de ses parents, mais c'est son père qui avait toujours montré le plus d'hostilité face à cette perspective. Peu importe le nombre de films qu'il pourrait bien tourner et le nombre de récompenses qu'il pourrait se voir décerner, il manquerait toujours quelque chose aux yeux de son paternel. Une brillante carrière comme médecin, par exemple, l'aurait rendu profondément fier de son fils. « Pour moi aussi, t'as toujours été comme un membre de la famille. C'est pour ça que je comprends pas ce qui a pu se passer pour qu'on en arrive là. Entre toi et Grace. Entre toi et moi. » Ses mots étaient remplis de regrets bien plus que de reproches, quand bien même son regard ne parvenait pas tout à fait à soutenir le sien. Ça non plus, ça n'avait rien d'habituel pour les deux amis habitués à tout partager depuis le premier jour, depuis que Ruben était devenu cette présence rassurante et inestimable dans la vie de l'acteur. Leur amitié n'avait jamais connu de traversée aussi mouvementée que celle-ci, et ça lui faisait craindre que les choses ne redeviennent jamais tout à fait comme avant. « Est-ce que tu m'en aurais parlé, si elle l'avait pas fait ? Est-ce que tu m'aurais dit que tu voulais pas de cette grossesse et que c'était le sujet de tensions entre ma sœur et toi ? » A tel point que Grace l'avait interrompue quand c'était probablement la dernière chose qu'elle était capable d'endurer, après avoir si longtemps souhaité fonder une famille. Lui aurait-il seulement dit que les choses allaient bien plus mal entre sa fiancée et lui que Rory n'aurait jamais pu le suspecter ? Ou aurait-il gardé le secret des mois durant, ne laissant rien paraître au prochain dîner de famille ou à son propre mariage, lorsqu'il aurait prononcé ses vœux avec le sourire et sans jamais que Rory puisse soupçonner quel drame se nouait en réalité dans l'intimité du couple ? Grace avait peut être choisi le pire moment pour confier ce qu'elle avait sur le cœur, mais elle avait parlé là où Ruben aurait peut être préféré se murer dans le silence. Des secrets, Rory n'en voulait plus entre eux.

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@rory craine

lieu: oates park, logan city.

La loi de Murphy affirmait que s'il existe au moins deux façons de faire quelque chose et qu'au moins l'une de ces façons peut entraîner une catastrophe, il se trouvera forcément quelqu'un quelque part pour emprunter cette voie. C’était là une théorie qui n’était en rien prouvée, plus utilisée en guise d’adage et de ligne de conduite qu’avec sérieux par les hommes de sciences. Ruben le premier n’y croyait pas, tout comme il avait supposément du mal à croire certaines choses tant qu’il n’en avait pas eu de preuve tangible. Il ne savait pas exactement si cela lui venait de l’école de médecine ou de convictions qui lui étaient propres, internes depuis des années, mais il avait toujours été formel sur l’idée de préférait les preuves aux croyances. Quitte à faire hausser quelques sourcils de surprise dès maintenant, ce principe là s’appliquait aussi à ses yeux pour la religion. Ce n’était pour aujourd’hui aucun domaine de ce type qui serait mis en avant, puisque si Ruben se mettait à reconsidérer l’existence de la loi de Murphy, c’était pour son usage personnel et pour sa vie privée. Car s’il y avait bien une situation, un contexte dans lequel il avait emprunté la voie qui menait à la catastrophe, c’était ces derniers temps. Sinon, Rory n’aurait pas mis des semaines avant de le contacter pour lui proposer d’aller prendre ce café.

Craine lui avait promis de le contacter, et il l’avait fait. Cela avait usé une bonne partie de la patience de Ben, ne comprenant pas pourquoi il ne désirait pas plus plutôt arracher le pansement d’un coup sec pour ne plus avoir à y penser, à en parler, mais son ami avait pris un tout autre chemin. Après le diner catastrophe - comme il s’amusait à l’appeler dans son esprit - qui s’était déroulé sous son propre toit, Ruben avait du mettre à la porte ses invités lorsque sa fiancée, qui l’était encore miraculeusement à l’heure actuelle, leur avait révélé qu’elle ne portait plus le futur enfant du couple. Si l’explication s’était arrêtée là, les choses auraient peut-être pu tourner presque de façon correcte, mais elle avait statué à haute voix que tout ceci était la faute du docteur Hartfield et c’était là que la tempête s’était levée. Il avait vu dans le regard des invités qu’une ombre s’y imposait, et que ce n’en était pas une de tristesse et de sympathie pour Ruben; mais celle qui se rangeait du côté de Grace sans avoir entendu ce que l’accusé avait à dire pour sa défense. Même si Rory avait effectivement finir par le contacter pour qu’ils puissent discuter, il avait bien vu que ça avait été la même chose du côté de son ami. Et même s’il comprenait que Craine prenne d’instinct le parti de sa soeur, cela laissait tout de même un goût amer dans le fond de la bouche de Ben; jamais ils ne s’étaient retrouvés dans cette situation d’opposition depuis qu’ils se connaissaient, et il n’avait jamais eu l’intention que cela commence alors qu’ils entraient tous deux dans la trentaine.

« Ruben. » - « Salut Rory. » Le jeune acteur lui avait donné rendez-vous dans Oates Park, et Hartfield lui avait dit de nommer l’heure qui lui convenait et qu’il s’arrangerait autour pour se montrer et être présent. Il avait tout de même compris qu’il était celui devant fournir les efforts, au moins sur les derniers mètres qui les séparaient désormais, afin d’être entendu. Et ça, justement, il l’entendait; il avait vu la profonde tristesse qui avait envahi les yeux de Rory lorsque la nouvelle était tombée comme un cheveu sur la soupe. Il connaissait aussi plus que parfaitement que la construction d’une nouvelle famille était un sujet délicat pour lui, le touchant particulièrement. « Merci d'être venu. » En guise de réponse, il se contenta d’un petit hochement de tête, alors qu’il finit par s’asseoir sur le banc aux côtés de son ami. Ce début d’échange était des plus éloignés de ce à quoi ils avaient l’habitude, et Rory aurait voulu lui serrer la main en guise de salutations que cela n’aurait même pas étonné Ruben dans l’état actuel des choses. Dire qu’en temps normal, si les tensions n’étaient pas présentes, ils se seraient salués avec un accolade comme s’ils ne s’étaient pas vu depuis des semaines - ce qui aurait été effectivement le cas. « Je t'ai pris un café avant de venir, je me suis dit que t'en aurais peut être envie. » C’était plutôt d’un remontant alcoolisé type Scotch dont Ruben aurait besoin en cet instant, et afin d’affronter la suite de cette conversation, mais il étira un maigre sourire en première instance de réponse à l’attention de Rory. « C’est une bonne idée, merci. » Le jeune homme savait parfaitement qu’il ne dirait jamais non à un café de toutes façons, ils avaient passé assez de temps ensemble, à se côtoyer, pour que cette vérité là soit ancrée dans son esprit sans soucis. Tant de temps passé ensemble pour se retrouver sur un banc au milieu d’un parc impersonnel lorsqu’il fallait aborder des sujets qui l’étaient au plus haut point. A quel moment ils avaient tourné comme ça, hein ? Comment était-ce possible que le vent ait tourné dans ce sens dans leur relation ?

« C'est ici qu'on se retrouvait toujours pour courir, avant. » Ce fut le signal pour Ruben de ne pas piper mot, de laisser le temps et l’espace à Rory pour qu’il puisse s’exprimer comme bon lui semblait. « Je me rappelle d'une fois où j'avais un peu trop forcé sur mon genou blessé et où tu m'avais aidé à marcher jusqu'à ta voiture avant de me raccompagner chez mes parents. » Un rire soupiré se fit entendre côté Hartfield, alors qu’il se souvenait parfaitement de cet épisode. Il n’était pas encore diplômé à l’époque, mais avait déjà assez de connaissances dans le domaine médical pour savoir que le jeune homme avait surtout besoin de repos. « Mon père m'aurait passé un savon si t'avais pas été là. Au lieu de ça, il a fait comme si de rien était et il t'a proposé de rester dîner avec nous. Parce que t'as toujours été comme le troisième fils qu'il aurait voulu avoir, et qu'à cette époque-là j'étais très loin de répondre à ses attentes en la matière. » Ruben avait usé de son charme de façon presque honteuse pour négocier la situation avec le patriarche Craine, afin d’être sûr que Rory ne se retrouve pas dans une situation encore plus embêtante qu’il ne l’était déjà, et cela avait fonctionné à merveille. Il avait toujours eu un don pour se faire adorer des parents des autres, en plus des siens bien sur, et avec les Craine cela s’appliquait depuis le premier jour où il s’était présenté sur le pas de leur porte, une quinzaine d’années auparavant. Effectivement, ce soir là comme tant d’autres, c’était à diner que Ben avait été invité et non à quitter les lieux - le petit prodige que Craine sénior s’amusait à l’appeler de temps à autres, et ce n’était pas l’égo du principal concerné qui allait se plaindre de quoi que ce soit. « Pour moi aussi, t'as toujours été comme un membre de la famille. C'est pour ça que je comprends pas ce qui a pu se passer pour qu'on en arrive là. Entre toi et Grace. Entre toi et moi. » Alors, ils entraient enfin dans le vif du sujet. Si les mots de Rory n’avaient été en rien emplis de rancoeur ou de reproches, peut-être que la suite n’allait pas s’annoncer aussi rose qu’il l’aurait espéré, qu’ils l’auraient espéré en réalité. Depuis le premier jour, il était vrai que les deux hommes s’étaient assez rapidement considérés comme des frères, tant leur lien s’était créé pour ne jamais se défaire ni s’entacher; et Ruben avait longtemps cru que rien ne pourrait amener à ce résultat de toutes façons, puisque la pire trahison qu’il aurait pu faire Rory n’était pas au courant qu’elle avait déjà été réalisée et que ce n’était même pas de cette dernière qu’ils s’apprêtaient à discuter.

Le regard de Hartfield ne lâchait pas les traits du visage de son ami, assis à ses côtés, bien qu’il soit parfaitement au courant que la suite de cette conversation ne serait en rien une partie de plaisir. Peut-être qu’ils étaient sur le point d’exposer des points de vue tellement divergeant qu’ils ne sauraient revenir de cette confrontation, mais Ruben ne comptait pas changer de façon de voir les choses pour les beaux yeux de Rory. Il ne l’avait pas fait pour Grace, ce n’était pas un autre Craine qui réussirait cet exploit - ni aujourd’hui, ni avant un bon bout de temps. C’était peut-être problème de cette situation, d’ailleurs, qu’il soit autant borné sur la question; mais c’était aussi cette façon de faire qui l’avait poussé loin dans sa vie, qui lui permettait aujourd’hui de toucher du bout des doigts son rêve. Il ne laisserait rien, ni personne, l’empêcher d’accéder à ce qu’il enviait tant. « Est-ce que tu m'en aurais parlé, si elle l'avait pas fait ? Est-ce que tu m'aurais dit que tu voulais pas de cette grossesse et que c'était le sujet de tensions entre ma sœur et toi ? » Alors, un soupire échappa en premier lieu à Hartfield. Il voyait bien que là où il cherchait à exprimer ses pensées, Rory n’arrivait pourtant à soutenir son regard alors que le coeur du sujet était abordé. Dans une situation normale, il ne se serait pas gêné pour souligner ce détail; aujourd’hui, la balle n’était pas dans son camp et il se devait de faire attention aux faux pas. En somme: il allait un minimum devoir marcher sur des oeufs et il ne supportait pas ça. « Je te l’aurais dit, oui. » Cependant, il s’accrocherait à la vérité et seulement cette dernière, tant que le sujet abordé n’était pas celui de l’idée d’aller voir ailleurs - là, il nierait et démentirait la moindre rumeur si une existait. « Quand, j’en sais rien par contre. » Ce n’était en rien un manque de volonté de sa part, pour le coup. « J’attendais juste de savoir quand et comment Grace voulait en parler autour d’elle, après avoir annoncé surement trop rapidement qu’elle était enceinte, que cet enfant ne verrait jamais le jour finalement. » Il tentait s’insuffler un peu de chaleur dans ses paroles, pour ne pas donner l’impression de parler de cet être humain comme d’une transaction bancaire qui aurait mal tournée. « Crois moi quand je te dis que j’aurais mis mon veto une fois de plus si elle m’avait dit qu’elle voulait faire ça comme ça s’est passé ce soir là chez nous. » Le brun retint un petit rire sarcastique qui aurait fait tâche dans le décor, alors qu’il s’adossa complètement contre le banc pour laisser à son tour son regard divaguer au delà de leur simple banc. « J’aurais fait en sorte que ce soit amené plus en douceur. Pas que ça aurait changé la finalité de la situation mais… Ouais. » Au moins, il aurait tenté de mettre un peu plus de formes pour annoncer le fond.

