never said it was easy.

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« Oui oui, promis je passe te chercher en revenant de chez Swann. (…) Je voulais dire en revenant de la coloc. (…) Mais si, je t'ai expliqué qu'on vivait pas encore techniquement ensemble. (…) Haley, bon, je te rappelle. » Et il était probable que sa sœur le rappelle dans la minute pour demander des explications qu'il lui avait pourtant déjà servi des dizaines de fois. Des explications qui cette fois encore vaudrait à Haley de lui demander quand est-ce que Swann et lui projetaient d'emménager officiellement ensemble et auxquelles Rory se contenterait de répondre que c'était un projet, bien sûr, mais qu'ils avaient décidé d'y aller en douceur depuis l'officialisation de leur relation. Vivre officiellement avec son petit-ami était tout ce que Rory souhaitait au plus profond de son cœur mais il n'était pas sans savoir qu'une partie des repères de Swann se trouvait aussi dans cette colocation qu'il avait occupé des mois durant, raison pour laquelle il ne l'inciterait jamais à précipiter les choses. Ils avaient tout le temps du monde, à présent, et ce n'était pas de garder deux appartements qui changerait quoi que ce soit à leur amour ou à la beauté des moments qu'ils partageaient tous les deux. Ça ne changeait même rien, en réalité, parce qu'il n'y avait pas un soir sans que Swann et lui se retrouvent et qu'à compter du moment où il pouvait l'embrasser et le serrer contre lui aussi souvent qu'il en aurait envie, Rory voulait bien faire preuve de patience. Il l'aimait et voulait plus que tout bien faire les choses, pour lui.

Conduire jusqu'à Toowong était devenu une habitude même pour Rory qui rejoignait souvent Swann à la coloc' et y faisait de nombreuses allers et retours, lesquels lui avait notamment permis de rencontrer ses autres occupants. Maisie et Sofia en tête, et Arthur depuis plus récemment. Des visites qui lui valaient parfois d'y laisser une partie de ses affaires, et c'est justement pour remettre la main sur un bouquin prêté par son agente et abandonné quelque part dans la chambre de Swann qu'il faisait le déplacement aujourd'hui. L'anglais aurait dans le cas contraire probablement proposé de l'y conduire lui-même ou de passer lui déposer son livre au loft, mais Rory préférait le ménager autant que possible depuis ce qui s'était passé avec Murphy sous son toit et aimait mieux le savoir en convalescence au loft. Ni lui ni Swann n'aimait tellement y repenser mais l'australien avait véritablement eu une peur bleue lorsqu'il avait posé les yeux sur le visage marqué et la main blessée de son petit-ami. Il désirait aujourd'hui plus que tout le protéger et chasser les souvenirs de cette soirée, et pour ça il comptait sur ce voyage que Swann et lui prévoyaient de faire pour mettre rien qu'un peu de distance entre Brisbane et eux. Le temps de quelques jours, tout au plus, mais assez longtemps pour qu'ils mettent cette histoire derrière eux et aillent de l'avant, plus unis que jamais.

Arrivant devant la porte de l'appartement, Rory frappa comme il en avait pris l'habitude mais se figea légèrement lorsque la porte s'ouvrit sur la silhouette d'Arthur. Non pas parce qu'il n'était pas ravi de le voir, au contraire, mais parce qu'il aurait peut être su sur quel pied danser avec Maisie et que le brun et lui avaient un peu moins pris le temps de faire connaissance. Aujourd'hui serait peut être l'occasion ? Il l'espérait en tout cas. « Salut. » Maintenant qu'il y repensait, Arthur n'avait jamais paru particulièrement enthousiaste à l'idée de le savoir dans la vie de Swann et c'était une chose que Rory n'avait jamais été tenté de lui reprocher. Peut être qu'il était simplement comme ça avec tout le monde, ou peut être qu'il ne s'attendait pas à ce que son ami fréquente un homme. Si tel était le cas, il lui laisserait le temps de se faire à l'idée et tâcherait de lui prouver qu'il n'avait pas de raison de douter de ses intentions envers Swann. Il l'aimait profondément et comptait faire en sorte qu'ils n'aient plus jamais à être séparés. C'était ce que tout ami voudrait entendre, n'est-ce pas ? « Je sais pas si Swann t'a prévenu, je viens juste récupérer un livre que j'ai oublié la dernière fois. » Il aurait bien attendu une prochaine occasion pour mettre la main dessus mais Donna en avait précisément besoin et il lui avait promis de le lui ramener à l'agence demain matin. La connaissant, elle l'avait probablement emprunté à quelqu'un qui l'avait déjà emprunté à quelqu'un d'autre – c'était sans fin, mais l'important était qu'il puisse tenir sa promesse. « Je peux entrer une minute ? » Il demanda sans savoir si les filles étaient là elles aussi ou si Arthur était jusqu'à présent tout seul. A moins que... « Je te dérangerai pas longtemps, tu peux faire comme si j'étais pas là. » Parce qu'il pourrait très bien avoir de la compagnie, justement, et vouloir profiter d'avoir la coloc' pour lui seul pour y recevoir quelqu'un. Mais ça, de toute façon, ça ne regardait pas Rory.

Officiellement, mon appartement est terminé depuis des jours, prêt à me voir emménager. Lentement, mes affaires quittent la colocation pour s’acheminer vers le loft, trouvant une place dans les innombrables placards. De mon simple avis, il est bien inutile de symboliser mon départ par une quelconque annonce, Swann a probablement déjà compris que je ne dormais plus vraiment sur son canapé. Pourtant, je prends mon temps. Aussi étrange que cela puisse paraître, je pourrais presque concevoir de m’être habitué à cette vie à plusieurs, non pas que j’apprécie de partager mon quotidien ou bien même avoir à dormir sur un futon à ressort. Disons que leur présence s’en venait à réduire le silence qui résonne bien trop fort au sein de mon appartement immense et sans réelle trace de vie. La pensée ne dure qu’une seconde, la plupart du temps, avant de me souvenir que Maisie est imbuvable le matin, que les trois voudraient me forcer à la moindre corvée et qu’avec la présence de Swann, je suis constamment surveillé. Ce fut marrant le temps que cela a duré, mais je préfère encore retrouver un véritable lit et ma solitude. Alors, me voilà au milieu du salon à jeter dans une valise les dernières affaire que j’avais consciemment laissé traîner par ici. Le processus se pourrait d’être bien plus rapide, mais je laisse filer les minutes à fouiller dans un tiroir ou bien m’assurer de manger les derniers gâteaux préférés de Maisie, en guise de petits souvenirs. J’attends peut-être aussi de voir si Swann va revenir, sans jamais lui envoyer de message pour connaître ses intentions. Au mieux, je pourrais prétendre vouloir regarder l’évolution de sa blessure avant de prétexter une énième soirée ou la préparation d’une réunion pour mieux filer au bout de quelques minutes. On ne va pas s’épancher dans des remerciements et autres joyeusetés, je ne quitte pas le pays – pas encore – et compte bien revenir l’embêter sans raison précise dès que l’occasion se présentera.

