Quel ennui mortel. S’apprêter fut drôle. Choisir sa tenue pour être la plus colorée fut drôle aussi. Tenter de faire une chantilly de cheveux sur sa tête dans un déluge de calque à te faire tousser à chaque spray fut drôle également. Mais cette soirée manque de quelque chose. Tu t’ennuies ; et quand tu t’ennuies, tu cherches une connerie à faire. Quelque chose pour égayer la situation parce que vraiment, tu ne comprends pas l’intérêt d’un bal de promo - ton dernier, amen - si c’est pour juste boire du jus de fruits et gigoter ses hanches maladroitement en espérant que personne ne salisse rien. Tu es affligée de voir les querelles que peuvent apporter de malheureses couronnes en plastique qui seront oubliées une fois cette sordide fête finie. Certaines donnent l’impression de n’avoir attendu que ce moment et voilà les mines déconfittes, les visages en pleurs et les doigts pointés sévèrement qui finissent (enfin) par égayer ta soirée.

Tu as perdu Will car Adèle a jugé bon de vouloir (encore) lui présenter quelqu’un - elle ne perd pas l’espoir, la petite Adèle, quand bien même l’épreuve la plus compliquée chez le Dunham ce n’est pas lui mais toi. Les pauvres prétendantes n’arrivent pas à trouver grâce à tes yeux et le charme discret de ton meilleur ami ne suffit pas à ce qu’elles restent et persistent - c’est un signe qui a de la valeur à tes yeux. Tu picores dans le buffet en te lamantant qu’Asher n’a même pas daigné à venir - t’es sûre qu’il a prévu d’autres plans et tu seras la première à aller lui tirer les oreilles pour ne pas t’avoir invitée - quand un bruit strident perce les tympans de l’assemblée générale par-dessus la musique - un exploit en soi.

Rapidement, tout le monde comprend que quelque chose s’est passé ; on vous invite à partir et tu es dans les premières du lot, égayée de pouvoir enfin t’échapper de ce lieu sordide et ne plus jamais avoir à y remettre les pieds, les mains sur la porte, à quelques secondes de la liberté mais- Mais la porte ne s’ouvre pas. Tu forces avec d’autres, tu t’énerves et tu tapes dedans avec ton pied mais rien à faire. Le noir se fait en même temps que les baffes grésillent et tu tapes la main de la première personne qui ose visiblement s’agripper à toi. “Hey, bas les pattes!” t’as peur, mais t’as encore plus peur d’avoir peur - t’es agacée, prodigieusement, en même temps que le cœur qui bat fort. “Je jure que si c’est une plaisanterie, elle est de très mauvais goût.” les lumières jouent des spots et tu ne parles à personne en particulier mais il est certain que tu n’apprécies pas du tout ce retournement de situation - pourtant, tu voulais du piquant, non ?

@heather harris

Ça court, ça crie, personne n’avance à rien et de toute façon, les issues sont coupées. La liberté n’est pas pour tout de suite et cela t’agace - il ne t’en faut pas beaucoup. Alors t’étais prête à partir à la recherche de Will, voilà qu’on t’agrippe, qu’on te touche. Et si d’habitude, tu n’en fais pas tout un foin, là, ton consentement n’a pas été donné, encore moins avec la rumeur d’un cadavre d’une de ses agiteuses de pompons à quelques mètres - frisson d’effroi te parcourt l’échine. Alors forcément, tu mords, tu râles, tu disputes sans savoir vraiment vers qui. Euh tu vas me parler correctement déjà… Mais surtout est-ce que tu peux te bouger le cul à ouvrir cette putain de porte ou laisser quelqu’un d’autre le faire ! Il faut qu’on se barre d’ici maintenant ! mais une voix te répond, une que tu reconnais pour être aussi haute et perchée que ton ouïe la percevant comme une insupportable gamine au milieu du groupe des populaires - vision peut-être erronnée mais elle agite ses pompons, tous ses pompons et cela suffit pour la cataloguer dans ceux que tu n’aimes pas.