Ruben laissa ensuite un petit silence s’installer entre eux, essayant de mettre en ordre ses pensées et ce qu’il souhaitait expliquer à Rory par la suite. Car même si le contenu de ses paroles serait dans tous les cas le même, il pouvait faire en sorte que cela ne soit pas une condamnation directe de la part de son ami lorsqu’il aurait terminé de lui expliquer son point de vue. Il ne se défilait pas; il arrangeait simplement la situation à son avantage autant que possible. « Lorsqu’on a commencé à se fréquenter pour de vrai, Grace et moi, j’ai tout de suite été clair avec elle sur le sujet des enfants. Ce n’était pas ma priorité, et elle l’avait entendu. Même: elle s’était rangée à mon avis, au début. » Ca, c’était une bonne poignée d’années plus tôt, lorsque les choses étaient encore faciles et presque innocentes. Entre temps, ils avaient grandi et évolué, et certaines conversations auraient du être remises sur le devant de la scène bien plus rapidement que prévu. « On n’en a jamais rediscuté plus que ça, parce-que le besoin ne s’est pas présenté jusqu’au soir où je suis rentré chez nous et où elle m’a annoncé être enceinte. » Etre enceinte, et non pas Attendre notre premier enfant ou toute formulation qui aurait pu laisser penser qu’il y avait une part de lui qui voulait prendre part à cette situation. « Ca nous a tous les deux pris au dépourvu, surtout qu’elle était persuadée à ce moment là que j’avais déjà revu mon avis sur la question. » Puis, Ruben tourna de nouveau son regard ers Rory - empli de sincérité, de vérité, même si ce n’était pas les choses qui étaient le plus facile à entendre. « J’aime ta soeur, Rory. Elle est la femme de ma vie et je pourrais jamais le prouver assez je pense. Mais je peux pas me permettre de ne pas faire passer ma carrière en premier alors que c’est ce pour quoi je travaille d’arrache pied depuis des années. » Sur la première partie de ses explications, Ruben savait que Rory l’entendrait sans trop de problèmes; même si la finalité de la situation lui brisait le coeur, il n’avait pas besoin de le dire Ben le voyait dans son regard, il pourrait entendre le fait que l’amant de sa soeur ne soit pas sur la même longueur d’ondes que cette dernière. C’étaient là leurs problèmes de couple. Cependant, le jeune chirurgien savait que la seconde partie de l’explication, celle où il avançait le fait qu’il avait demandé à Grace d’agir ainsi pour préserver sa carrière serait bien plus dure à avaler. « Ce n’était pas tout à fait faux, quand Grace a dit l’autre soir que c’était de ma faute. » Plus ou moins, à une formulation près de toutes façons c’était l’idée générale qui avait été évoquée. « Je lui ai demandé de ne pas poursuivre la grossesse, parce-que je ne suis pas prêt à avoir des enfants. En revanche, j’ai appris après coup qu’elle avait été jusqu’au bout de l’idée et qu’elle avait avorté. Elle a pris la décision finale toute seule. » Il voulait bien porter la responsabilité d’avoir implanté l’idée dans l’esprit de Grace, mais en revanche il tenait à souligner qu’il n’était pas aller jusqu’à lui forcer la main.

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@RUBEN HARTFIELD & RORY

Rory détestait avoir l'impression que le naturel de ses échanges avec Ruben avait laissé la place à l'embarras et l'hésitation. Il détestait ne pas savoir sur quel pied danser avec l'une des personnes qui le connaissaient le mieux en ce monde et aux cotés de qui il avait traversé autant de joies que d'épreuves avec les années. Mais plus que tout, il détestait ne pas savoir quand ils avaient bien pu prendre ce chemin-là sans qu'il ne le remarque, sans qu'il ne puisse empêcher les choses de connaître cette tournure. Il n'y a encore pas si longtemps, il aurait été impensable qu'ils puissent avoir le moindre secret l'un pour l'autre, pourtant aujourd'hui son cœur se serrait de savoir qu'au sein de leur relation aussi, les non-dits avaient fini par prendre beaucoup de place. « Je te l’aurais dit, oui. Quand, j’en sais rien par contre. » Rory n'avait aucune envie de douter de sa parole, quand bien même il avait été blessé que ces vérités éclatent au beau milieu d'un repas familial qu'il croyait naïvement pouvoir préserver des secrets et autres manigances qui régnaient habituellement chez les Craine. « J’attendais juste de savoir quand et comment Grace voulait en parler autour d’elle, après avoir annoncé sûrement trop rapidement qu’elle était enceinte, que cet enfant ne verrait jamais le jour finalement. » Le regard de l'acteur fut de nouveau plongé dans une profonde tristesse, alors que se repasser le fil des événements était tout aussi douloureux que l'autre soir. « Crois moi quand je te dis que j’aurais mis mon veto une fois de plus si elle m’avait dit qu’elle voulait faire ça comme ça s’est passé ce soir là chez nous. » Si les choses avaient été particulièrement difficiles à vivre pour la fratrie Craine et toutes les personnes autour de la table, Rory savait bien qu'il en avait été de même pour Ruben, qui plus est lorsqu'il avait été pris à parti par sa fiancée et que tous les regards s'étaient aussitôt tournés vers lui. Lui aussi avait passé une rude soirée. « J’aurais fait en sorte que ce soit amené plus en douceur. Pas que ça aurait changé la finalité de la situation mais… Ouais. » Rory secoua doucement la tête, conscient qu'il n'avait rien pu prédire lui non plus et que ça lui était simplement tombé dessus comme sur eux tous. Grace avait saisi l'occasion pour livrer ce qu'elle avait sur le cœur et si Rory comprenait que sa sœur ait éprouvé le besoin de se libérer de ce poids, il regrettait sincèrement que les choses se soient passées ainsi. « De toutes les façons dont elle aurait pu s'y prendre pour nous l'annoncer, je déplore vraiment qu'elle ait choisi celle-ci. Je sais qu'elle était au plus mal, et en colère... mais je crois qu'on méritait tous mieux que de l'apprendre comme ça. » Il n'arrivait pourtant pas à en vouloir véritablement à Grace, incapable de ne pas voir que sa sœur n'était pas dans son état normal et que cette manifestation était pour elle une sorte d'appel au secours. Il aurait donné n'importe quoi pour qu'elle puisse se confier à lui sans faire autant de tort à leur famille. « Je regrette qu'elle se soit pas sentie assez en confiance pour m'en parler. J'arrête pas de me demander ce que j'aurais pu faire ou dire pour que ce soit le cas. » Avait-il raté une occasion de lui faire sentir qu'elle pouvait tout lui dire, sans le moindre jugement ? Avait-il été trop occupé par ses propres soucis pour percevoir que quelque chose n'allait pas ? C'était l'un des constats les plus douloureux au sujet de toute cette histoire : sa sœur avait gardé ses tourments pour elle et il était bien loin d'imaginer ce qu'elle traversait réellement. En tant que frère aîné, cette idée lui était forcément insupportable. « Je sais que tu voulais pas mal faire en gardant le silence, mais c'est douloureux de savoir que tout s'est joué sous mon nez et que j'ai rien vu. » Ce n'était même pas à eux directement qu'il en voulait le plus de n'avoir rien dit, dans cette histoire, mais à lui-même qu'il reprochait d'avoir été aussi aveugle.

Tout autour d'eux, le reste du parc apparaissait étrangement silencieux, renforçant plus encore l'impression que la tension ambiante n'avait rien d'habituelle entre les deux amis. Qu'au lieu de ces silences pesants et ces regards furtifs, ce sont des rires bruyants et des accolades fraternelles qu'ils devraient normalement partager. Mais depuis l'autre soir, bien des choses se voulaient différentes et Rory le regrettait au plus profond de son être. « Lorsqu’on a commencé à se fréquenter pour de vrai, Grace et moi, j’ai tout de suite été clair avec elle sur le sujet des enfants. Ce n’était pas ma priorité, et elle l’avait entendu. Même: elle s’était rangée à mon avis, au début. » C'était un sujet que les deux hommes eux-mêmes n'avaient évoqué que quelques fois, probablement conscients que leurs envies à ce sujet étaient à l'opposée l'une de l'autre et que là où Ruben avait toujours eu à cœur de privilégier sa carrière et sa réussite professionnelle, Rory avait toujours caressé l'espoir de fondre une famille le plus tôt possible. Il aura finalement fallu des années avant que les choses ne soient enfin plus simples et pour que Swann et lui entrevoient enfin cette possibilité beaucoup plus concrètement. « Je sais que vos carrières sont extrêmement importantes pour vous. Je t'assure, je comprends que c'ait toujours été ta première priorité. J'ai même toujours admiré ton courage et ta volonté. » Parce que Ruben n'avait jamais ménagé ses efforts pour en arriver là où il en était aujourd'hui, que Rory avait vu tous les sacrifices que ça avait représenté et que loin de les avoir un jour jugé, il les avait toujours compris. Ruben ne devrait pas être culpabilisé d'avoir de l'ambition et de vouloir que ses efforts en aient valu la peine, c'est tout le reste que Rory avait beaucoup plus de mal à digérer. Le reste qui impliquait Grace, et cette grossesse qu'au bout du compte elle semblait désirer du plus profond de son cœur. C'est de l'avoir vue détruite et en proie à cette immense détresse qui lui laissait un arrière-goût particulièrement amer. « On n’en a jamais rediscuté plus que ça, parce-que le besoin ne s’est pas présenté jusqu’au soir où je suis rentré chez nous et où elle m’a annoncé être enceinte. » Rory ne pouvait qu'imaginer combien cette annonce avait du être troublante, pour Ruben qui ne s'y attendait pas une seule seconde. « Ça nous a tous les deux pris au dépourvu, surtout qu’elle était persuadée à ce moment là que j’avais déjà revu mon avis sur la question. » Son regard navré se reposa dans celui de son ami, conscient que cette annonce et la surprise qu'elle avait suscité avaient été le point de départ de toute cette histoire. « Vous aviez vraiment jamais parlé de ce qui arriverait si jamais... vous vous retrouviez un jour dans cette situation ? De ce que vous feriez ? » Il ne doutait pas un instant qu'ils avaient du prendre toutes les précautions possibles pour qu'un tel cas de figure ne se présente pas et éviter ainsi de se poser des questions qu'ils comptaient sans doute éviter aussi longtemps qu'ils le pourraient, mais le risque zéro n'existait pas et le destin s'était chargé de le leur rappeler.