Le bruit strident de la sonnette vient interrompre mon débat interne pour savoir si le tee-shirt entre mes mains est réellement le mien ou s’il n’appartiendrait pas plutôt à Swann. Dans l’hésitation, je le dépose dans la valise avant de me diriger vers la porte. Je ne suis pas chez moi et pourtant je n’hésite pas une seconde à aller ouvrir, au cas où cela s’avèrerait intéressant. « Salut. » Eh bonne pioche. Le grand con qui me salut toujours d’un air benêt lorsqu’il s’attarde un peu trop dans l’appartement. « Swann n’est pas là. » Je pourrais tout simplement faire claquer le panneau de bois sans jamais le laisser entrer. Ce n’est pas l’envie qui manque, mais c’est aussi la première fois que je me retrouve seul avec Rory. Le fameux petit-ami, celui qui préfère gérer son ex hystérique plutôt que s’assurer de la santé de son compagnon. « Je sais pas si Swann t'a prévenu, je viens juste récupérer un livre que j'ai oublié la dernière fois. » Oh, il l’a probablement fait ce matin avant de partir, mais je n’avais pas encore bu mon café et j’ai marmonné pour prétendre être intéressé par ses propos. Ça me vaudra de jamais rien écouter. « Non, il ne m’a rien dit. » Autant partir du principe que je ne suis pas au courant, pour mieux laisser fuser l’idée que Swann ne parle pas de lui. Quand la réalité est tout autre, tant l’anglais ne cesse de me rabâcher les oreilles à propos de son mec si parfait, si génial, si amoureux et blabla. J’en ai la nausée à chaque fois. « Je peux entrer une minute ? » Je prétends hésité quand l’occasion est bien trop belle pour le laisser filer. Alors, je m’écarte pour le laisser pénétrer dans l’appartement tandis qu’il se justifie encore. « Je te dérangerai pas longtemps, tu peux faire comme si j'étais pas là. » Oh non, mon gars, t’est là et c’est bien le problème. T’es là, tu t’imposes dans la vie de Swann au point de le faire changer de bord et de le laisser croire que certaines de tes actions sont normales quand c’est bien loin d’être le cas. « Dis-moi, par curiosité, comme ça… Ça t’arrive souvent de laisser Swann repartir avec des bleus ou la main en sang ? » J’ai pas le temps pour les conversations d’usages ou autre politesse, le fameux Swann pouvant rentrer à tout moment, puisqu’encore une fois je n’ai rien écouté de son emploi du temps. « Ou de le laisser penser que ton ex vaut mieux que lui ? » Tu vas apprécier d’être venu garçon, je te le promets.

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Préparé à être accueilli par l'un des colocataires de Swann, Rory ne put prédire qui se retrouverait face à lui et encore moins que celui qui lui ouvrirait la porte serait la personne qui semblait toujours peu enthousiaste à l'idée de le voir traîner dans les parages. Arthur avait posé ses valises à la coloc' à peu près au moment où Swann et lui avaient décidé de se laisser une seconde chance et d'en informer leurs proches, ainsi Rory ne pouvait pas lui en vouloir d'avoir peut être besoin d'un peu de temps pour se faire à l'idée. Il aimait profondément Swann et ne renoncerait à leur avenir ensemble sous aucun prétexte, mais parce qu'il savait qu'Arthur comptait pour son petit-ami Rory ferait les efforts nécessaires pour simplifier les choses. « Swann n’est pas là. » Et soudain, ce fut comme si un courant d'air froid l'avait brusquement traversé. Rory était peut être assez idéaliste pour vouloir voir un bon coté à tout, mais ici difficile d'ignorer que l'ambiance se voulait glaciale depuis qu'Arthur avait ouvert la porte. Peut être le dérangeait-il ? Peut être tombait-il simplement au mauvais moment ? « Oui, oui, je sais. Je suis juste de passage, Swann est au courant. » Son petit-ami se trouvait justement au loft où Rory avait insisté pour qu'il se repose au maximum faute de pouvoir de toute façon travailler dans son état. L'acteur lui avait promis qu'il ne serait pas long et qu'ils pourraient passer toute l'après-midi ensemble, à son retour, non sans qu'il en profite pour veiller personnellement sur l'anglais. « Non, il ne m’a rien dit. » Ce n'était sans doute pas une chose dont Swann avait jugé bon d'informer Arthur, après tout Rory ne l'embêterait qu'un instant et serait reparti avant même que le colocataire de l'anglais n'ait eu le temps de vraiment noter sa présence. Enfin, s'il acceptait dans un premier temps de le laisser entrer. « Oh, ça fait rien. C'est vraiment que l'affaire d'une ou deux minutes. » Une ou deux minutes de trop, peut être, à en juger par le regard intransigeant du jeune homme, face à qui Rory ne s'était avant aujourd'hui jamais retrouvé seul à seul. Il y avait de toute évidence une bonne raison à ça : Arthur ne semblait pas vraiment ravi d'échanger quelques mots avec lui, sans que l'acteur ne sache encore si cette méfiance était personnelle ou motivée par une aversion des gens en général. Il ne semblait pourtant pas particulièrement agressif, avec le reste de la coloc. Il lui était même toujours apparu comme un ami bienveillant et fidèle envers Swann, ce qui poussait aujourd'hui Rory à vouloir voir plus loin.