Heather apparaît dans un flash un peu plus long de lumière - quel honneur, une des nominés pour la Reine du Bell. Tu plisses des yeux en la regardant d’un oeil mauvais. “Je te parle comme je veux. T’as qu’à pas toucher les autres, surtout quand on est dans le noir.” non pas que t’es terrifiée du noir mais tu préfères quand même quand y a un peu de lumière. “Oh, mais pourquoi partir, princesse ? On est pas bien, là ?” tu te moques, t’ironises, tu lèves les yeux vers les spots qui jouent et s’ambiancent tous seuls. “Si on avait voulu ouvrir les portes, elles seraient déjà ouvertes, grande maligne. Si tu essayais de faire quelque chose d’utile au lieu de rester plantée là comme une cruche ?” tu tournes sur toi-même et tu finis même par frapper des bras pour te diriger vers un local que tu vois au loin. Tu ne vas pas laisser un abruti t’empêcher de sortir. Personne ne tient Birdie Cadburry enfermée. Personne. Tu donnes un coup de pied à la porte - donner un coup de main aurait suffit mais aux grands maux les grands moyens. Ton sang froid fait presque peur, Birdie ; c’est l’instinct de survie qui ressort. Mais t’es surtout persuadée que tout ceci ne reste qu’une grande farce. Tu veux jouer toi aussi. Il doit bien y avoir quelque chose de pratique dans ce local.

Je pensais que c’était quelque chose qui te dérangeait pas tellement ça.
“Tu penses mal. Je ne me laisse pas toucher par n’importe qui.”

Et certainement pas par la petite blondinette, énième cheerleader de nom, que tu ne connais que parce que vous avez quelques cours en commun et qu’elle a un égo à faire étouffer l’univers entier. Les gens de son gabarit t’exaspèrent en plus de t’agacer, alors que t’es déjà bien agacée de toute cette situation grotesque ; quand vas-tu comprendre que c’est la réalité, Birdie ? Il y a un vrai cadavre mais pour l’instant, tu persistes à croire que ce n’est qu’une mise en scène, une pièce de théâtre montée aux airs d’un mauvais film d’horreur organisé par le comité des élèves afin de marquer le coup. Si t’allais aux vestiaires, si tu voyais le sang, si tu voyais le visage de terreur de la victime, t’aurais sûrement pas cet esprit. Mais là, t’as envie de mettre la main sur ce plaisantin, celui qui s’amuse à vous faire peur alors que tu veux seulement passer à l’after party où personne ici n’est invité de toute façon. Et bien laisse moi la place au lieu de rester planté comme une quiche devant et empêcher les autres de tenter de l’ouvrir. quel pouffiasse que tu penses en l’invitant grossièrement d’un geste du bras à tenter les mêmes manœuvres que toi, autrement dire, tirer, pousser, taper.

Tu n’as même pas l’opportunité de te réjouir que la blonde n’arrive à rien de ses petits ongles manicurés car t’es déjà partie à la chasse de quelque chose. Tu ne sais pas quoi, mais tu veux être sûre de pouvoir te “défendre” s’il y a vraiment un danger qui rôde - ou sinon, pour faire mordre la poussière à l’idiot qui se pense malin alors qu’il n’est qu’un sombre crétin. On aurait au moins pu te prévenir, t’aurais participé à la mise en scène ; après toutes ces années de moquerie et de dédain, t’aurais bien apprécié pouvoir te venger toi aussi. Hey où tu vas comme ça ? Tu connais une sortie ici, genre une fenêtre ? Car à part des balais et le bureau de ce pervers de Monsieur Jenkins, je vois pas ce que tu vas trouver. “Mais qu’est-ce que tu fous là, toi, tu me pistes ?” t’es de mauvaise humeur alors que tu te relèves de ta fouille, accordant à Heather un regard toujours aussi mauvais. Tu chopes une lampe de torche pour éclairer la pièce. “Si y’avait une fenêtre, ça se sentirait.” car ça pue et ça a toujours pué dans ce bureau. “Si y avait une sortie, je te la dirai pas.” chacun sa merde, après tout, et tu n’as confiance qu’en quelques élèves ici, Heather n’en faisait absolument pas partie. “Et je veux pas partir, je veux trouver ce fumier.” tu siffles entre les deux tout en continuant à fouiller ; t’es presque effrayante quand t’es en colère. Tu ouvres un tiroir, un bruit t’attire ; tu mets la main sur une boîte à punaises. “C’est un bon début.” que tu murmures pour toi-même en la rangeant de ton sac. “Si tu continues à rester plantée là sans rien faire, c’est toi qui va finir crever. Après tout, les cheerleaders sont des proies faciles.” elles sont godiches, elles sont stupides et elles sont facilement attrapables ; la preuve, Heather t’a stupidement suivi. T’aurais pu être la coupable, après tout. Quelle idiote.