« J’aime ta sœur, Rory. Elle est la femme de ma vie et je pourrais jamais le prouver assez je pense. Mais je peux pas me permettre de ne pas faire passer ma carrière en premier alors que c’est ce pour quoi je travaille d’arrache pied depuis des années. » Ces mots, Rory les accueillit avec l'expression bienveillante et reconnaissante d'un ami qui chérissait l'idée que Ruben lui parle enfin en toute transparence. Quand bien même ça arrivait peut être un peu tard. « Je sais que tu l'aimes, Ruben. Je t'assure que j'ai jamais mis ça en doute un seul instant. » L'acteur n'avait jamais eu à douter de ses sentiments à l'égard de sa sœur et même l'autre soir, lorsque le couple formé par Grace et Ruben semblait danser sur un fil tendu au-dessus du vide, il avait refusé de voir les choses sous un autre prisme. A ses yeux, ils étaient faits l'un pour l'autre depuis le jour où Ruben s'était confié pour la première fois sur son amour pour Grace, et ça n'était pas seulement parce que Rory avait toujours été un incorrigible romantique. Ils voyaient en eux des âmes sœurs, depuis tout ce temps. « Mais ce que j'ai vu l'autre soir... ça m'a fait réaliser que je m'étais toujours convaincu que vous pouviez pas avoir de problèmes, parce que votre couple a toujours été comme un modèle d'harmonie à mes yeux. » Il les avait toujours trouvé tellement assortis, tous les deux. Tellement complémentaires, aussi, tant dans leurs aspirations que dans leurs tempéraments. Peut être que ça l'avait amené à les idéaliser en tant que couple, à ne pas voir qu'eux aussi pouvaient traverser des épreuves. « J'ai toujours su que pour vous le travail passerait avant, et tant que vous étiez heureux tous les deux je trouvais même ça super, que vous soyez sur la même longueur d'ondes. Mais aujourd'hui je sais que ma sœur n'est peut être pas aussi heureuse que je l'ai toujours cru, et c'est un constat douloureux. » Pour le frère qu'il était et qui s'était toujours persuadé que Grace avait justement tout pour être heureuse et épanouie dans la vie qu'elle menait auprès du jeune chirurgien. Le bonheur de sa fratrie comptait plus que tout à ses yeux et avoir vu sa sœur dans cet état l'autre soir avait été un crève-coeur à plus d'un égard. « Ce n’était pas tout à fait faux, quand Grace a dit l’autre soir que c’était de ma faute. » Finalement, Rory reporta toute son attention sur Ruben, appréhendant la suite sans être tout à fait certain de ce qu'il redoutait d'entendre exactement. « Je lui ai demandé de ne pas poursuivre la grossesse, parce-que je ne suis pas prêt à avoir des enfants. En revanche, j’ai appris après coup qu’elle avait été jusqu’au bout de l’idée et qu’elle avait avorté. Elle a pris la décision finale toute seule. » Son cœur se serra inévitablement à cette pensée, rien n'étant plus douloureux que d'imaginer Grace subir cette interruption de grossesse seule, quand bien même c'est ce qu'elle avait voulu. « Mais on sait tous les deux qu'elle l'a fait à contre-coeur. Probablement parce que c'était à ses yeux le seul moyen de préserver votre couple et de ne pas te perdre, toi. » Peut être bien que Ruben ne l'avait pas formulé ainsi devant sa sœur, qu'il ne lui avait pas posé d'ultimatum ni spécifiquement demandé de choisir entre cet enfant et leur couple. Mais aussi vrai que Rory le savait incapable de placer sa sœur au pied du mur, il savait aussi que Grace l'avait probablement perçu de cette façon sans même qu'il ne formule ces mots. « Réponds-moi honnêtement, Ben. Tu l'aurais accepté, si elle avait été contre ta volonté et qu'elle avait gardé cet enfant ? » Lui aurait-il pardonné si cet enfant avait vu le jour et que sa venue avait tout compliqué ? Une part de lui n'envisageait pas même l'idée qu'il puisse en avoir été autrement, mais une autre part était malgré tout habitée par le doute. « Je crois que dans cette histoire il fallait forcément que l'un de vous se sacrifie pour contenter l'autre, et je crois que ma sœur a du faire ce sacrifice pour que tout puisse continuer comme avant. » Pour qu'ils puissent retrouver leur harmonie d'antan et pour qu'ils puissent poursuivre leur carrière respective, que Rory savait d'une importance capitale pour la stabilité de leur couple. « Et je crois que ça l'a brisé de le faire. Et que si tu l'aimes et que tu veux arranger les choses, tu peux plus te permettre de la placer un jour dans cette situation. Pas alors qu'elle s'est sacrifiée pour vous. » Il suffisait de voir la peine dans le regard de Grace lorsqu'elle avait annoncé son avortement pour comprendre que ça l'avait véritablement brisée. « Je choisirai aucun camp, parce que j'ai envie de penser que vous êtes toujours dans le même, elle et toi. Mais je sais que tu sais que je suis son frère avant d'être ton ami, et que pour ça je supporterai pas qu'elle se retrouve blessée à nouveau. » Et qu'aussi vrai qu'il tenait profondément à Ruben et voulait plus que tout voir les choses s'arranger, c'est sa sœur qu'il s'évertuerait à protéger envers et contre tout.

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@rory craine

S’il y avait bien un élément dans toute cette situation que Ruben aurait aimé pouvoir changer, ou au minimum mieux contrôler, c’était la façon dont cette fin de grossesse était annoncée auprès de la famille Craine - et surtout auprès de Rory. Il ne voulait faire de mal à personne, et la façon dont Grace s’était mise à démontrer sa peine et sa détresse n’avait pas permis que les choses se passent comme il aurait aimé. Pouvait-il seulement lui en vouloir, d’avoir agi de la sorte ? Peut-être qu’une part d’elle s’était aussi servie de ce diner de famille pour mettre son fiancé au pied du mur, pour lui faire comprendre qu’il n’était pas seul décisionnaire dans cette histoire et qu’il lui restait un certain pouvoir sur tout ça. « De toutes les façons dont elle aurait pu s'y prendre pour nous l'annoncer, je déplore vraiment qu'elle ait choisi celle-ci. Je sais qu'elle était au plus mal, et en colère... mais je crois qu'on méritait tous mieux que de l'apprendre comme ça. » Dans un monde parfait, ils n’auraient même pas eu à l’apprendre tout court; elle ne serait pas tombée enceinte ou n’aurait pas pensé à garder cet enfant, sans discussion à avoir. « Je regrette qu'elle se soit pas sentie assez en confiance pour m'en parler. J'arrête pas de me demander ce que j'aurais pu faire ou dire pour que ce soit le cas. Je sais que tu voulais pas mal faire en gardant le silence, mais c'est douloureux de savoir que tout s'est joué sous mon nez et que j'ai rien vu. » Ce fut à Ruben de secouer légèrement la tête, afin de mettre en doute une partie des paroles du brun à ses côtés. Oh, il connaissait assez Rory pour comprendre où cette formulation était en train de les mener, et ce n’était pas du tout un chemin à emprunter en cet instant. « C’est pas ta faute, Craine, comment pas à te prendre la tête comme ça. » Les mots de Ben n’étaient en aucun cas des reproches, mais bien un conseil bienveillant envers son ami; il savait à quel point le bien-être de sa soeur était précieux à ses yeux, et qu’il pouvait rapidement s’en vouloir de ne pas réussir à l’aider pour atteindre un tel objectif. « Je pense surtout qu’elle s’est retrouvée perdue dans une situation qu’elle a pas su anticiper. » Parce-qu’elle n’avait pas prévu de tomber enceinte, parce-qu’elle n’avait pas prévu de en pas être soutenue dans cette épreuve par son petit-ami et fiancé et surcroit, que ce dernier était très ami avec son frère et que tout ceci était un mélange de non-dits qui n’auraient pas du exister. Pour personne, entre personnes. « Et pour une fois, je pouvais pas faire grand chose de plus que de me taire pour me ranger de son côté face à toi. » Pour une fois, parce-qu’il n’y avait que trop peu d’autres situations où Ruben n’aurait pas pris le téléphone pour directement en parler à son ami. Cette fois-ci, les choses étaient bien différentes - et même s’ils n’étaient pas sur la même longueur d’ondes, Grace avait eu besoin de lui à ses côtés à un moment donné; garder cette seconde nouvelle pour eux, presque jalousement, était la seule façon pour lui de lui montrer qu’il était de son côté malgré tout.

« Je sais que vos carrières sont extrêmement importantes pour vous. Je t'assure, je comprends que c'ait toujours été ta première priorité. J'ai même toujours admiré ton courage et ta volonté. » Malgré la situation, une esquisse de sourire fier se dessina sur les lèvres du jeune homme. Bien sur qu’en tout temps, cela faisait du bien d’entendre que votre ami éprouvait une certaine admiration à votre égard. « Vous aviez vraiment jamais parlé de ce qui arriverait si jamais... vous vous retrouviez un jour dans cette situation ? De ce que vous feriez ? » Ce fut par un soupire que Ruben répondit en premier lieu à Rory. Cela sonnait tellement idiot, dit comme ça, mais la réponse était pourtant tellement simple malgré ça. « Honnêtement ? » C’était le but de toute cette discussion, idiot. « Non. Ou jamais de façon sérieuse. Ca nous est arrivé de nous retrouver dans des situations où des couples nous parlaient de leur projet bébé, en nous retournant la question, mais à chaque fois on répondait que c’était pas notre préoccupation pour le moment. » Et parce-que de façon claire et limpide, aux yeux de Ben, ça n’avait jamais été leur préoccupation avant cette façon soirée dans leur apparement. Soupirant de nouveau, il avança son dos pour poser ses coudes sur ses cuisses, fermer ses mains l’une dans l’autre, son regard toujours porté au loin pour le moment. « Il a quand même fallu deux médecins pour oublier que le risque zéro n’existe pas malgré les précautions prises. » Cette fois ci, il laissa son petit rire amer s’échapper d’entre ses lèvres, secouant légèrement la tête. Plus il narrait les faits, la vérité, à haute voix et plus il se trouvait bête de ne pas avoir pensé qu’un jour cela pourrait leur arriver à eux aussi. « Ce genre de surprise ça arrive toujours plus facilement aux autres qu’à soi, normalement. » Plus d’une fois, il avait ri presque de façon mauvaise de toutes ces personnes qui se retrouvaient parents sans l’avoir prévu, sans avoir su anticiper. Il riait beaucoup moins, désormais.

Il ne riait même plus du tout, alors que la jeune femme le laissait à peine dormir dans le lit conjugal, qu’il squattait le canapé de chez son frère depuis des mois et qu’il semblait à court d’idées pour plaider sa cause - cette dernière n’étant en rien compatible effectivement avec l’idée de fonder plus rapidement que prévu initialement une famille. « Je sais que tu l'aimes, Ruben. Je t'assure que j'ai jamais mis ça en doute un seul instant. » Mais - parce-qu’il y avait toujours un mais après ce type de première phrase et qu’il n’était pas possible qu’avec les mots qu’il ait prononcé jusque maintenant en guise d’explications auprès de Rory, il ait pu plaider positivement sa cause. Son ami avait forcément quelque-chose à redire sur tout ça, même s’il ne remettait pas en question l’amour que Ben portait à sa soeur. « Mais ce que j'ai vu l'autre soir... ça m'a fait réaliser que je m'étais toujours convaincu que vous pouviez pas avoir de problèmes, parce que votre couple a toujours été comme un modèle d'harmonie à mes yeux. » Le sourire, persistant à peine plus d’une poignée de secondes sur les lèvres de Hartfield, était un brin attendri il fallait l’avouer. « Tous les couples ont des problèmes. Ca existe pas, les couples qui n’ont aucun désaccord. » Peut-être effectivement qu’en apparence, et jusqu’à quelques mois plus tôt, même Ruben aurait pensé que Grace et lui ne pouvaient pas trouver un terrain de mésentente. Il avait fallu que ce dernier s’impose à eux pour qu’il comprenne finalement de quoi ce dernier en ressortait. « J'ai toujours su que pour vous le travail passerait avant, et tant que vous étiez heureux tous les deux je trouvais même ça super, que vous soyez sur la même longueur d'ondes. Mais aujourd'hui je sais que ma sœur n'est peut être pas aussi heureuse que je l'ai toujours cru, et c'est un constat douloureux. » Ce dernier était visible sur le moindre des traits du visage de Rory, alors qu’il l’exprimait à haute voix à son ami. « Je suis désolé. » Il ne saurait dire grand chose de plus, en cet instant de toutes façons; mais c’était sincère: il n’avait jamais voulu faire de peine à la jeune femme, et encore moins au brun à ses côtés qui n’aurait jamais du être mêlé dans cette histoire ou seulement si cette dernière tournait vers du positif. Dans aucune autre circonstance, Rory n’aurait du être atteint. Parce-que si Ruben était responsable d’une grande partie de la finalité de cette grossesse, ses choix personnels ne regardaient depuis le début en réalité que lui, et par extension pour cette situation sa fiancée, mais jamais Rory ne tenait un rôle majeur dans la création ou non d’une nouvelle vie par le jeune couple.