« Dis-moi, par curiosité, comme ça… Ça t’arrive souvent de laisser Swann repartir avec des bleus ou la main en sang ? » Oh. Semble-t-il qu'il avait désormais un début de réponse et que l'agressivité d'Arthur était bien plus personnelle que Rory l'avait d'abord espéré. Semble-t-il aussi qu'il avait eu droit à tous les détails au sujet de l'autre soir, lorsque Swann avait été blessé au cours de cet échange avec Murphy. Une soirée à l'issue de laquelle l'acteur, complètement démuni face à la manière dont les choses avaient dégénéré, n'avait pas su le convaincre de rester dormir au loft malgré les circonstances. « Non, c'est pas... » C'était loin d'être aussi simple, loin aussi d'être une soirée qu'on pouvait aisément résumer à si peu de choses. Il n'avait certainement pas laissé Swann repartir de bon cœur, et bien au contraire : il en avait souffert au plus profond de lui, tiraillé entre la peur viscérale que son petit-ami ne se sente plus jamais à l'abri sous leur toit et l'angoisse paralysante de ne pas l'avoir près de lui dans un moment où ils en avaient tous les deux besoin plus que tout. Où Swann avait besoin de lui, besoin qu'il le rassure et qu'il veille sur son bien-être. Loin de lui, Rory n'avait pu le faire et ça avait été un véritable crève-cœur pour l'australien. « Ou de le laisser penser que ton ex vaut mieux que lui ? » Cette fois, son cœur se serra et une pointe de colère le piqua en travers de la gorge, sans qu'il ne parvienne pourtant à en vouloir à Arthur. Il était l'ami de Swann, un ami sur qui l'anglais avait pu compter ce fameux soir et jamais Rory ne voudrait lui reprocher de se montrer protecteur à l'égard de l'homme qu'il aimait lui-même profondément. Ça faisait juste mal, atrocement mal, de se voir prêter des intentions qu'il serait bien incapable d'avoir quand il était question de Swann. « Je ferais jamais une chose pareille. » Et l'immense tristesse au creux de son cœur s'expliquait en partie par la question qu'il ne pouvait malgré lui s'empêcher de se poser : est-ce ainsi que Swann avait ressenti les choses ? Est-ce ces mêmes mots qu'il avait prononcé auprès d'Arthur, ce soir-là ? Avait-il douté de lui, ne serait-ce qu'un instant ? « Je regrette tout ce qui s'est passé l'autre soir mais ce que j'arrive encore moins à me pardonner, c'est de pas avoir su convaincre Swann de rester dormir chez nous... » La précision était nécessaire, ce loft était autant chez Swann que chez lui, c'était leur cocon. « Je t'assure que le savoir loin de moi était la dernière chose que je me sentais capable de supporter à ce moment-là. » Il avait laissé Swann partir, oui, mais à contre-coeur et avec l'impression d'avoir échoué dans son rôle de petit-ami. Il l'avait fait pour le bien de l'anglais, pour qu'il puisse se reposer au calme et ne pas avoir à gérer les conséquences de cet échange avec Murphy, mais en aucun cas ça n'avait été facile. « J'ai aidé mon ex petite-amie, c'est vrai, comme j'aurais aidé n'importe qui d'autre. Swann sait qu'il n'a aucune raison de s'en faire. Sans lui j'aurais même été incapable de lui venir efficacement en aide. » Rory était peut être pétri de doutes et d'angoisses depuis que cette soirée avait mis leurs nerfs à rude épreuve, mais de ça il en était absolument sûr : jamais il n'avait donné à Swann de raison de douter qu'il était l'amour de sa vie. Que son petit-ami n'ait pas hésité à lui donner des conseils par téléphone pendant qu'il s'occupait de Murphy en était certainement la preuve. « Je l'aime, et il n'y a que lui. Il n'y a toujours eu que lui. » Un an et demi en arrière ou bien l'autre soir, Swann avait toujours été le seul à éveiller des sentiments aussi forts chez lui, inspirant à Rory des envies et des projets d'avenir qu'il n'aurait pas pu faire avec quelqu'un d'autre. Parce qu'une part de lui avait toujours su, quelque part, qu'il ferait sa vie avec Swann. Parce qu'il l'aimait plus que tout, qu'il était son tout et tellement plus encore.

« Il m'a dit que tu t'étais occupé de lui, l'autre soir... » Lorsque Swann avait tout naturellement trouvé refuge au sein de la coloc' et qu'il avait pu compter sur Arthur pour soigner son nez et sa main blessés. L'anglais lui-même s'en était confié à lui à son retour au loft et constater qu'il avait été entre de bonnes mains après une soirée aussi éprouvante avait été un profond soulagement. « Merci. Je voulais que tu saches que je t'en suis vraiment reconnaissant. J'étais soulagé quand j'ai su qu'il avait pu compter sur toi. » Et bien que les paroles d'Arthur soient difficiles à encaisser, Rory ne pouvait faire autrement que d'y faire allusion, ayant attendu des jours de remercier l'anglais de vive voix. « On est dans le même camp, Arthur. » Il souffla ainsi, son regard retrouvant le sien. « On aime Swann tous les deux et on veut l'un et l'autre son bonheur, pas vrai ? » N'était-ce pas la raison derrière la réaction d'Arthur ? Il voulait probablement s'assurer que Rory ne le ferait jamais souffrir et c'était une intention qu'en aucun cas l'acteur ne pourrait un jour lui reprocher.

« Oh, ça fait rien. C'est vraiment que l'affaire d'une ou deux minutes. » Ce sera probablement suffisant pour en venir au cœur du sujet avant que Swann ne fasse une apparition surprise qui viendrait ruiner mes intentions. Je pourrais prétendre à une conversation emplie de politesse en tout genre attirant lentement l’attention sur la personnalité de Rory. Je crois que c’est que Swann attendrait de ma personne, que tout soit fait en douceur, sans jamais brusquer le grand dadet qui se déplace de manière incertaine au milieu de l’appartement. Prendre des pincettes n’a jamais fait partie de mes préoccupations et il est bien plus amusant de tendre le filet pour voir comment le brun cherchera à se réceptionner pour justifier une situation dont il était le seul responsable. « Non, c'est pas... » Est-ce que l’on tomberait déjà aussi facilement dans le cliché de l’explication bancale. « Si j’étais toi, je réfléchirais bien avant de terminer cette phrase. » Qu’il ne vienne pas me faire croire que ce n’est pas ce que je pense, que je me suis complétement fourvoyé sur la situation et que Swann n’était pas rentrer avec des hématomes. Mon regard s’ancre sur la silhouette du comédien qui semble proche du malaise à mesure que mes paroles se réverbèrent dans le silence inhabituel de la maison. Alors Rory, c’était quoi cette histoire ? Un malentendu ? J’aurais bien du mal à croire un tel enchaînement de coïncidence même lorsque je connais à la perfection la poisse que Swann est capable de transporter autour de lui. « Je ferais jamais une chose pareille. » Vraiment ? « Pourtant, j’invente rien. » L’anglais avait franchi la porte de la maison le nez ankylosé par un énorme bleu, la paume de la main sectionner sur une grande partie et le cœur en peine. « Je regrette tout ce qui s'est passé l'autre soir, mais ce que j'arrive encore moins à me pardonner, c'est de pas avoir su convaincre Swann de rester dormir chez nous... » Il se fout de ma gueule là ? « Convaincre ? » Bien sûr, qu’il s’est sans doute emballé dans l’emploi des mots, bien sûr qu’il n’a sûrement pas fait exprès, mais ce n’est qu’un plaisir d’appuyer sur tous les boutons en même temps à mieux admirer ses réactions. « Parce que tu le harcèles jusqu’à ce qu’il cède en plus ? » Je connais assez Swann pour savoir qu’il en faut peu pour le faire culpabiliser et donc lui faire changer d’avis, j’étais devenu un expert au fil des années pour toujours l’entraîner avec moi. « Je t'assure que le savoir loin de moi était la dernière chose que je me sentais capable de supporter à ce moment-là. » - « Par contre le savoir blessé, c’était tolérable ? » J’abuse ? Non, je ne fais que commencer. « J'ai aidé mon ex petite-amie, c'est vrai, comme j'aurais aidé n'importe qui d'autre. Swann sait qu'il n'a aucune raison de s'en faire. Sans lui, j'aurais même été incapable de lui venir efficacement en aide. » Forcément. Il a fallu que Swann joue le bon samaritain, incapable de s’éloigner d’une situation qui pourrait s’avérer dangereuse pour lui. Je laisse échapper un soupire tandis que le brun face à moi semble de plus en plus mal à l’aise, à tout vouloir justifier dans l’urgence. « Je l'aime, et il n'y a que lui. Il n'y a toujours eu que lui. » Ça me fait une belle jambe ça. Pourquoi je me suis engagé dans une conversation qui va d’office me filer la nausée. Je me fiche bien de leurs sentiments, de l’importance de leur histoire et toutes les merdes du genre.