T’es la seule à avoir l’air d’avoir un semblant d’idée, du coup ça m’intrigue.
Putain mais t’es sérieuse ou quoi, t’as quel âge ? Belle preuve de maturité.
Non mais ça va pas la tête ! T’es suicidaire ou quoi ? Pourquoi tu veux le retrouver ? Tu veux venger Rachel ?
“Mais tu t’arrêtes jamais de parler ?!”

C’est l’hôpital qui se fout de la charité mais celle-là, Heather ne l’a pas volé. Tu n’as pas répondu à toutes ses questions derrière lesquelles se camouflent des attaques et des piques qui n’ont aucun impact sur toi car tu as eu le temps de faire tes armes dans cet établissement à la con avec ces gens idiots et stupides et complètement inutiles. La preuve, tu as un boulet derrière toi que tu te traînes et qui est pire qu’une puce ; elle ne veut pas partir, elle ne veut pas te laisser tranquille, elle te gratte et si elle continue, c’est sur elle que tu vas les jeter, ces foutues punaises. Et tu comptes faire quoi avec ces punaises au juste ? Lui lancer dessus en espérant que ça l’aveugle ? C’est de l’aide de la police dont on a besoin pas d’une lycéenne qui décide de se la jouer Rambo. “Et ben appelle-les, ça te rendra utile.” que tu mords sans une once d’attention visuelle vers la blonde. Tu ne comptes pas te contenter que de punaises, c’est certain ; même si tu penses à une blague, ton instinct de survie te titille et te ramène à l’ordre - et si c’était réel ? Tu préfères croire que ce n’est qu’une illusion, ça étouffe la peur et ça exerbe ta fureur. T’en as besoin, de ta fureur, pour sillonner ce monde.

Ca se voit que t’as jamais vu de film d’horreur, c’est toujours la blonde populaire un peu conne qui survie jusqu’à la fin. Contrairement à la fille qui pense pouvoir jouer les héroines, alors si il faut que je continue de garder ce masque encore un peu pour survivre et bien t’inquiète pas que je le garderais. “Et pourtant, c’est la reine du lycée qui se serait faite tuée. Excuse-moi de ne pas prendre au sérieux les paroles d’une ‘blonde populaire’ assez conne pour croire un film d’horreur. Si tu penses que tout ça est vrai, t’es encore plus stupide que je ne le pensais. C’est qu’une putain de mauvaise farce à laquelle on ne m’a pas invité, je suis outrée.” la farce aurait été bonne si t’avais eu le mot. Mais ce n’est pas le cas. C’est un terrible affront à ton égard.  

Bingo il fonctionne, je vais appeler la police pour qu’ils viennent nous aider. Tu vois au moins MOI je sers à quelque chose. blablabla, tu ne vois pas ce que les flics peuvent faire de l’extérieur - okay, c’est clairement de la mauvaise foi pour ce coup-ci - mais tu grimaces en l’imitant grossièrement. “Tu veux un bonbon en guise de récompense ?” tu demandes avec ironie, les mains continuant à tâtonner derrière le bureau. Tu finis par ouvrir un vestiaire puis un deuxième avant de pousser un cri de victoire, les mains sur la hache. “Et ça, c’est mieux comme arme, je suppose ? Fais attention que je te coupe pas la tête.” Tu sors de la pièce. Tu comptes bien aller ouvrir ces foutues portes à coup de hâche. Et après, tu vas voir cet idiot qui a cru bon gâcher la soirée sans te l’avoir dit. Tu as la rancune tenace, quand tu le veux.