« Mais on sait tous les deux qu'elle l'a fait à contre-coeur. Probablement parce que c'était à ses yeux le seul moyen de préserver votre couple et de ne pas te perdre, toi. » Malheureusement, même si son avis n’était pas nécessaire, il se trouvait que Rory avait raison - et que c’était probablement ça le plus énervant. A voir l’état de détresse émotionnel dans lequel se trouvait Grace ces derniers mois, suite à l’avortement, il ne fallait pas être un expert pour comprendre qu’effectivement, elle avait agi à contre-coeur et que la peur de perdre Ruben avait été plus grande que celle de perdre son enfant. Pinçant ses lèvres en une ligne fine, il ne pouvait ajouter grand chose en cet instant, le chirurgien; rien qui pourrait sauver son cas en tous cas. « Réponds-moi honnêtement, Ben. Tu l'aurais accepté, si elle avait été contre ta volonté et qu'elle avait gardé cet enfant ? » Dans toute autre situation, Ruben aurait surement répondu sans hésiter un seul instant pour expliquer son point de vue. Cependant, il s’agissait de Rory à ses côtés et nombreux des mot que le jeune médecin avait prononcé ces derniers mois avaient eu des répercutions bien plus importantes qu’imaginées, attendues; alors il prit un moment supplémentaire pour savoir de quel façon il allait tourner sa phrase, et surtout ce qu’il pouvait révéler de sa façon de voir complètement les choses sans que sa vision ne soit néfaste pour toute autre paire d’yeux. « Je l’aurais accepté. » Mais - parce-que oui, il y avait encore un mais. Il retint un soupire avant de continuer sa réponse, car c’était sur cette seconde partie qu’il était hésitant sur la formulation à adopter. « Mais je peux pas savoir les conséquences que ça aurait pu avoir chez moi. » L’honnêteté était ce que Rory attendait, mais parfois celle de Ben n’était pas la meilleure à entendre, son avis un brin trop tranché sur certaines questions. « Il aurait été hors de question de ne pas reconnaître l’enfant ou de ne pas être présent dans le maximum de mes capacités, si la grossesse avait été menée à terme. Mais je sais pas où ça nous aurait laissé, elle et moi… » Parce-qu’il aurait peut-être accepté cette nouvelle réalité, mais dans le fond de son regard aurait surement persisté cette rancoeur d’avoir vu sa vie gâchée ou au minimum entachée par une décision qui ne venait pas de lui. « C’est hypocrite, je sais. » Qu’il souffla du bout des lèvres, se rendant compte de ce que ses paroles impliquait lorsqu’elles étaient mises à distance de la situation. Il aurait agi d’une façon égoïste là où il demandait à Grace d’être tout le contraire alors que les rôles étaient inversés. « Je crois que dans cette histoire il fallait forcément que l'un de vous se sacrifie pour contenter l'autre, et je crois que ma sœur a du faire ce sacrifice pour que tout puisse continuer comme avant. Et je crois que ça l'a brisé de le faire. Et que si tu l'aimes et que tu veux arranger les choses, tu peux plus te permettre de la placer un jour dans cette situation. Pas alors qu'elle s'est sacrifiée pour vous. » Dit comme ça, il en venait à d’autant plus être le méchant de cette histoire - même si la façon dont Rory présentait ses paroles n’était pas là pour souligner ce détail là. « Je choisirai aucun camp, parce que j'ai envie de penser que vous êtes toujours dans le même, elle et toi. Mais je sais que tu sais que je suis son frère avant d'être ton ami, et que pour ça je supporterai pas qu'elle se retrouve blessée à nouveau. » Ce ne fut qu’à ce moment là que le regard de Ruben se détacha du visage de son ami. Ils étaient d’accord sur un point: aucun d’eux n’avait envie de voir de nouveau la jeune femme blessée, et c’était même quelque-chose sur laquelle ils arrivaient à s’accorder depuis plusieurs années désormais. Cependant, Ruben était en possession d’informations qui restaient inconnues à Craine - et c’était temps mieux, surtout - qui pouvaient justement blesser Grace en un claquement de doigts. « Je sais tout ça oui. » Il n’y avait jamais eu débat sur la question, à aucun moment. « Si c’était pas ta réaction, j’aurais choisi ton camp pour toi t’en fais pas. » Parce-qu’ils avaient beau être amis depuis des années, Ben ferait toujours en sorte que la famille Craine puisse passer avant le reste, même avant lui - et c’était pas peu dire, pour quelqu’un de sa trempe. Simplement, il savait à quel point la famille était quelque-chose d’important pour eux, de façon plus générale de toutes façons et même s’il aimait Grace et Rory, qu’il tenait à eux, il ne les laisserait pas se déchirer à cause de lui. Et vraiment, c’était beaucoup de sa part que de penser comme ça.

« De toutes façons, cette situation est pas prête d’arriver de nouveau. » Et tant qu’il ne l’avait pas mentionné à Rory, les conditions de co-existence de Grace et Ruben ne paraissaient pas tant absurdes que ça. Ce serait chose faite à partir d’aujourd’hui. « Je te l’ai pas mentionné parce-que ça allait de paire avec tout le reste et que je voulais pas prendre les devants par rapport à ce qu’elle voulait te dire ou non, mais ça fait plusieurs mois que je vis de façon plus ou moins permanente chez Rhett. Suite à notre divergence d’avis sur la grossesse. » Parce-que Grace avait eu besoin d’air, qu’elle avait eu besoin d’espace et que voir la tronche de parfait premier de la classe de Ruben tous les jours n’était pas nécessairement ce qui la rendait jouasse. « Et la seule fois où on s’est retrouvés tous les deux plus de quelques heures sans que ça tourne au silence ou en dispute entre elle et moi, c’est pendant le weekend que vous nous avez offert, Swann et toi. » Au moins, pendant ce temps là, ils avaient eu le droit à une parenthèse dans leur lignée de mois noirs. Ruben avait sérieusement pensé que les choses seraient bien mieux à leur retour, que la jeune femme aurait réussi à changer d’avis sur certains points; mais à voir le nombre de soirs par semaine où il était encore chez son frère, comme une vieille habitude, la situation n’avait pas tant évolué que ça. « Elle évite souvent l’appartement les soirs où elle sait que je vais y être, et pour pas être un connard fini je m’y rends maintenant que lorsque je sais qu’elle est de garde de nuit. »

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@RUBEN HARTFIELD & RORY

« C’est pas ta faute, Craine, commence pas à te prendre la tête comme ça. » Inévitablement, Rory se reprochait de n'avoir pas vu à quel point sa sœur pouvait aller mal, n'imaginant aucune épreuve qu'un membre de sa famille puisse traverser qui échappe totalement à sa vigilance. C'était forcément douloureux, de se dire qu'elle n'avait pas pu se tourner vers lui – vers aucun d'entre eux, en réalité – lorsqu'elle en aurait eu le plus besoin. « Je pense surtout qu’elle s’est retrouvée perdue dans une situation qu’elle a pas su anticiper. » Ce constat, Rory l'avait fait l'autre soir dans les pires circonstances qui soient, la nouvelle de l'avortement de Nina lui ayant causé un choc si grand qu'il n'avait même pas pu avoir les paroles rassurantes qu'il aurait voulu échanger avec elle, incapable à ce moment-là d'organiser ses pensées et de dépasser la douleur qui avait suivi cette annonce. « Nos parents nous ont jamais vraiment incité à parler de ce qu'on pouvait ressentir. Mais j'aurais voulu qu'elle sache qu'elle pouvait m'en parler, que jamais j'aurais émis le moindre jugement sur la situation si elle l'avait fait. » Il aurait simplement voulu être présent pour elle, sans chercher à lui donner le moindre conseil ou à influer d'une quelconque manière dans sa décision. Tout ce qu'il avait toujours souhaité, c'est que ses sœurs puissent se tourner vers lui dans les moments difficiles, et aujourd'hui il ne pouvait s'empêcher d'éprouver le sentiment d'avoir échoué quelque part. En tant qu’aîné, en tant que frère. « Et pour une fois, je pouvais pas faire grand chose de plus que de me taire pour me ranger de son côté face à toi. » - « Je comprends ce qui t'a poussé à ne rien dire. J'aurais juste préféré que les conséquences de ce silence ne fassent pas autant de mal à notre famille. » Ruben avait voulu rester loyal à sa fiancée et ça n'était pas une chose que Rory irait lui reprocher, simplement sa famille ne méritait pas d'apprendre la situation dans ces circonstances.

« Honnêtement ? Non. Ou jamais de façon sérieuse. Ça nous est arrivé de nous retrouver dans des situations où des couples nous parlaient de leur projet bébé, en nous retournant la question, mais à chaque fois on répondait que c’était pas notre préoccupation pour le moment. » Et c'était une chose que Rory était à même de comprendre, et ce même alors qu'il vivait la situation inverse et s'était toujours imaginé devenir père et organiser sa vie autour de sa famille. Ruben avait d'autres aspirations et il l'avait toujours compris, fasciné par la manière dont chacun avait toujours voulu organiser sa vie et par les innombrables atomes crochus qu'ils s'étaient pourtant toujours trouvés. Plus que tout, les deux amis s'étaient toujours complétés. « J'imagine combien ça devait être usant, de voir la question revenir sans arrêt. J'ai beau vouloir plus que tout devenir père, je regrette qu'on ait pu vous laisser penser que l'inverse était anormal. » Quand bien même personne ne l'avait peut être fait consciemment, il déplorait que les couples comme Ruben et Nina ne puissent pas simplement avoir d'autres priorités que celle de fonder une famille. Rory voulait des enfants, tout autant que Swann qui partageait depuis toujours son plus grand rêve, mais jamais il ne pousserait quelqu'un à en avoir si ça n'était pas une envie profonde. « Je me suis même toujours dit que contrairement à mon père, vous étiez tous les deux assez réalistes pour ne pas vouloir faire d'enfants sans être sûrs d'avoir le temps de vous en occuper ou d'avoir simplement envie de les faire passer avant votre carrière. » Ruben n'était pas comme son père, et à ses yeux c'était une bonne chose. Parce que ce dernier avait sans doute passé plus de temps entre deux avions qu'auprès des siens, et ce depuis que Rory était en âge de s'en souvenir. Leur mère avait tâché d'être plus présente, simplement pas toujours aussi démonstrative qu'il aurait pu l'espérer, mais un manque véritable s'était forgé avec le temps et dans le cœur de Rory. Alors oui, il avait toujours trouvé admirable que Ruben et sa sœur reconnaissent vouloir faire passer leur carrière en premier, justement parce qu'il ne savait que trop quel genre de déception ces absences répétées pouvaient engendrer. « Il a quand même fallu deux médecins pour oublier que le risque zéro n’existe pas malgré les précautions prises. » Son sourire, pourtant toujours attristé, répondit maladroitement à celui de Ruben. Dans d'autres circonstances, ils n'auraient sans doute eu aucun mal à alléger la situation, éternellement complices et blagueurs lorsqu'ils se retrouvaient. « Vous êtes tous les deux de grands adeptes du contrôle, vous étiez juste à mille lieux de penser que ça vous tomberait dessus. » Et ça n'avait rien d'un reproche de la bouche de l'acteur, mais ça Ruben le savait déjà. « Ce genre de surprise ça arrive toujours plus facilement aux autres qu’à soi, normalement. » Qu'ils soient médecins et adultes ne les rendaient pas plus infaillibles que quiconque, Ruben était simplement un peu trop dur avec lui-même et se reprochait de ne pas avoir pu empêcher la situation de se compliquer. « Malgré tout, si les circonstances avaient été différentes, je me dis que tu aurais au moins affronté cette situation auprès de la personne que tu aimes. De la personne avec qui tu as choisi de faire ta vie. » Ce n'était définitivement pas une situation enviable pour Nina et Ruben, mais tout aurait pu être bien plus compliqué encore s'ils n'avaient pas été dans une relation sérieuse et construite sur une confiance totale. Ce bébé aurait été un enfant de l'amour, le cas échéant, et si ça ne changeait rien à l'issue de cette histoire c'était au moins une petite consolation pour Rory.

Finalement, l'une des choses les plus difficiles à constater était à quel point il s'était fourvoyé sur le couple que formaient Nina et Ruben, dont Rory s'était toujours persuadé qu'il était plus fort et plus uni que tout. Ils étaient véritablement un modèle de longévité et de stabilité pour lui depuis de nombreuses années, à tel point qu'il n'avait peut être pas voulu voir que les choses étaient en réalité bien loin d'être idylliques. « Tous les couples ont des problèmes. Ça existe pas, les couples qui n’ont aucun désaccord. » Rory le savait, tout au fond de lui, après tout même son couple avec Swann avait connu son lot d'épreuves et du surmonter bon nombre de difficultés à l'époque où tout était loin d'être aussi simple et leur amour, lui, encore difficile à assumer. « J'ai toujours été terrifié à l'idée de connaître un jour un amour aussi chaotique que celui de mes parents. Je crois que je voulais simplement que vous en soyez préservés vous aussi. » Ruben pouvait sans doute le comprendre mieux que personne, pour faire partie de la famille depuis tant d'années qu'il avait bien souvent été témoin des tensions entre les parents Craine. « Je suis désolé. » Il secoua doucement et timidement la tête, Rory, conscient qu'il avait certainement été naïf et qu'il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même d'avoir à ce point idéalisé la relation entre Ruben et sa sœur. Il les pensait profondément heureux ensemble, plus encore depuis qu'ils s'étaient fiancés, et la réalité venait lui éclater à la figure de la plus douloureuse des manières. « Je l’aurais accepté. Mais je peux pas savoir les conséquences que ça aurait pu avoir chez moi. » Et Rory s'en voulait au fond de lui de lui poser la question, n'imaginant pas une réalité dans laquelle Ruben refuserait d'assumer un enfant dont il est le père et abandonner Nina à son sort. « Il aurait été hors de question de ne pas reconnaître l’enfant ou de ne pas être présent dans le maximum de mes capacités, si la grossesse avait été menée à terme. Mais je sais pas où ça nous aurait laissé, elle et moi… » L'acteur n'avait aucun mal à comprendre qu'il lui soit difficile d'imaginer ce qu'il en aurait été, si la décision de sa sœur avait été différente et que ce bébé avait finalement vu le jour. Ruben n'avait jamais vraiment eu à se poser la question ; ce sont tous ses plans qui s'en seraient trouvés profondément bouleversés. « C’est hypocrite, je sais. » - « Non, c'est... je sais que tu aurais fait le nécessaire, Ruben. Je sais que ma sœur aurait pu compter sur toi s'il avait fallu, même si ça m'est difficile de me dire que ça vous aurait probablement coûté énormément. » Que ça les aurait peut être aussi détruits, ou au moins éloigné l'un de l'autre. Rory avait toujours vu l'arrivée d'un enfant comme une véritable bénédiction, mais il se devait d'accepter qu'il n'en serait pas de même pour tous les couples. Du fond du cœur, il se mettait à la place de son ami. « Je sais tout ça oui. Si c’était pas ta réaction, j’aurais choisi ton camp pour toi t’en fais pas. » C'était une chose que Rory éprouvait le besoin de dire, mais la réaction du jeune médecin ne le surprenait pas. Si quelqu'un avait toujours compris l'importance que la famille avait toujours eu à ses yeux, c'était son ami. Il savait combien Rory tenait à son frère et à ses sœurs, qu'il serait prêt à tout pour eux. « Merci de comprendre. » Et de lui prouver qu'en dépit de la situation, certaines choses ne changeaient pas.