Lassé d’un refrain que je n’ai guère envie d’entendre se répéter, je me recule quelque peu dans l’idée de me servir une tasse de café sans rien proposer à Rory. Il aura peut-être le signe de se pousser gentiment vers la sortie. « Il m'a dit que tu t'étais occupé de lui, l'autre soir... » Je hausse les épaules, je n’allais quand même pas laisser mon ami avec la main sang. « J’ai pratiqué des restes de mes années de médecine. » Il faut dire que je ne m’étais pas trop mal débrouiller au vu de la plaie de Swann aujourd’hui. Ce n’est pas parfaitement net et il aura une cicatrice, mais ce n’est pas si horrible que cela. « Merci. Je voulais que tu saches que je t'en suis vraiment reconnaissant. J'étais soulagé quand j'ai su qu'il avait pu compter sur toi. » Est-il en train de me féliciter comme on le ferait pour un gamin qui a su lasser ses chaussures sans l’aide de personne ? Il commence à me taper sur le système le bien-pensant. Je n’ai pas fait cela pour recevoir une quelconque reconnaissance de sa part ou l’attention de qui que ce soit d’ailleurs. C’est dans mes habitudes, il est vrai, mais lorsqu’il s’agit de Swann, il réside toujours une différence. Pour lui, je fais sans penser. Il fallait agir, j’ai pris les habitudes d’une vie passée pour soigner ses blessures, le secouant au passage sans que jamais il ne change son fusil d’épaule. « On est dans le même camp, Arthur. » Un rire m’échappe. « Je crois pas non. » Je n’ai pas pour habitude de me mêler de la vie privée des autres en particulier lorsque je déteste que l’on met son nez dans la mienne. Je pourrais laisser couler, prétendre que je me fiche de tout cela, mais il reste l’image d’un Swann abîmé par la vie récoltant une énième cicatrice. Ses paroles résonnent dans un coin de ma tête, lui qui a tout de suite cherché à excuser le comportement de l’homme qui me fait face. « On aime Swann tous les deux et on veut l'un et l'autre son bonheur, pas vrai ? » Mais ce n’est pas possible d’être une fillette à ce point, elle est belle l’image de l’homosexuel qui répand la joie et le bonheur dans une pluie de paillettes et de douceur. Dans deux minutes, il va me proposer que l’on se pose pour parler vernis à ongles et se faire des tresses ?! « T’as une drôle de façon de lui prouver. » En le laissant se faire tabasser par une gonzesse, sans jamais s’interposer ? Il pense que c’est de l’amour cela ? C’est tout ce que j’ai toujours connu, des relations dysfonctionnelles au possible, tout ce que Swann a su trouver sur son chemin, lui qui ose à peine hausser le ton quand quelque chose lui déplaît. Il est bien trop facile de tirer avantage de Swann, de le transformer en une marionnette qui exécutera le moindre des ordres sans jamais sourciller ou remettre les choses en question. « Ça ne fait pas de toi quelqu’un de bien. » Tu t’adresses à qui là, Arthur ? Qu’importe ce que l’on souhaite vraiment pour Swann, je vais pas m’étaler sur des sentiments qui n’ont aucune place dans la conversation. Je m’entends avec Swann sans avoir besoin de le crier sur tous les toits afin de rendre quoi que ce soit légitime. « Je t’ai à l’œil. » Plutôt deux fois qu’une au vu de l’aperçu que j’ai pu avoir l’autre soir. « Et je vais te le dire une seule fois, il arrive encore quelque chose à Swann… » Mon regard se fait plus noir que jamais. « Tu te reconnaîtras plus dans un miroir. »

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« Si j’étais toi, je réfléchirais bien avant de terminer cette phrase. » Rory ne se contentait maintenant plus de supposer qu'Arthur puisse avoir un problème avec lui, ça avait tout d'une certitude tandis que l'anglais le fixait comme s'il n'attendait qu'une occasion de lui sauter à la gorge. Si quelqu'un était pourtant capable de comprendre sa réaction lorsqu'il avait du accueillir Swann dans un état spectaculaire et préoccupant, c'était bien Rory. Rory qui tenait à lui plus qu'à n'importe quoi d'autre en ce monde. Rory qui moins que n'importe qui avait pu supporter la vision du visage tuméfié de son petit-ami. Qu'Arthur ait envie de trouver des coupables, c'était compréhensible, et dieu sait que l'acteur lui-même se reprochait tout de ce qui s'était passé cette nuit-là. Seulement il ne se contentait pas de lui mettre cette situation sur le dos, il insinuait aussi que Rory ait pu s'en réjouir au point de n'avoir pas eu le moindre scrupule à laisser son petit-ami rentrer dans l'état qui était le sien. S'il avait été là, s'il avait pu voir combien la seule idée d'être séparé de Swann lui avait brisé le cœur et combien il aurait été prêt à tout pour le retenir, jamais il n'avancerait une telle chose. « Pourtant, j’invente rien. » Subitement, c'est le cœur de l'acteur qui se serra à l'idée que Swann ait très bien pu se confier à Arthur sans imaginer une seconde que l'anglais s'en servirait ensuite pour lui reprocher ce qui était arrivé. Pourtant Rory en était convaincu, Swann n'avait pas pu se sentir menacé par la présence de Murphy, peu importe qu'elle soit son ex petite-amie ou qu'elle ait toujours été du genre entreprenante. Il le connaissait bien assez pour savoir que jamais l'australien ne pourrait la regarder avec autre chose qu'un regard amical et désintéressé. Leur relation était du passé contrairement à leur couple qui se voulait plus fort que jamais, malgré les circonstances. « C'est beaucoup plus compliqué que tu as l'air de le croire. Je t'assure que je me reproche déjà suffisamment ce qui est arrivé. » Rory n'avait pas tous les éléments lui-même, mais il pouvait définitivement affirmer qu'il s'était passé quelque chose dans ce salon que personne n'était tellement parvenu à lui expliquer. Quelque chose qui avait pourtant valu à Murphy de perdre connaissance et à Swann de terminer avec une main ouverte. Quelque chose qui lui valait aujourd'hui de s'en vouloir atrocement, au moins autant qu'Arthur, lui, semblait lui en vouloir.