« De toutes façons, cette situation est pas prête d’arriver de nouveau. » Et c'est le cœur de Rory qui se serra cette fois un peu plus, comprenant que cet aveu en impliquait probablement un autre et qu'il pourrait être difficile à entendre. « Je te l’ai pas mentionné parce-que ça allait de paire avec tout le reste et que je voulais pas prendre les devants par rapport à ce qu’elle voulait te dire ou non, mais ça fait plusieurs mois que je vis de façon plus ou moins permanente chez Rhett. Suite à notre divergence d’avis sur la grossesse. » - « Ruben, je... » Les mots restaient piégés en travers de sa gorge, alors que son regard attristé ne lâchait plus celui du jeune médecin, incapable d'exprimer à quel point ces confessions lui brisaient le cœur. « Et la seule fois où on s’est retrouvés tous les deux plus de quelques heures sans que ça tourne au silence ou en dispute entre elle et moi, c’est pendant le weekend que vous nous avez offert, Swann et toi. » Au milieu de l'immense tristesse que lui inspirait cette conversation, Rory se consolait au moins en se disant que ce cadeau avait en partie aidé à ce que Ruben et Nina se rapprochent. Il n'imaginait simplement pas en leur faisait ce cadeau qu'ils en avaient autant besoin. « Elle évite souvent l’appartement les soirs où elle sait que je vais y être, et pour pas être un connard fini je m’y rends maintenant que lorsque je sais qu’elle est de garde de nuit. » C'était finalement encore bien pire que tout ce qu'il avait pu appréhender d'entendre, le couple formé par les deux médecins semblant en proie à de nombreuses turbulences que Rory n'aurait pas pu imaginer. « Je suis vraiment désolé, Ruben. » Des mots qui n'avaient pas le pouvoir de changer quoi que ce soit, mais qu'il éprouvait le besoin d'énoncer. « J'ignorais que la situation était aussi compliquée entre vous. Nina ne m'avait rien dit et je pensais naïvement qu'elle était juste sur son petit nuage depuis les fiançailles. » Sa sœur ne voulait certainement pas s'étendre sur une situation aussi douloureuse, elle qu'il avait toujours connu pudique et réfractaire à l'idée de montrer ce qui pouvait l'atteindre. « Qu'est-ce que vous comptez faire ? Je veux dire... » Subitement, une inquiétude encore plus forte lui serra le cœur, ses pensées ne pouvant que dériver vers ces fiançailles qu'ils n'avaient même pas pu célébrer dignement l'autre soir. « Vous comptez toujours vous marier, pas vrai ? Tout ça, c'est qu'une mauvaise passe, une accumulation de choses que vous devez simplement régler, n'est-ce pas ? » Son regard cherchait dans celui de Ruben quoi que ce soit qui pourrait le rassurer : plus que tout, Rory avait besoin d'entendre que tout n'était pas compromis, que les choses pouvaient encore trouver une issue heureuse. « Ruben, est-ce que tu aimes vraiment ma sœur ? » Il devait lui poser la question, convaincu que son ami comprendrait pourquoi il le faisait. « Parce que si tout le reste est compliqué mais que tu es au moins sûr de ça, alors tout va forcément s'arranger. » S'il aimait vraiment Nina, alors ils sauraient dépasser tout ça et se retrouver. Rory en était persuadé, des sentiments intacts pouvaient sauver même un couple au bord de la rupture – un mot auquel il n'avait vraiment pas envie de penser. « Il a fallu que je perde Swann pour réaliser que j'étais incapable de vivre sans lui. Toi, je sais que tu feras pas la même erreur et que tu feras ce qu'il faut pour sauver votre couple à Nina et toi. » Le cœur de Rory ne pouvait que résonner encore plus fort face à la détresse de son ami : il ne voulait pas que sa sœur et lui passent par les mêmes souffrances et les mêmes regrets que ceux qu'il avait connu après sa rupture avec Swann. L'issue de cette histoire était des plus douces, bien sûr, mais il avait bien cru avoir perdu l'amour de sa vie et ne supporterait pas de voir Ruben et Nina emprunter le même chemin.

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@rory craine

« Nos parents nous ont jamais vraiment incité à parler de ce qu'on pouvait ressentir. Mais j'aurais voulu qu'elle sache qu'elle pouvait m'en parler, que jamais j'aurais émis le moindre jugement sur la situation si elle l'avait fait. » Ruben pinça les lèvres; peut-être que la réponse qu’il allait donner était de celles qui s’avançaient un peu de trop pour autrui, mais il ne pensait pas trop se tromper en s’exprimant à haute voix. « Elle le sait. » Parce-que Nina et Rory avaient toujours pu être présents l’un pour l’autre, et que la jeune femme était parfaitement au fait qu’elle pouvait se tourner vers son frère qu’importe la situation si jamais elle avait besoin de parler et d’ouvrir son coeur. Ben en était d’autant plus intimement persuadé que la situation était exactement la même entre son ami et lui, et que ce dernier n’aurait effectivement émis aucun jugement si l’une ou l’autre personne du couple était venue vers lui pour trouver des solutions. Il aurait aimé que Nina le fasse, elle n’avait pas franchi le pas; Ruben de son côté n’aurait pu se permettre d’agir de la sorte sans trahir sa fiancée en parlant à son frère de ce qu’il se passait exactement entre eux, et telle n’avait jamais été son intention. « Je comprends ce qui t'a poussé à ne rien dire. J'aurais juste préféré que les conséquences de ce silence ne fassent pas autant de mal à notre famille. » Il aurait surtout préféré, de son côté, que les conséquences de toute cette situation n’aient aucun impact, qu’importe sur qui et qu’importe le genre. Malheureusement, ce n’était pas le genre de choses sur lesquelles un mot était à dire.

Tout comme le reste du monde n’avait pas son mot à dire sur le façon dont les deux fiancés pouvaient gérer leur vie privée. « J'imagine combien ça devait être usant, de voir la question revenir sans arrêt. J'ai beau vouloir plus que tout devenir père, je regrette qu'on ait pu vous laisser penser que l'inverse était anormal. » Bien sur que beaucoup s’y étaient risqués, et ces derniers n’avaient pas toujours été bien reçus. Cela avait permis de soulever un point qui n’était pas tant discuté que cela dans le couple, mais comme ils restaient tous deux sur la même longueur d’ondes le doute ne s’était pas accroché plus que quelques instants entre eux. Alors, ils avaient laissé parler les gens, les avaient laissé spéculer parce-que cela ne leur importait pas autant que ces derniers pouvaient surement le penser. Alors, Ben haussa presque lassement les épaules. « Les gens parlent beaucoup pour rien dire, faut s’y habituer. » C’était autant valable dans la situation où Nina et Ruben avaient choisi, initialement, de ne pas répondre au schéma traditionnel de la parfaite petite famille que pour Rory et Swann, dans cette configuration - Hartfield était on ne pouvait plus au courant comme cela n’avait pas toujours été facile pour eux, mais surtout à quel point que les personnes croisant leur route auraient de toutes manières toujours parlé sur eux. « Je me suis même toujours dit que contrairement à mon père, vous étiez tous les deux assez réalistes pour ne pas vouloir faire d'enfants sans être sûrs d'avoir le temps de vous en occuper ou d'avoir simplement envie de les faire passer avant votre carrière. » Bien que les Craine et les Hartfield aient grandi dans deux ambiances diamétralement opposées, il avait connu assez rapidement celle qui était en place chez son ami tôt dans sa vie et avait pu observer les dégâts que cette dernière avait sur l’évolution des enfants Craine. Peut-être effectivement que c’était là une partie qui avait poussé Ben à agir comme il le faisait, et à ne pas imposer un rythme de vie à un bambin qui ne lui correspondrait en rien. Malheureusement, ce n’était pas sur ce point là que le discours de Rory le faisait tiquer - c’était sur la partie où il opposait le comportement de son ami à celui de son père. Si seulement il savait. Si seulement il pouvait voir à quel point il se trompait.

« Vous êtes tous les deux de grands adeptes du contrôle, vous étiez juste à mille lieux de penser que ça vous tomberait dessus. » - « On aurait quand même pu se douter que c’était possible, au moins. » - « Malgré tout, si les circonstances avaient été différentes, je me dis que tu aurais au moins affronté cette situation auprès de la personne que tu aimes. De la personne avec qui tu as choisi de faire ta vie. » - « Oui, c’est vrai. » Et ça l’était. Malgré tout, malgré les circonstances, malgré ses agissements: cette situation, il ne se voyait pas la vivre aux côtés d’une autre personne. Il aurait préféré ne pas avoir à la vivre tout court, bien sur, mais la vie n’étant pas à choix multiples il devait se contenter d’apprendre à composer avec les éléments qui leur étaient donnés.

Et si Rory était bien mignon de penser à eux comme à un exemple à suivre, le jeune chirurgien l’arrêta de suite: c’était honorable de sa part, mais ce n’était pas quelque-chose qui pouvait refléter la réalité. Aucun couple n’était réellement parfait: parfois, les associations se faisaient mieux que pour d’autres, mais les soucis du quotidien restaient les mêmes et seraient éternellement communs à tous. « J'ai toujours été terrifié à l'idée de connaître un jour un amour aussi chaotique que celui de mes parents. Je crois que je voulais simplement que vous en soyez préservés vous aussi. » Le regard de Ben accrocha celui de son ami un instant, et ce fut de la réellement reconnaissance qui pouvait y être lue en cet instant. Parce-que Rory était réellement un bon ami, il était un bon frère aussi; son désir profond de voir d’autres que lui vivre et filer un parfait amour n’était qu’une des raisons pour lesquelles il était tout ça, justement. Hartfield aurait tellement voulu que cela soit amplement suffisant, que la vision des choses de son ami puisse être le parfait résumé de la situation; il n’en était rien et sous différentes lentilles, ils pouvaient tous les deux le voir. Certains éléments restaient dans le noir pour Rory et c’était ainsi que les choses seraient le mieux: Ruben tenait à sa vie, et s’il savait qu’il pouvait parler d’à peu près tout avec Craine, certains éléments n’avaient pas à se trouver en lumière. Discuter de ce qu’il faisait dans le dos de sa soeur était l’un d’entre eux - en revanche, il savait qu’il pouvait être tout à fait honnête sur ce qu’il pensait des choses connues sans que Rory ne juge d’une quelconque façon, bien même si Nina était sa soeur. « Non, c'est... je sais que tu aurais fait le nécessaire, Ruben. Je sais que ma sœur aurait pu compter sur toi s'il avait fallu, même si ça m'est difficile de me dire que ça vous aurait probablement coûté énormément » Ca leur coutait déjà énormément, il ne fallait pas se fourvoyer. Aux yeux de Ruben cependant, cela aurait effectivement davantage couté si la décision prise n’avait pas été celle désormais connue, car il ne savait pas s’il aurait pu regarder le couple qu’il formait avec Nina de la même façon par la suite. Il se savait égoïste sur ce point, et Rory avait raison: il suffisait de changer de place dans le décor pour s’apercevoir finalement que Ben n’était pas le seul à se sentir de cette façon, à rôles inversés. Si une telle finalité avait été la vérité, il savait pertinemment cependant que Rory n’aurait pu se ranger de son côté, tout comme il ne lui aurait jamais demandé de le faire. « Merci de comprendre. » Il se contenta d’hocher légèrement la tête. Il n’y avait pas débat à avoir.