Son plus grand regret, finalement, restait de ne pas avoir pu veiller sur Swann directement tel qu'il l'aurait souhaité plus que tout. « Convaincre ? » Son regard interloqué se reposa dans celui de l'anglais. « Parce que tu le harcèles jusqu’à ce qu’il cède en plus ? » L'espace d'un instant, Rory peina presque à croire qu'Arthur puisse réellement penser qu'il était question de ça, au moment précis où la santé et la sécurité de son petit-ami importaient bien plus que n'importe quoi d'autre à ses yeux. « Le harceler ? Non, je... » S'il s'était effectivement montré insistant avec l'espoir que Swann changerait d'avis et choisirait de passer la nuit au loft, c'est bel et bien un Rory résigné qui l'avait regardé partir ce soir-là. « Je voulais pas qu'il quitte l'appartement parce qu'il était pas en état d'aller où que ce soit tout seul. Il avait besoin de soins médicaux et je voulais veiller sur lui et appeler quelqu'un pour venir l’ausculter. » Il n'était peut être pas médecin lui-même et sans doute beaucoup moins bien placé pour gérer ce genre d'urgences qu'Arthur à sa place, mais il ne pouvait pas laisser son petit-ami souffrir sans rien tenter. Il l'aurait conduit lui-même à l'hôpital s'il avait fallu. « Ma sœur est médecin, je sais qu'elle serait venue. » Arthur n'avait pas besoin de savoir qu'il aurait peut être eu besoin de plusieurs minutes de convaincre Grace de les rejoindre au loft, sachant combien sa sœur aimait sa routine et abhorrait le moindre changement de dernière minute. Il n'avait pourtant aucun doute sur le fait qu'elle serait venue, pour lui autant que parce qu'elle était bien placée pour savoir toute l'importance que Swann avait à ses yeux. Elle était amoureuse elle aussi, et aussi heureuse qu'il pouvait l'être auprès de sa moitié. « Par contre le savoir blessé, c’était tolérable ? » « Bien sûr que non, Arthur. » Penser qu'il puisse tolérer l'idée qu'il arrive quoi que ce soit de mal à Swann prouvait simplement qu'Arthur ne le connaissait pas et ne connaissait pas non plus la profondeur de ses sentiments pour lui. Et il ne lui en voulait pas pour ça, parce qu'il se contentait de juger d'après ce qu'il avait sous les yeux. Pourtant ses accusations le blessaient profondément et Rory n'était définitivement pas en état de les supporter. « J'ai passé l'une des pires soirées de ma vie, et tu sais pourquoi ? Parce que l'homme que j'aime était blessé et que j'avais aucun moyen de lui venir en aide. » Si ce n'est en insistant pour qu'il voit un médecin, mais c'était sans compter sur le caractère têtu de son petit-ami. Pour ça comme pour tant d'autres choses, on peut dire qu'ils s'étaient bien trouvés. « Tu peux décider de pas me croire, mais s'il lui arrivait quelque chose je pourrais pas le supporter. » Il se rappelait comme si c'était hier du jour où il avait bien cru le perdre, lorsque Matt était venu le trouver pour lui annoncer que Swann avait attenté à ses jours. Il n'oublierait jamais la douleur qui l'avait pétrifié ou combien son cœur lui avait semblé dévaler l'intérieur de sa cage thoracique. S'il avait perdu Swann, Rory aurait perdu une part de lui. Ce n'était pas envisageable à l'époque et ça ne l'était toujours pas aujourd'hui.

« J’ai pratiqué des restes de mes années de médecine. » Et pour ça, réellement, Rory en lui était reconnaissant. La seule raison pour laquelle il jugea préférable de ne pas le lui redire, c'est qu'Arthur était suffisamment sur la défensive pour que Rory pèse chaque mot qui sortait de ses lèvres. La dernière chose qu'il souhaitait c'était que le ton monte davantage et que Swann finisse par souffrir de ce qui se serait dit. « Je crois pas non. » Aux yeux d'Arthur, le fait d'aimer l'anglais l'un comme l'autre ne signifiait pas pour autant qu'ils œuvraient du même coté. Aux yeux de Rory, pourtant, c'est exactement de ça dont il était question. « T’as une drôle de façon de lui prouver. » Alors cette fois, ses sourcils se froncèrent et Rory se surprit à dévisager le jeune homme avec dureté. Agacé, il l'était parce qu'Arthur croyait pouvoir tirer des conclusions à partir d'éléments qu'il ne possédait même pas, simplement parce que sa présence dans cet appartement semblait ne pas l'enchanter depuis le premier jour. Depuis qu'il avait compris pour Swann et lui. « Ne fais pas comme si tu savais tout de notre relation, Arthur. Tu me connais à peine et tu crois déjà pouvoir juger de ce qui nous unit ou de l'importance qu'il a à mes yeux. Sauf que si tu avais appris à me connaître, tu saurais que je ferais n'importe quoi pour lui. » Pour Swann, il n'y a rien dont il ne serait pas capable et défendre leur couple était l'évidence même à cet instant. « Peu importe ce que tu crois avoir compris en jugeant d'après une seule soirée. » Une soirée certes horrible mais qui prouvait simplement que Swann et lui traversaient leur lot d'épreuves, comme tous les couples. « Ça ne fait pas de toi quelqu’un de bien. » Et sans qu'il ne sache cette fois quoi répondre, Rory se contenta de relâcher les épaules. Qu'Arthur puisse douter de ses intentions ne faisait que lui rappeler l'époque où tous les journaux de la ville prenaient un malin plaisir à salir son image pour une erreur que beaucoup avaient condamné. S'il s'était battu pour reconstruire sa carrière, il se battrait deux fois plus pour lui prouver que Swann était tout pour lui.

« Je t’ai à l’œil. » Si cet échange avait déjà pris une tournure plus qu'inattendue depuis qu'Arthur lui avait ouvert la porte, cette fois c'est par des menaces à peine voilées que l'anglais faisait entendre son point de vue. « Et je vais te le dire une seule fois, il arrive encore quelque chose à Swann… Tu te reconnaîtras plus dans un miroir. » Tous ceux qui connaissaient Rory savait qu'il ferait tout pour leur éviter d'en arriver là, pas seulement parce qu'il aimait croire qu'Arthur n'avait pas mauvais fond mais aussi parce que Swann méritait qu'il laisse le bénéfice du doute à quelqu'un dont Rory savait qu'il comptait pour lui. « Je comprends pas pourquoi tu tiens à ce point à me voir comme un ennemi. » Ce qui s'était passé l'autre soir, Rory le regrettait tout autant que lui mais rien de ce qu'il pouvait dire ne semblait trouver grâce aux yeux d'Arthur. « Je dois m'attendre à ce que tu me lances des regards noirs chaque fois qu'on se verra ? Parce que ça risque d'arriver souvent, tu sais, étant donné qu'on fait tous les deux partie de la vie de Swann. » C'était d'autant plus vrai que Swann passait beaucoup de temps à la coloc' et que Rory acceptait toujours bien volontiers de l'y rejoindre, aussi touché par l'accueil réservé par Maisie et Sofia qu'à présent refroidi par celui réservé par Arthur. « Je t'ai pas attendu pour prendre soin de lui, tu sais. Il était déjà ce que j'avais de plus précieux avant que tu t'installes à Brisbane et je peux t'assurer qu'il le sera encore le jour où tu repartiras pour l'Angleterre. » Rory n'avait aucune idée des raisons qui l'avaient poussé à s'installer en Australie mais l'absence d'Arthur dans la vie de Swann ces six dernières années n'avait pas pu lui échapper étant donné qu'il avait presque passé tout ce temps auprès de l'anglais. « Je sais qu'il peut compter sur toi aujourd'hui, mais je doute que c'ait toujours été le cas. Alors oui, tu étais là quand il a eu besoin de toi, mais est-ce que tu peux me dire avec certitude que ce sera toujours le cas dans quelques mois ou dans plusieurs années ? » Ce n'était pas une question piège, juste sa façon de lui faire comprendre que si une rupture n'avait pas pu l'éloigner de Swann, rien ni personne ne le pourrait. « Moi je peux te regarder dans les yeux et te dire que je l'abandonnerai jamais. Parce qu'il est ce que j'ai de plus cher. » Pas même si Swann le lui demandait lui-même, sachant trop bien combien ils avaient souffert le jour où ils avaient cru préférable de poursuivre leur route chacun de leur coté. C'était une erreur qu'ils avaient su réparer lorsqu'ils avaient enfin compris qu'ils étaient bien incapables de vivre l'un sans l'autre, et depuis ce jour Rory s'était promis de ne plus jamais laisser quoi que ce soit les éloigner. Il s'était promis de se battre jusqu'au bout pour leur couple, ce qui voudrait dire se battre contre Arthur s'il n'avait pas d'autre choix.

« C'est beaucoup plus compliqué que tu as l'air de le croire. Je t'assure que je me reproche déjà suffisamment ce qui est arrivé. » Il dit probablement la vérité, tout du moins, il cherche à être convaincant en appuyant ses propos d’un regard qui pourrait s’apparenter à de la tristesse. Je pourrais réellement tomber dans le panneau si je n’avais pas connaissance de sa profession et si j’en avais réellement quelque chose à foutre de tout ce mélodrame et de ses sentiments. La réalité veut que par pur désir de le mettre mal à l’aise, je vienne le contredire encore et encore.

C’est ainsi que je prends un malin plaisir à jouer avec ses mots. Pour mieux lire la surprise sur son visage, mieux voir comment il pourrait encore défendre ce que j’estime être une erreur de sa part. « Le harceler ? Non, je… » Un froncement de sourcil de ma part lui laisse entrevoir l’attention toute entière que je porte à chacun de ses mots, sa prochaine phrase s’avérant être plutôt décisive. L’acteur, maîtrise-t-il tous les rôles ? Même celui du connard fini, qu’importe les points de vue ? « Je voulais pas qu'il quitte l'appartement parce qu'il était pas en état d'aller où que ce soit tout seul. Il avait besoin de soins médicaux et je voulais veiller sur lui et appeler quelqu'un pour venir l’ausculter. » Et pourtant, il n'avait pas pensé une seule seconde à la conduire à l’hôpital. « Ma sœur est médecin, je sais qu'elle serait venue. » Il paraît évident que Swann n’aurait jamais accepté d’être conduit aux urgences et encore moins d’être ausculté par une fille qui aurait probablement posé bien trop de questions. Je le sais, parce que je connais assez Swann et j’ose imaginer que Rory maîtrise au moins assez le sujet pour en être venu à la même conclusion. Et pourtant… « Et t’a pas pensé à appeler les pompiers avec ton petit ami amoché et une gonzesse qui a perdu connaissance ? » Juste pour le plaisir de le voir grimacer, d’observer le rouge monter à ses joues et les rouages de son cerveau qui se mettent en fonctionnement pour mieux parer à l’attaque frontale. Il se tortille sur place l’acteur, clairement mal à l’aise, comme s’il avait soudainement perdu le scénario. « J'ai passé l'une des pires soirées de ma vie, et tu sais pourquoi ? Parce que l'homme que j'aime était blessé et que j'avais aucun moyen de lui venir en aide. » Je pourrais insister encore, pointer chacun de ses erreurs, chercher la petite bête pour à peu près tout et n’importe quoi, mais j’ai le sentiment qu’il finira toujours par trouver une pirouette. « Tu peux décider de pas me croire, mais s'il lui arrivait quelque chose je pourrais pas le supporter. » - « J’espère bien ! » que je souligne avec une gravité exagérer qui laisse se dégager toute la haine de celui qui se soucie de son ami. Il ne manquerait plus qu’il prenne cela à la légère, le comédien de bas étage.