La suite de ce que Ruben avait à lui dire, en revanche, risquait de soulever des questionnements et des interrogations qui seraient bien moins faciles à appréhender. Il le savait, c’était peut-être aussi là une des raisons qui avaient poussé le chirurgien à être autant discret sur cette partie là des problèmes entre Nina et lui - non seulement il n’aurait pu mentionner le fait d’habiter chez son frère sans que cela soit suspicieux, mais qui plus était il aurait grillé la priorité à sa fiancée sur la situation et comme cela avait déjà été expliqué, ce n’était pas envisageable à ses yeux. « Ruben, je… » Oui, il savait d’avance - il n’avait même pas besoin de lire le regard de son ami pour savoir les mots qui suivraient. « Je suis vraiment désolé, Ruben. » Il chassa rapidement les excuses d’un revers de la main, secouant quelque peu la tête. « T’as pas à t’excuser Craine, t’as rien fait de mal. » Il n’était même pas responsable de la moindre chose dans cette situation. « J'ignorais que la situation était aussi compliquée entre vous. Nina ne m'avait rien dit et je pensais naïvement qu'elle était juste sur son petit nuage depuis les fiançailles. » - « Ouais. Ca faisait partie des effets secondaires, écoute. Elle voulait de l’espace et du temps, je tente de faire au mieux pour qu’elle puisse avoir les deux. » Peut-être un peu de trop, Hartfield, d’ailleurs.

« Qu'est-ce que vous comptez faire ? Je veux dire... » Ah: elles avaient mis plus longtemps que ce à quoi il s’était attendu pour se faire entendre, les inquiétudes de la part de Rory. « Vous comptez toujours vous marier, pas vrai ? Tout ça, c'est qu'une mauvaise passe, une accumulation de choses que vous devez simplement régler, n'est-ce pas ? » C’était en cet instant que les meilleurs compétences d’acting se devaient de ressortir chez Ben, alors que les yeux de Rory faisaient en sorte de ne pas lâcher les siens: oh, bien sur que ses intentions allaient toujours à se marier à sa soeur, et qu’il espérait grandement que ce soit simplement une accumulation de mauvaises choses temporaires. Si seulement il agissait en circonstance. « Ruben, est-ce que tu aimes vraiment ma sœur ? » Si toute autre personne lui avait posé la question, il aurait peut-être été offensé d’entendre cette dernière. Avec Rory, les choses étaient différentes. « Parce que si tout le reste est compliqué mais que tu es au moins sûr de ça, alors tout va forcément s’arranger. » Forcément s’arranger. Une grande partie de Ben avait envie de croire les yeux fermés à cette affirmation, de penser que les choses pouvaient être aussi simples. « J’aime vraiment ta soeur, Rory, ça j’en ai jamais douté. » Il aurait aimé dire que le petit sourire, un brin attendri, qui se dessina au coin de sa bouche faisait partie de la représentation qu’il se forçait de maintenir en place mais il ne pouvait se permettre ce luxe: il aimait vraiment Nina. Il n’était en rien la meilleure publicité ambulante, mais c’était effectivement le cas. « J’arrêterai pas de le dire, c’est elle la femme de ma vie. J’ai pas prévu de changer nos plans, si ça peut te rassurer. » Après tout, était-ce vraiment si important que ça de mettre en avant que s’il évitait soigneusement son propre lit, là où cette dernière dormait, c’était également pour aller partager sa couche avec une autre ? Pas à ses yeux. « Il a fallu que je perde Swann pour réaliser que j'étais incapable de vivre sans lui. Toi, je sais que tu feras pas la même erreur et que tu feras ce qu'il faut pour sauver votre couple à Nina et toi. » Oh, Rory. Que Ben aurait aimé être aussi bon que la façon dont il le voyait. Il aurait aimé être aussi bon que lui, aussi. Parce-qu’il se souvenait effectivement parfaitement de l’état dans lequel s’était retrouvé son ami, lorsque ces événement là s’étaient passés. Il se rappelait parfaitement de comment il avait pu avoir tristement le coeur brisé. Rory ne méritait en rien de subir ça - ni avant, ni maintenant, qu’importe la forme que pouvait prendre son coeur brisé. « J’y travaille, Rory, j’y travaille. » A sa façon, et surement que cette dernière était maladroite et que trop peu adaptée à la réalité. Mais il y travaillait vraiment comme il le pouvait: à ses yeux, laisser les rênes de tout ça à la jeune femme et attendre sur le côté que les choses s’améliorent était une façon de travailler à améliorer la situation. « Je sais pas combien de temps ça va prendre, je sais pas ce que ça va donner, mais promis j’y travaille. » Quand était la dernière fois qu’ils s’étaient adressés la parole, Nina et lui ? « Et si j’y arrive pas, je compte sur toi pour être là pour elle. » Parce-que même s’ils essayaient, il fallait voir la réalité en face: il y avait aussi la possibilité que cela ne fonctionne pas. Tous les efforts du monde n’étaient parfois pas assez malheureusement - et si Nina en venait à découvrir l’envers du décor, il y avait fort à parier qu’elle envoie valser les soi-disant efforts de Ben.

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@RUBEN HARTFIELD & RORY

« Les gens parlent beaucoup pour rien dire, faut s’y habituer. » Une lueur attristée passa dans le regard de l'acteur, qui ne savait après tout que trop bien à quel point ça pouvait être vrai. Triste, mais vrai. Il avait choisi une carrière qui impliquait une certaine exposition médiatique, il était bien placé pour savoir que les gens avaient toujours des opinions à émettre et qu'il était facile de les prendre à cœur lorsqu'elles touchaient à ce qu'on avait de plus précieux. Le jour où la presse s'était appropriée son histoire avec Swann pour tirer des conclusions malvenues et forcément douloureuses pour eux qui aspiraient simplement à vivre leur amour en toute quiétude, il avait vraiment réalisé à quel point ces choses-là l'atteindraient toujours. Et ça n'était sans doute pas différent pour Ruben et pour Nina, quand bien même ils avaient au moins l'avantage de ne pas risquer de voir leur vie étalée dans les journaux à scandales : ça ne changeait rien à la cruauté et à la bêtise de certaines remarques, ils le savaient tous les deux. « J'espère qu'au moins personne ne vous a jamais fait de remarque à l'hôpital. Je veux dire, ce serait vraiment injuste. » Ils formaient tous les deux un couple qui devait certainement beaucoup faire parler de lui sur leur lieu de travail, simplement parce qu'ils étaient deux talentueux chirurgiens qui ne se cachaient pas de vivre une histoire ensemble et que n'importe quel endroit de ce genre devenait un lieu propice à toutes sortes de ragots. Tout ce que Rory espérait, c'est qu'on ne les importunait pas avec des questions indiscrètes, sur leur désir d'enfant comme sur n'importe quoi d'autre. Ils méritaient tous les deux de pouvoir se consacrer à leur passion sans que ces questions les poursuivent là où ils pouvaient faire ce qui comptait le plus pour eux. « Vous n'avez de comptes à rendre à personne, c'est tout ce qui compte. » Et les gens pouvaient bien penser ce qu'ils voulaient, il savait qu'ils avaient tous les deux suffisamment de tempérament pour les faire taire le moment venu.

« On aurait quand même pu se douter que c’était possible, au moins. » Rory esquissa cette fois une moue empathique, comprenant que Ruben ne pouvait s'empêcher de se reprocher une partie de la situation, et de n'avoir pas pu la prévenir surtout. « On est bien souvent les pires juges qui soient quand ça nous concerne de près, pas vrai ? » Car quiconque les connaissait Nina et lui savait combien ils pouvaient être sérieux et prévoyants, à tel point que leur vie laissait peu souvent la place au moindre imprévu sans que Rory n'ait jamais jugé ça dommage pour autant – quand bien même il préférait pour sa part se laisser davantage porter et surprendre, c'est vrai. Le couple était simplement à mille lieux de s'attendre à ce que leur habituelle vigilance leur fasse cette fois défaut : cette grossesse leur était tombée dessus et ils n'avaient pu que composer avec les conséquences de celles-ci, que ni l'acteur ni son ami ne tenaient certainement à rappeler à présent que le dialogue semblait à nouveau rétabli entre les deux jeunes hommes. « Oui, c’est vrai. » Et c'était certainement une chose que Rory avait besoin d'entendre, au fond de lui, alors assuré que la situation ne pouvait pas avoir que de mauvais cotés et qu'au milieu de ces épreuves, Ruben et sa sœur finiraient par trouver l'un en l'autre quelqu'un capable de les comprendre mieux que quiconque ne le pouvait sans doute ; ils étaient après tout animés par les mêmes désirs, les mêmes craintes, au départ. Rory aimait penser que tout ce qui les avait toujours uni les rapprocherait tôt ou tard à nouveau, lorsque ces turbulences se seraient quelques peu dissipées. « T’as pas à t’excuser Craine, t’as rien fait de mal. » - « J'ai au moins le sentiment que j'aurais pu faire plus, à un moment ou à autre. » Rory confia tout bas, incapable de ne pas se rejeter la faute lorsque les personnes impliquées lui étaient aussi proches. Peut être bien que Ruben et Nina avaient voulu garder ça pour eux et vivre ces tourments dans l'intimité de leur couple, mais ce ne serait pas vraiment Rory s'il ne songeait pas à ce qu'il aurait pu faire différemment pour les aider ou, à défaut, leur éviter toutes ces conséquences sur leur vie. « Ouais. Ça faisait partie des effets secondaires, écoute. Elle voulait de l’espace et du temps, je tente de faire au mieux pour qu’elle puisse avoir les deux. » Quand bien même il aurait préféré que les choses soient plus simples et que Ruben et Nina puissent panser leurs plaies ensemble, il était au moins rassuré de voir que son ami avait toujours le bien-être et les intérêts de sa sœur bien à cœur ; sans en être pour autant surpris une seule seconde. « Elle a toujours été comme ça, je suis sûr que c'était juste sa manière de réagir à tout ça. C'est l'inverse qui aurait été plus surprenant, quand on connaît Nina. » Il tenta un sourire, forcé de reconnaître qu'elle avait toujours eu sa propre façon de gérer les problèmes et que lui-même avait très tôt appris à ne pas insister outre mesure quand elle avait besoin de se retrouver seule, comme c'était parfois le cas.

« J’aime vraiment ta sœur, Rory, ça j’en ai jamais douté. » Et c'est un sourire sincère, quoi qu'encore quelque peu timide, qui s'étira à cet instant sur les lèvres de l'acteur. Un sourire synonyme d'une part de soulagement, inévitablement, quand bien même une part de lui n'avait jamais vraiment douté des sentiments du brun à l'égard de sa sœur. Rory s'était simplement fourvoyé sur tant de choses, inconscient d'avoir eu de telles œillères devant les yeux lorsque le couple formé par les deux médecins traversait une passe difficile, qu'il craignait de s'être encore trompé davantage. « J’arrêterai pas de le dire, c’est elle la femme de ma vie. J’ai pas prévu de changer nos plans, si ça peut te rassurer. » Ruben savait tout ce que ces mots symbolisaient pour Rory, pour l'avoir vu suspendu à ses lèvres durant de longues minutes mais aussi et surtout parce qu'il n'était pas sans savoir toute la tendresse que l'acteur avait toujours eu pour lui et pour le couple qu'il formait avec Nina. « Je crois que j'avais besoin de te l'entendre dire. Pas parce que je doute de toi, je te promets que c'est pas ça, mais parce que maintenant... je sais que rien n'est perdu. » Qu'ils pouvaient encore trouver des solutions, tenter de régler leurs problèmes et de revenir à l'équilibre qu'ils avaient auparavant connu. Ils avaient été heureux, et ça pourrait être à nouveau le cas. Il n'imaginait simplement pas un monde dans lequel Nina et Ruben ne partageraient pas la vie l'un de l'autre : tout le monde s'entendait bien trop pour dire qu'ils étaient faits l'un pour l'autre. « Je sais que Nina t'aime aussi et que même si ces temps-ci la communication est compliquée, vous saurez faire un pas l'un vers l'autre le moment venu. » Sa sœur s'était forgée une certaine carapace, mais il voulait croire qu'ils finiraient par dépasser tout ça et par se parler comme ils en avaient assurément besoin. Il voulait croire qu'ils désiraient autant l'un que l'autre que les choses s'arrangent, et c'était là le plus important. La seule chose qui comptait vraiment, même.