Si Swann nous voyait, il serait déjà en train d’analyser les failles de mon bullshit, tout l’acting que je mets en place dans un faux-semblant d’inquiétude pousser à l’extrême. Depuis quand est-ce que je joue les grands frères protecteurs avec lui ? Est-ce simplement pour emmerder la grande asperge ? Ce serait bien la réponse la plus adéquate, assez universelle pour passer le radar, celle qui pourrait clairement contenter tout le monde. Je me coltine le rôle de l’emmerder et Swann pourrait ne voir que cela. Pourtant, je n’oublie pas toute la détresse qu’il a ramenée avec lui cette fameuse nuit. Il a passé tout son temps à défendre Rory corps et âme, mais il fallait être aveugle pour ne pas relever toutes les failles mises à nu ce soir-là. Swann était revenu blessé aussi bien physiquement que mentalement. Je n'ai jamais eu le fin mot de l’histoire, sa version complète des faits, mais je n’en ai guère besoin pour estimer que Rory avait royalement merdé et que désormais, il devenait mon problème. Il allait devoir en payer le prix, ne serait-ce qu’un peu. « Ne fais pas comme si tu savais tout de notre relation, Arthur. Tu me connais à peine et tu crois déjà pouvoir juger de ce qui nous unit ou de l'importance qu'il a à mes yeux. Sauf que si tu avais appris à me connaître, tu saurais que je ferais n'importe quoi pour lui. » Comme le laisser se faire du mal ? Quel bel exemple. « Peu importe ce que tu crois avoir compris en jugeant d'après une seule soirée. » - « Tout te pointe du doigt comme le parfait coupable. » Je hausse les épaules, m’éloignant légèrement du brun pour aller fouiller la poche de ma veste en jean à la recherche de mon paquet de cigarettes. Si je dois continuer avec ce genre de conversation, autant en profiter pour en griller une.

« Je comprends pas pourquoi tu tiens à ce point à me voir comme un ennemi. » - « N’est-ce pas le principe de base du meilleur ami et tout ça ? » Je m’accorde le titre sans même avoir reçu la moindre validation du principal intéressé. Ce ne sont que des technicalités qui ne serviraient pas le propos de cette discussion qui commence à me lasser. Par le passé, j’en avais strictement rien à faire des relations de Swann. Il pouvait bien coucher avec la pire des connasses, je n’allais pas m’en mêler, mais Rory est un homme qui a pour principal défaut d’avoir mis sur mon chemin un Swann amoché et sur le point de céder à une crise de larmes qui aurait pu durer des heures. « Je dois m'attendre à ce que tu me lances des regards noirs chaque fois qu'on se verra ? Parce que ça risque d'arriver souvent, tu sais, étant donné qu'on fait tous les deux partie de la vie de Swann. » - « Probablement. » Comme si cela allait réellement lui causer du chagrin. Je ne vais pas continuer à prétendre quand il semble chercher la vérité de ma part. « Je t'ai pas attendu pour prendre soin de lui, tu sais. Il était déjà ce que j'avais de plus précieux avant que tu t'installes à Brisbane et je peux t'assurer qu'il le sera encore le jour où tu repartiras pour l'Angleterre. » - « Qui t’as dit que j’allais repartir ? » Certes, je n’ai de cesse de me plaindre de ce pays de malheur, mais retourner à Londres ne fais clairement pas partie de mes plans dans un futur proche.

« Je sais qu'il peut compter sur toi aujourd'hui, mais je doute que c'ait toujours été le cas. Alors oui, tu étais là quand il a eu besoin de toi, mais est-ce que tu peux me dire avec certitude que ce sera toujours le cas dans quelques mois ou dans plusieurs années ? » C’est qu’il commence sérieusement à me courir sur les nerfs le serial lover. Pour qui il se prend avec ces jugements basés sur du vent ? « Qu’est-ce que tu disais tout à l’heure déjà ? » Je prends le temps de laisse se dessiner une moue perplexe sur mon visage, juste assez pour apprécier son air idiot. « Ne fais pas comme si tu savais tout de notre relation, Rory. » Je laisse intentionnellement mon accent traîner sur chaque syllabe de son prénom. Je me doute que Swann lui a dit quelque chose à mon sujet, à l’époque de Londres et tout le reste, lui qui semblait si étonné de me savoir capable de panser les plaies de son petit-ami. Il ne sait rien de notre dynamique et je ne lui dois clairement aucune explication. « Moi je peux te regarder dans les yeux et te dire que je l'abandonnerai jamais. Parce qu'il est ce que j'ai de plus cher. » C’est un ricanement empli de sarcasme qui m’échappe suivi par des mots que je ne prends pas le temps de considérer. « Tout le monde fini par abandonner Swann. » Il n’aura pas besoin de savoir que je me compte dans le lot. Ce n’est qu’une triste réalité, une généralité qui s’est prouvée plus d’une fois par le passé. C’étaient ses amis d’avant, la famille qu’il est venu chercher ici, la petite amie qu’il avait trouvé et bien plus encore. « Pourquoi tu serais une exception ? » La question à cent balles.

never said it was easy.

@ARTHUR COVENTRY & RORY

« Et t’a pas pensé à appeler les pompiers avec ton petit ami amoché et une gonzesse qui a perdu connaissance ? » Encore secoué par les accusations formulées par Arthur, l'acteur se trouvait être bien plus affecté par cette conversation qu'il l'aurait d'abord cru. Déplaire et faire mauvaise impression faisait partie des choses qui arrivaient parfois dans son métier, mais c'était bien différent lorsque le meilleur ami de l'homme qu'il aimait le percevait comme la source du problème. « Bien sûr que si, mais tu sais aussi bien que moi que Swann s'est empressé de dédramatiser son état. » Parce que c'est ce qu'il faisait toujours, que l'anglais avait pensé en premier lieu à Murphy et au fait qu'ils pourraient veiller sur elle sans faire appel à un médecin, qui aurait posé trop de questions auxquelles son petit-ami n'avait sans doute aucune envie de répondre. Cette soirée était encore floue sur beaucoup de points mais Rory n'avait pas un seul instant douté de Swann ou du rôle qu'il avait pu jouer dans les blessures de la jeune femme. Quoi qu'il se soit précisément passé, les choses étaient certainement beaucoup plus compliquées qu'en apparences et pour cette raison, il avait été plus simple de leur éviter des ennuis. « J’espère bien ! » Il n'y avait sans doute rien qu'il puisse dire ou même faire qui saurait convaincre Arthur qu'il avait plus que tout les intérêts de son petit-ami à cœur, ce soir-là comme n'importe quel autre, alors Rory ne comptait pas lutter en vain.