Finalement, cette histoire ne faisait que lui rappeler l'époque douloureuse où il avait bien cru avoir lui-même perdu l'amour de sa vie, une chose qu'il voulait à tout prix éviter à Ruben. Aussi heureux que Swann et lui puissent être aujourd'hui, Rory n'avait jamais connu de pire douleur que d'être séparé de l'anglais et encore aujourd'hui l'impression qu'ils avaient perdu du temps tous les deux faisait parfois ressurgir quelques brefs regrets. Regrets dont Ruben et Nina méritaient d'être préservés. « J’y travaille, Rory, j’y travaille. Je sais pas combien de temps ça va prendre, je sais pas ce que ça va donner, mais promis j’y travaille. » Rory secoua doucement la tête, souhaitant plus que n'importe quoi d'autre se raccrocher aux paroles de Ruben, qui à cet instant étaient tout ce qu'il avait besoin d'entendre pour s'y accrocher. « Je sais que tu fais ce qu'il faut. » Probablement déjà depuis plusieurs semaines, et ce dîner cauchemardesque qui les avait tous profondément remué. Nina et lui avaient certainement besoin l'un comme l'autre de prendre un certain recul pour retrouver leur complicité d'antan, mais il savait que Ruben se battait au quotidien pour que son couple ressorte plus fort de cette mauvaise passe. Il le connaissait, il savait tout ce que sa sœur avait toujours représenté pour lui. « Je te l'ai déjà dit et je vais te le répéter une fois encore : ma sœur a de la chance de t'avoir. » Il lui assura, cette fois dans un sourire dont l'éclat se voulait un peu moins triste. Il avait toujours pensé que Ruben avait tout pour rendre Nina heureuse, et même s'il n'avait pas pu prédire que les choses se compliqueraient au cours des derniers mois, l'acteur savait que sa sœur était entre les mains d'un homme qui se souciait véritablement d'elle et qui se battrait pour elle autant que pour leur couple. Ruben aimait Nina, oui, il suffisait de l'entendre parler de sa sœur pour en être absolument certain. « Parce que je sais que toi, tu ne la blesseras jamais consciemment. » Il avait toujours été armé des meilleures intentions, et ça n'était pas seulement l'ami qui le connaissait depuis maintenant de nombreuses années qui s'en était fermement convaincu. Il l'avait souvent vu avec Nina, avec le reste de sa famille, irradier comme s'il y avait lui-même trouvé un deuxième foyer. Il ne nuirait pas à sa sœur, il ne leur nuirait pas à eux non plus. « Et si j’y arrive pas, je compte sur toi pour être là pour elle. » Une possibilité que Rory n'était pas sûr de vouloir envisager mais qu'il accueillit par un hochement de tête un peu plus fébrile, ses yeux lentement relevés dans ceux du chirurgien. « C'est promis. Mais ne m'en veux pas d'espérer qu'elle aura pas besoin de mon réconfort et que vous dépasserez tout ça. » Parce que c'était simplement dans sa nature, de toujours espérer qu'une éclaircie viendrait chasser les nuages. Ce n'était pas différent cette fois-ci : il voulait croire que leur couple, qu'il savait fort et uni avant toute cette histoire, s'en relèverait sans son aide. « Vous vous en sortirez, Ruben. Laissez-vous simplement un peu de temps. » Ils pouvaient être les plus exigeants avec eux-mêmes dans leur métier, mais ils avaient besoin de prendre le temps de retrouver leur équilibre personnel. Du temps, voilà qui ferait un bon début.

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« J'espère qu'au moins personne ne vous a jamais fait de remarque à l'hôpital. Je veux dire, ce serait vraiment injuste. » Il pinça ses lèvres en une ligne fine. « La vie est injuste, tu sais. » Parce-que bien sur qu’ils recevaient des remarques à l’hôpital, bien sur que le personnel hospitalier ne savait pas plus que d’autre simplement se mêler de ses affaires et qu’il était bien plus facile de regarder de quelle couleur était l’herbe chez les voisins. Ils recevaient des remarques, plus de celles qu’ils se découvrent au détour des couloirs. « Vous n'avez de comptes à rendre à personne, c'est tout ce qui compte. » De toutes façons, tant que cela concernait sa vie privée, Ben n’était pas du genre à s’arrêter sur les on dit; tant que cela restait sur cet aspect là de sa vie et que sa réputation en tant que professionnel ne faisait douter personne, il ne perdait pas de temps à relever les commérages. « Je sais, je sais. » Ils avaient des comptes à rendre, mais entre eux et pas à d’autres qui n’avaient pas à mettre leur nez dans leurs affaires: les problèmes qui se passaient entre Nina et Ruben restaient à être résolus entre eux et seulement eux. Ceci étant dit, Hartfield pensait tout de même qu’une partie de ces derniers se devaient d’être explicités à Craine à ses côtés, autant parce-qu’il était concerné par une partie de ce qu’il se passait dans le couple que parce-que Ben avait besoin de le mettre au courant de ce qu’il se passait autant dans sa vie que dans sa tête. Il faisait l’homme fort trop souvent, là où il n’était qu’un homme comme les autres en réalité une trop grande partie du temps, à nécessiter la présence de ses proches. « On est bien souvent les pires juges qui soient quand ça nous concerne de près, pas vrai ? » Et même si ce n’était pas sous cette forme là qu’il s’attendait à un soutien quelconque de la part de son ami, il prenait tout de même. Car il savait que ce dernier était assis à une place délicate et qu’il faisait de son mieux pour concilier deux parties de lui dans cette situation. « Il faut croire, apparemment. » Le petit sourire de Ruben était à peine amusé, surtout bien plus attristé; ils étaient deux médecins accomplis et aucun des deux n’avait pu se dire sérieusement qu’un jour, effectivement, ils pourraient être confrontés à l’idée qu’un enfant puisse naitre de leur union. C’était idiot, et bien sur que Ben s’en voulait en grande partie tout de même. S’il repoussait la faute sur Nina pour tout un pan de cette histoire, les responsabilités étaient partagées de ne pas avoir su anticiper la situation. Comme quoi, avoir un si joli diplôme et ne pas savoir l’appliquer à soi-même était quand même le comble des choses.

« J'ai au moins le sentiment que j'aurais pu faire plus, à un moment ou à autre. » - « Vraiment Rory, te fais pas de bile pour rien. » Il connaissait, il savait exactement la façon dont le brun à ses côtés avait tendance à réagir et il n’était pas question qu’il le laisse faire. Il n’avait rien à se reprocher et si les deux jeunes fiancés n’avaient rien dit, c’était pour ne pas impliquer les personnes qui n’avaient pas besoin de l’être lorsqu’il n’était pas nécessaire de partager les inquiétudes. Certes, cela faisait du bien d’enfin en parler avec lui, mais Rory n’avait pas à s’en vouloir de ne pas avoir été à leurs côtés plus tôt: ils étaient ceux ayant mis des barrières. « Elle a toujours été comme ça, je suis sûr que c'était juste sa manière de réagir à tout ça. C'est l'inverse qui aurait été plus surprenant, quand on connaît Nina. » Un léger soupire échappa un peu malgré lui à Ruben. Il savait, il connaissait tout ça; ce n’était pas pour autant que cela ne l’impactait pas, en réalité. « Je me serais inquiété aussi. » Même si aucune des deux possibilités à cette situation ne lui plaisait, il devait admettre en réalité qu’il n’avait pas été surpris par la réaction de la jeune femme. Ils se connaissaient depuis longtemps, elle et lui, et bien plus que tout ce qui pouvaient laisser paraitre face au reste du monde en réalité; ils s’étaient toujours montrés assez discrets sur leur relation, bien qu’officielle depuis longtemps, mais les marques d’affection ne se faisaient pas en public. Raison pour laquelle Ruben n’hésita pas un seul instant pour réaffirmer auprès de Rory que sa soeur était la femme de sa vie, parce-que malgré tout cela restait vrai. [color:99e0=584dbf]« Je crois que j'avais besoin de te l'entendre dire. Pas parce que je doute de toi, je te promets que c'est pas ça, mais parce que maintenant... je sais que rien n'est perdu. Je sais que Nina t'aime aussi et que même si ces temps-ci la communication est compliquée, vous saurez faire un pas l'un vers l'autre le moment venu. » Oh, qu’il aimerait que les choses soient aussi simples que la vision que Rory pouvait avoir de tout ça. Ben était bien au fait qu’il était en grande partie responsable que tout ne soit plus aussi rose qu’avant, mais cette partie là n’était pas celle qui était connue d’autrui; tout ce qui se passait de travers entre Nina et lui ces derniers temps n’avait pas à voir avec le comportement qu’il avait dans l’ombre, mais était bien les conséquences de ce qui était de notoriété publique. « Plus qu’à faire les efforts nécessaires et être patient, en attendant. » Il avait murmuré ces dernières paroles autant pour répondre à celles de Rory que pour lui-même, il n’aurait su dire. Les efforts, il les ferait dès qu’il aurait un indice sur lesquels fournir, il n’y avait pas de doutes à avoir là-dessus; de son point de vue même, il lui semblait déjà en faire. La réalité n’était pas aussi douce et agréable à regarder, puisque les dits-efforts faits étaient en réalité simplement de s’être éloigné de sa belle pour lui laisser le temps et l’espace nécessaire. Il pouvait faire plus, Ruben, même lui le savait; mais effectivement il fallait quelle communication reparte de bon pied avec Nina pour que cela soit possible. « Je sais que tu fais ce qu'il faut. » Au moins, Rory y croyait dur comme fer pour eux tous, c’était déjà ça. « Je te l'ai déjà dit et je vais te le répéter une fois encore : ma sœur a de la chance de t’avoir. » Dans toutes autres circonstances, il serait venu ajouter un petit sourire fier et une blague allait de paire avec. Aujourd’hui, il n’avait pas du tout le coeur à ça, Hartfield. Presque: il aurait préféré que le brun ne lui répète pas ces mots, justement. Effectivement, Nina avait de la chance de l’avoir à ses côtés, c’était indéniable; dirait-il toujours la même chose, lorsque la réalité changerait de couleurs ?

« Parce que je sais que toi, tu ne la blesseras jamais consciemment. » Et à ces mots là, Ben dut se faire violence pour ne pas avoir la moindre réaction. Idem, il en aurait eu une d’ordinaire, mais qui aurait porté plutôt sur quelque-chose de léger et d’amusé; c’était peut-être le sérieux de leur conversation qui allait sauver le reste autour, pour une fois. Car ne pas avoir de réaction ou son mot à dire sur un sujet, ce n’était pas Ruben Hartfield, loin de là. Il était de ceux qui donnait leur avis même quand ce dernier n’avait pas été demandé, à aucun moment, et lorsque personne n’en avait quelque-chose à faire. Suite aux paroles de Rory, il ne pouvait se permettre de faire le moindre commentaire car il lui mentait déjà assez comme ça. Bien sur qu’il appréciait que Craine ait cette vision là de lui et qu’il soit apte à comprendre que consciemment, il était vrai, Ben ne désirait pas blesser sa soeur. En revanche, il n’aurait plus le même discours, s’il découvrait que la tromper dans son dos n’entrait pas dans la catégorie consciemment de Hartfield; parce-que c’était peut-être la subtilité qui dérangeait le plus, ici. Alors, il se contenta de pincer un peu plus les lèvres, de laisser son regard aller au loin, vers l’horizon, un instant de plus. Il laissa le silence s’installer un peu plus longtemps, également - il ne comptait de toutes façons pas répondre aux paroles du brun. Il préféra rebondir sur toute autre chose, sur un élément où il pouvait ajouter son commentaire et son avis, plutôt que de laisser l’attention de leur conversation portée davantage sur ce que Rory avait dit. A travers tout ça, il savait parfaitement que ce dernier était son ami mais était surtout avant tout le frère de Nina, et que si parti il y avait un jour à choisir au cas où malheureusement les choses tourneraient mal, ce ne serait pas celui de Ben qu’il prendrait. Il entendait, il comprenait; à sa place, il aurait la même façon de penser et de réagir. Alors, plutôt que d’argumenter sur cette idée là alors qu’ils étaient tous les deux d’accord, Ruben ne pouvait que demander à Craine de veiller sur sa cadette si un jour il ne pouvait plus le faire pour eux deux. « C'est promis. Mais ne m'en veux pas d'espérer qu'elle aura pas besoin de mon réconfort et que vous dépasserez tout ça. Vous vous en sortirez, Ruben. Laissez-vous simplement un peu de temps. » Avec une petite moue, il hocha fébrilement la tête. « Du temps, oui. » Il avait l’impression que c’était la seule arme dont ils disposaient, de toutes façons, du temps. Cependant, lui ne pouvait perdre de vue que malheureusement, plus le temps passait et moins la discussion revenait naturellement entre; plus le temps passait, et moins il accordait aussi de pensées à celle à laquelle il était supposé s’unir dans les mois ou années à venir. Ce n’était pas de sa faute, simplement qu’il avait de quoi occuper son esprit et ses moments de solitude, et qu’il avait toujours été du genre à délaisser ses émotions et sentiments au profit d’occupations lorsqu’il avait peur d’être blessé. Ce n’était pas la bonne solution, ça ne l’avait jamais été, mais c’était celle qu’il avait en habitude et dont il avait du mal à se défaire. « Ca semble long parfois, de se laisser un peu de temps. » Les mots du jeune chirurgien avaient été accompagnés d’un petit soupire, alors qu’il haussait vaguement les épaules. Bien sur que ce n’était pas spécialement le type de commentaire que Rory avait envie d’entendre, mais c’était le type de pensée que Ben avait besoin d’exprimer à un ami. « Elle me manque, tu sais. » Et même s’il se sentait idiot de le dire, les faits étaient les faits: il avait beau combler l’absence de Nina par d’autres moyens détournés, sa présence au quotidien lui manquait tout de même.