Il comprenait pourtant mieux que n'importe quoi d'autre qu'Arthur ait pris à cœur de voir Swann dans cet état. Parce que lui-même en avait eu le cœur serré et l'estomac si retourné qu'il n'en avait pas dormi de la nuit, incapable de supporter l'idée de ne pas pouvoir veiller directement sur l'anglais. Les heures qu'ils avaient passés séparés lui avaient paru interminables et Rory avait surtout eu terriblement peur de le perdre. Peur que cette soirée sonne la fin de tous leurs efforts pour se donner une nouvelle chance, une chance d'être enfin pleinement et ouvertement heureux ensemble. « Tout te pointe du doigt comme le parfait coupable. » « Parce que tu crois qu'on cherche un coupable ? » Il demanda, soucieux que ce puisse être la seule finalité de cet échange. « Tu crois que c'est ce que Swann voudrait, qu'on s'écharpe pour savoir qui a bien réagi à la situation ? » Bien sûr que Rory considérait avoir échoué sur toute la ligne, l'autre soir, et bien sûr qu'il s'en voulait terriblement de ne pas avoir compris que les choses pourraient déraper à tout instant lorsqu'ils les avaient laissé seuls au salon. Après ça, il avait même regretté chaque décision qui l'avait poussé à accepter que son petit-ami passe la nuit ailleurs, quand c'était pourtant tout ce qu'il désirait le moins au monde. Alors oui, il savait qu'il avait fait un paquet d'erreurs et pas un jour n'avait depuis passé sans qu'il se les reproche. Qu'Arthur lui en tienne rigueur à son tour était compréhensible, mais pas s'il décidait de juger le couple qu'il formait avec Swann d'après cette seule soirée.

« N’est-ce pas le principe de base du meilleur ami et tout ça ? » S'il serait lui-même le premier à prendre en grippe toute personne qui pourrait faire souffrir ceux à qui il tenait, Rory voulait croire qu'Arthur n'avait jamais eu de raison de penser qu'il pouvait être mauvais pour Swann. Ils étaient profondément heureux avant les incidents de l'autre soir, et leur couple allait au mieux depuis qu'ils pouvaient enfin officialiser les choses auprès de leurs proches. Tout était source de bonheur pour tous les deux, et Arthur le savait pour les voir régulièrement ensemble à la coloc. « Il s'était jamais rien passé jusque là, pourtant on peut pas vraiment dire que tu m'aies accueilli à bras ouverts. Et je m'en fiche, je peux même faire comme si je savais pas que le vrai problème vient sûrement du fait que l'idée de le savoir avec moi te déplaît probablement. » Lui, un homme. Parce qu'il était naïf mais loin d'être idiot. Arthur n'était sans doute pas un mauvais type, Rory était même convaincu qu'il croyait agir dans les intérêts de Swann, mais de toute évidence l'idée que son meilleur ami soit en couple avec un garçon posait problème quelque part. Il doutait fortement qu'il aurait réagi de la même manière face à une femme. « Pour Swann, je suis prêt à prendre sur moi aussi souvent que ce sera nécessaire. Mais je sais qu'il veut ton bonheur et que ça le blesserait profondément que ce soit pas ton cas. » Parce que si son bonheur comptait vraiment pour lui, il saurait que les deux hommes étaient heureux et ne voudrait pas compliquer les choses. « Probablement. » Les craintes de Rory se vérifiaient à mesure que la discussion se poursuivait et il se retrouvait maintenant tiraillé entre l'envie de se défendre, de défendre son couple, et celle d'éviter de mettre plus d'huile sur le feu. « Qui t’as dit que j’allais repartir ? » « Personne. On n'a pas parlé de toi, si c'est ce qui t'inquiète. J'ai juste supposé que tu aurais peut être le mal du pays. » Swann voudrait sans doute le voir rester plus que n'importe qui dans cette ville, et ce serait même le cas de Rory s'il avait la garantie que les choses pouvaient s'arranger entre Arthur et lui.

« Qu’est-ce que tu disais tout à l’heure déjà ? Ne fais pas comme si tu savais tout de notre relation, Rory. » C'est vrai, il y a beaucoup de choses qu'il ignorait sur leur relation parce qu'il n'avait toujours posé que peu de questions sur le passé de son petit-ami, lequel était suffisamment douloureux pour qu'ils évitent généralement le sujet. C'est Swann qui se confiait à lui quand il s'y sentait prêt, et Rory veillait toujours à accueillir ses confessions avec beaucoup de compréhension. Peu importe son passé, il aimait tout de l'homme qu'il était aujourd'hui. « Tout ce que je sais c'est que tu comptes énormément pour Swann. Et qu'il est la dernière personne qui mériterait de souffrir parce que son petit-ami et son meilleur ami sont incapables de s'entendre. » Les mots paraissaient encore forts quelques minutes plus tôt, mais Rory était assez lucide pour savoir qu'Arthur ne lui ferait pas de cadeaux et que sa seule chance de restaurer un semblant d'harmonie serait d'éviter d'autres confrontations. « Tu sais que ça finira par arriver si tu t'entêtes à nous voir comme des adversaires. » Ils n'en étaient pas à ses yeux, pas alors que le bonheur de Swann était en jeu. Et l'anglais ne devrait pas avoir à choisir entre deux camps qui ne devraient en faire qu'un seul, c'est pourquoi Rory voulait plus que tout que les choses ne dégénèrent pas davantage. « Tout le monde finit par abandonner Swann. Pourquoi tu serais une exception ? » Entendre ces mots était loin de le laisser impassible, alors que Rory n'était pas sans savoir combien Swann s'était déjà senti esseulé à certaines époques de sa vie. Combien cette solitude l'avait même poussé au pire ; à se faire du mal. Le cœur serré, il souffla. « Parce que je l'aime plus que tout. Et que je préférerais tout endurer que de le perdre un jour. » Y compris des regards noirs et des jugements, si c'était la condition pour que Swann soit heureux d'avoir toutes les personnes qui comptaient autour de lui. Rory ne ferait rien pour chasser Arthur du paysage, bien loin de là, mais il nourrissait à présent la peur que chaque échange soit aussi mouvementé que celui-ci. « Je peux repasser plus tard pour prendre ce que j'ai oublié. Je crois que je tombe mal. » Il tempéra alors, subitement bien moins inquiet à l'idée de ne pas remettre la main sur son livre que soucieux d'éviter plus de complications. « Je dirai à Swann que personne n'était là pour m'ouvrir. » Ce n'était pas la peine qu'il sache ce qu'ils s'étaient dit aujourd'hui : ça lui ferait inutilement de la peine et Rory s'y refusait. Il n'avait pas le moindre secret pour Swann mais cette fois-ci il avait surtout à cœur de le préserver. Les choses ne seraient sans doute jamais idylliques entre Arthur et lui, mais ils pouvaient au moins faire en sorte que l'anglais ne se retrouve pas au milieu.