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you're on your own, kid.

@RUBEN HARTFIELD & RORY

« Je me serais inquiété aussi. » Des mots auxquels Rory répondit par un sourire empli de compassion, lui qui n'imaginait que trop bien à quel point toute cette situation devait être pesante autant que douloureuse, pour Ruben autant que pour sa sœur. Il l'entendait à sa façon de parler d'elle et il le voyait à la manière que le chirurgien avait de détourner le regard lorsque son prénom était mentionné : il voulait tout arranger et retrouver sa complicité d'antan avec Nina, elle dont il parlait comme de l'amour de sa vie. Rory n'avait jamais réellement douté que ce soit le cas, quand bien même l'incident survenu à ce dîner de famille et les tensions apparentes au sein du couple avaient bousculé beaucoup de ses certitudes. Il les connaissait, il savait que ces deux-là s'étaient bien trouvés et il n'imaginait rien pouvoir les éloigner définitivement l'un de l'autre. Pas même ce qui leur valait aujourd'hui de jongler entre les rancœurs et les non-dits. « Plus qu’à faire les efforts nécessaires et être patient, en attendant. » Rory avait toute confiance en Ruben pour faire les bons choix et laisser à sa sœur juste assez d'espace pour lui permettre de digérer la situation puis, il l'espérait, de revenir vers lui lorsqu'elle s'y sentirait prête. « Je sais que tu le feras. Et je suis sûr que ça portera ses fruits. » Il n'envisageait tout simplement pas le contraire, Rory, il s'y refusait même formellement. Savoir qu'ils traversaient toutes ces épreuves avait déjà porté un coup à l'image idéalisée qu'il avait toujours eu du couple formé par sa sœur et son ami ; il ne supporterait pas que l'amour qui les avait toujours uni et dont il n'avait jamais eu à douter laisse la place à une montagne de regrets. Ils méritaient mieux que ça, et quand bien même pour l'heure la communication restait compliquée et leur fierté peut être un peu trop prédominante pour mettre tous leurs différends de coté et avancer vers une réconciliation, il les connaissait suffisamment pour savoir qu'ils se battraient. Parce que c'est ce qu'ils étaient : deux battants, qui n'avaient jamais laissé le moindre obstacle les arrêter. Et il n'imaginait pas qu'il puisse en être autrement pour leur couple, pas alors qu'ils tenaient autant l'un à l'autre. « Ma sœur est peut être un peu têtue, parce qu'on l'est tous plus ou moins chez les Craine, mais s'il y a une chose dont je suis sûr c'est qu'elle t'aime. » Il le savait pour avoir vu l'impact que Ruben avait eu sur sa vie, quand bien même le couple n'avait jamais rivalisé de démonstrations d'affection devant lui. Il lui avait toujours suffi de les observer ensemble, de les entendre parler l'un de l'autre, pour savoir que ce qui les unissait était réel et particulièrement profond. Que leur amour avait tout d'authentique, même s'il réalisait aujourd'hui qu'il n'était pas moins dénué d'imperfections que les autres. Il lui fallait simplement l'accepter.

« Du temps, oui. Ça semble long parfois, de se laisser un peu de temps. » Son regard attristé chercha celui de Ruben, chez qui il percevait le même dépit que celui-ci qui l'avait lui-même habité lorsqu'il avait perdu Swann quelques années plus tôt et ne supportait pas l'idée que tout ce qu'ils avaient partagé et tout ce qu'ils auraient pu être appartiendrait au passé. La situation se voulait heureusement différente, le couple formé par Ruben et Nina n'en étant pas à envisager une séparation, mais il savait définitivement combien le cœur de son ami devait lui paraître lourd, depuis que les choses étaient compliquées avec sa sœur. Au moins pouvait-il lui assurer que même les situations les plus douloureuses trouvaient parfois une issue particulièrement heureuse ; il en faisait l'expérience lui-même, auprès de Swann, et n'aurait jamais pensé que la vie lui sourirait à nouveau à ce point. « Je sais ce que tu ressens. » Et il était la preuve que rien n'était jamais désespéré, même lorsqu'on se demandait encore si ça valait la peine d'y croire. Aujourd'hui il ne pourrait pas être plus heureux, et il était convaincu que Ruben et Nina s'en relèveraient eux aussi. « Le temps s'écoule différemment lorsqu'on est loin de la personne qu'on aime. » Quand bien même la séparation prenait pour eux la forme d'une distance qui s'était sournoisement immiscée entre eux et compliquait tout ce qui à une époque se voulait pourtant simple. Ruben devait avoir l'impression que Nina lui échappait, et Rory compatissait du fond du cœur. « Elle me manque, tu sais. » - « Je sais, Ruben. Et je suis certain que tu lui manques aussi. » Et ça lui serrait le cœur de le voir ainsi, sans pouvoir faire davantage que lui assurer que les choses rentraient dans l'ordre s'il se montrait patient et qu'il faisait suffisamment d'efforts en ce sens. « J'aimerais pouvoir faire quelque chose, mais je crois que ce serait pire que mieux si ma sœur pensait que tu m'as envoyé lui parler plutôt que de le faire en personne. » Quand bien même ils savaient que ce ne serait pas le cas, il ne voulait pas prendre le risque d'intervenir et d'empirer les choses, même armé des meilleures intentions qui soient. Il savait que ça n'était pas la solution, peu importe à quel point il voudrait pourtant les aider à briser la glace et se retrouver. « Dis-le lui, qu'elle te manque. Fais-le dès que tu en as l'occasion, même si ça te semble dérisoire. » Même si le dialogue était compliqué, même si elle semblait réticente à la moindre approche ou que ça semblait trop tôt, ou trop maladroit. « Elle a sûrement besoin de l'entendre, et toi t'as rien à perdre à essayer. » Et plus que tout, Rory était persuadé que la réciproque était vraie : Ruben manquait forcément à sa sœur, il la connaissait trop bien pour en douter. « Tout s'arrangera. Et bientôt, on repensera à tout ça comme à un mauvais souvenir. » C'est ce qu'il souhaitait du plus profond de son cœur, Rory, incapable de voir les personnes qu'il aimait souffrir.

(c) harley

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@rory craine

« Je sais que tu le feras. Et je suis sûr que ça portera ses fruits. » Etre patient, il savait faire oui, c’était vrai. Faire les efforts nécessaires… Disons que pour ce côté là des choses, il avait un peu plus de pain sur la planche. Pas qu’il ne souhaitait pas les faire, loin de là, seulement qu’il avait plutôt l’impression d’être limité dans ses libertés d’action pour y parvenir. « Ma sœur est peut être un peu têtue, parce qu'on l'est tous plus ou moins chez les Craine, mais s'il y a une chose dont je suis sûr c'est qu'elle t’aime. » Sans même qu’il s’en aperçoive réellement, un fin sourire s’était glissé sur les lèvres de Ruben. Bien sur que Nina était têtue, c’était là un des traits de caractères qui lui plaisait surement le plus. Effectivement, également, c’était là quelque-chose qui se retrouvait chez bien d’autres Craine, et qui n’avait donc aucunement surpris Hartfield quand il s’était aperçu que la cadette de Rory avait elle aussi hérité de cette forte tête. Et puis, dans tous les mots du brun, l’entendre dire que sa soeur l’aimait ne faisait pas de mal. Certes, d’ordinaire, ils n’étaient pas en manque de marque d’affection l’un pour l’autre, Nina et lui; ce n’était peut-être de façon aussi évidente que cela pouvait l’être pour d’autres couples, mais entre eux cela fonctionnait. Une fois, Ruben était allé jusqu’à chercher la meilleure opération de l’hôpital pour inclure sa fiancée dans l’équipe et lui servir cette surprise sur un plateau - ce n’était pas très juste et peut-être un brin trop poussé, mais aux yeux du jeune chirurgien cela se rapprochait d’un magnifique cadeau.

En attendant, malheureusement, il se devait de prendre son mal en patience pour revoir toutes ces choses là revenir à la normale, et même s’il savait être très patient, ce n’était jamais agréable. « Je sais ce que tu ressens. Le temps s'écoule différemment lorsqu'on est loin de la personne qu'on aime. » Et Ruben aurait préféré que ce ne soit pas le cas, parce-que cela reflétait pour Rory d’autres moments de sa propre vie. Inconsciemment, peut-être, c’était là une des raisons qui avaient poussé Ben à ne pas en parler à son ami: il ne voulait pas remuer le couteau dans des plaies qui pouvaient encore être fraiches pour le brun à ses côtés. Certes, cela faisait du bien d’en discuter avec quelqu’un - même s’il aurait préféré pouvoir exposer le fond du problème sans savoir d’avance que cela aurait des répercutions impardonnables -, mais jamais n’avait été son intention initiale de potentiellement blesser Rory au passage. Et puis: il n’était pas réellement un adepte de l’idée que l’on puisse le prendre en pitié de la sorte, alors que cela n’allait pas jusque là. Il ne mentait pas, lorsqu’il disait que celle supposée devenir sa femme lui manquait, et qu’il l’aimait, sur ces points là il ne mentirait jamais. Mais disons qu’il avait trouvé d’autres occupations pour passer le temps qui lui faisait assez facilement oublier la réalité de sa situation. C’était donc une saveur douce-amer qu’il pouvait percevoir lorsqu’il parlait de sa situation personnelle avec son ami. « Je sais, Ruben. Et je suis certain que tu lui manques aussi. » Ce fut avec une pointe d’humour qu’il alla de son petit commentaire aux mots de Rory. « J’espère que c’est le cas. » Il l’espérait vraiment, promis. « J'aimerais pouvoir faire quelque chose, mais je crois que ce serait pire que mieux si ma sœur pensait que tu m'as envoyé lui parler plutôt que de le faire en personne. » Secouant la tête doucement, Ben balaya l’idée de Craine d’un revers de la main. « Jamais je te demanderais d’intervenir entre nous, t’en fais pas. Et puis oui, effectivement, c’est pas forcément judicieux de toutes façons. » Les choses n’étaient déjà pas au beau fixe entre les deux fiancés, Rory n’avait pas besoin de se glisser au milieu de tout ça. Surtout que c’était le frère de Nina. « Dis-le lui, qu'elle te manque. Fais-le dès que tu en as l'occasion, même si ça te semble dérisoire. » Relevant son regard vers son ami, il soupira finalement. Peut-être était-ce aussi simple que cela, effectivement. « Elle a sûrement besoin de l'entendre, et toi t'as rien à perdre à essayer. » - « T’as surement raison. » Au pire, elle lui dirait qu’elle avait besoin d’un peu plus d’espace, d’encore un peu de temps. Et au mieux, il lui manquait aussi et les choses pourraient reprendre un semblant de normalité. C’était tout ce à quoi il aspirait, aux côtés de Nina: d’une normalité qu’ils avaient pourtant connu pendant des années. « Tout s'arrangera. Et bientôt, on repensera à tout ça comme à un mauvais souvenir. » Laissant son dos se coller contre le banc, ce fut finalement dans un énième soupire que Ruben laissa sa tête glisser doucement pour se poser sur l’épaule de Rory. Bientôt, ils pourraient tous repenser à ça comme à un mauvais souvenir, et le temps savait guérir bien des blessures. Là était des élément en lesquels Ruben réussissait à croire assez facilement, parce-que c’était une version de l’avenir qui lui plaisait - et surtout qui l’arrangeait. Peut-être effectivement que dans peu de temps, il serait aux côtés de Nina et la vie reprendrait son court; de temps en temps, ils reparleraient peut-être d’un avenir à trois, avec une certaine amertume dans la voix mais avec l’expérience de savoir qu’il vaut mieux en parler que de passer sous silence des désirs inavoués.

« Merci, Rory. » Ruben avait laissé quelques instants, peut-être même quelques minutes le silence s’installer entre eux. « D’être fidèle à toi-même et de pas juger les envies des autres. » Parce-qu’aux yeux de Hartfield, il s’agissait là d’envies qui avaient différé entre Nina et lui, et non d’une erreur commise de son côté. Ruben Hartfield ne commettait pas d’erreur, que ce soit dans sa vie personnelle ou dans sa vie professionnelle - en revanche, certains différents étaient plus compliqués à exposer aux yeux du monde que d’autres, et savoir que certaines personnes étaient encore à même de passer outre leur propre vision pour se montrer présent pour un ami, ce n’était pas rien. Surtout quand ce dernier avait entre ses mains les outils pour détruire le coeur de votre soeur.